Cinq ans après l’ANI santé au travail, transposé dans la loi du 2 août 2021, la moitié des entreprises auraient finalisé leur document unique d’évaluation des risques professionnels. Face à ce retard, le Medef et la CPME, réunis à l’occasion de la Journée mondiale consacrée à la santé et sécurité au travail, le 28 mai, ont promis de passer à la vitesse supérieure.
Cinq ans après l’accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020 sur la santé et la sécurité au travail, où en est-on ? C’est à cette question qu’ont répondu sept représentants d’organisations patronales et syndicales, au cours d’une table ronde organisée le 28 mai à l’occasion de la Journée mondiale de la santé au travail, au ministère du travail. Sans toutefois en faire une véritable célébration, les intervenants reconnaissent que le texte, transposé dans la loi du 2 août 2021, a permis de poser les bases d’une politique de santé au travail. Avec parmi les axes majeurs, la prévention des risques professionnels dans les entreprises. "Cette question est au cœur de l’accord national interprofessionnel", a insisté Isabelle Mercier, secrétaire nationale de la CFDT qui s’est félicitée que les partenaires sociaux aient pu trouver un terrain d’entente sur ce sujet.
Pour outiller les DRH, la loi consolide le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP), un registre obligatoire à tenir par les entreprises dans lequel sont recensés les risques existants en matière de santé et de sécurité pour les salariés dans le cadre de l’exercice de leur activité professionnelle au sein de l’entreprise.
L’établissement de ce document est une obligation légale, à partir d’un salarié dans l’effectif de l’entreprise.
Pour permettre une traçabilité des expositions aux risques professionnels, le texte prévoit une conservation des versions successives du DUERP.
Reste que cinq ans après, cette ambition a du mal à se concrétiser : "50 % des DUERP ne sont pas faits, martèle Denis Gravouil, le secrétaire confédéral de la CGT en se référant à une étude de la Dares de 2024. Théoriquement pourtant c’est obligatoire. Il est urgent d’agir". L’avis est partagé par Eric Gautron, secrétaire confédéral en charge de la protection sociale collective de Force ouvrière : "L’ANI était censé renforcer l’obligation de sécurité et moderniser le document unique. Or, on voit bien, au regard des chiffres catastrophiques, qu’il n’en est rien". Un retard préjudiciable puisque "ce document a un rôle de conseil mais aussi d’alerte" bien qu’il soit encore trop perçu comme "une obligation administrative", déplore Frédéric Fischbach, membre du bureau de la CFTC pour qui ce document permettrait aussi aux chercheurs de mieux agir en matière de prévention, à partir des données recensées.
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
Les partenaires sociaux avaient pourtant imaginé des mesures d'accompagnement précises. Les services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) devaient notamment aider les employeurs à établir ce document via "la mise à jour régulière de la fiche d'entreprise" et un "conseil dans la rédaction et la finalisation du DUERP".
Force est de constater que ce soutien ne s'est pas matérialisé. "Ces services doivent devenir de véritables catalyseurs de compétences pour accompagner et former les entreprises, particulièrement les PME/TPE qui n'ont pas forcément les savoir-faire en interne", plaide Frédéric Fischbach.
Face à ce retard, les représentants du patronat ont reconnu leurs responsabilités devant la ministre du travail, Astrid Panosyan-Bouvet. Jean-Luc Monteil, vice-président du Medef, a ainsi assuré qu'il "partageait la même préoccupation que les organisations syndicales sur ce sujet" tandis qu'Eric Chevée, vice-président de la CPME en charge des affaires sociales, a qualifié le bilan actuel de "pas acceptable".
Les deux organisations se sont engagées à passer à la vitesse supérieure. "Je vous garantis que cela va bouger. Il n'y a aucune raison que 100 % des entreprises n'aient pas de DUERP dans les prochains mois", a promis le représentant du Medef.
Si l'objectif fait consensus, les méthodes pour y parvenir diffèrent. Alors que les syndicats, notamment la CGT, évoquent la possibilité de recourir aux sanctions financières - le chef d'entreprise risque actuellement une amende pouvant aller jusqu'à 7 500 euros (15 000 euros en cas de récidive) en l'absence de DUERP - le patronat privilégie une approche incitative.
Jean-Luc Monteil plaide ainsi pour une méthode fondée sur "la pédagogie et l'accompagnement", avec la mise à disposition prochaine d'un kit "ludique et accessible" pour sensibiliser les entreprises à cette démarche. Plus radical, Eric Chevée souhaite "challenger" les SPSTI et n'exclut pas de faire appel à "de nouveaux acteurs" si les résultats ne s'améliorent pas rapidement.
Autre point d'achoppement : la dématérialisation du DUERP. La loi du 2 août 2021 prévoyait un dépôt dématérialisé du document sur un portail numérique national, garantissant sa conservation et sa mise à disposition sur le long terme, conformément au décret du 5 avril 2022.
Mais ce portail n'a jamais vu le jour. Le ministère du travail avait confirmé, à l’époque, rencontrer des difficultés techniques dans sa mise en œuvre et rechercher une "solution alternative". Une situation qui complique encore l'application effective du dispositif, comme le rappellent Eric Gautron et Frédéric Fischbach.
Aucune nouvelle piste n’a toutefois été évoquée par le ministère du travail lors de cette table ronde.
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