Droit de l'environnement : l'échelle des peines est à revoir

Droit de l'environnement : l'échelle des peines est à revoir

07.02.2020

Environnement

Dans un rapport commun, le CGEDD et l'IGJ conseillent de mieux coordonner les polices administrative et judiciaire et de revoir l’arsenal répressif pour mieux prévenir, sanctionner et réparer les atteintes à l'environnement.

"C’est le troisième rapport du même type qui dit la même chose. Il est important de les mettre en œuvre", fait remarquer Bruno Cinotti, du CGEDD (conseil général de l’environnement et du développement durable) et membre de la mission "justice pour l’environnement", lors d'un colloque sur le sujet. Le rapport évoqué, du CGEDD et de l’IGJ (inspection générale de la justice), rendu public la semaine dernière, a été remis en octobre aux ministres concernés. Dans un projet de loi présenté en conseil des ministres le 29 janvier 2020, Nicole Belloubet reprend trois des recommandations : une juridiction spécialisée dans chaque cour d’appel, une convention judiciaire écologique pour pousser les entreprises à plaider coupable et réparer les préjudices commis et le travail d’intérêt général dans le domaine de l'environnement.

 

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On reste loin des 21 préconisations de la mission. Mais il est vrai que certaines peuvent relever d’une simple circulaire ministérielle ou passer par voie réglementaire. Quelles sont-elles ? "Pas forcément originales", concède Daniel Atzenhoffer, l’un des inspecteurs. Pour eux, le principal enjeu est d’agir vite pour éviter que le dommage pour l’environnement ne s’aggrave. Ils conseillent pour cela, en résumé, de mieux coordonner les polices administrative et judiciaire et d’adapter l’arsenal répressif.  

Echelle de peines

"C’est un droit ni lisible, ni visible", rapporte Daniel Atzenhoffer. À cause de sa complexité et de sa fragmentation, le droit de l’environnement est difficile à appréhender. La mission conseille de regrouper les principales et les plus graves incriminations environnementales, issus de plusieurs codes (de l’environnement, minier…), dans le code pénal au sein d’un nouveau chapitre. Aussi, il faut "des infractions plus généralistes, créer des délits génériques", comme celui de la mise en danger délibéré de l’environnement par exemple, explique Daniel Atzenhoffer.

"L'échelle des peines, inadaptée, doit être réévaluée", écrivent les inspecteurs. Un inventaire des infractions devrait aboutir à correctionnaliser les comportements relevant aujourd’hui du domaine contraventionnel et dont les conséquences pour l’environnement sont pourtant graves, estiment-ils. "Il faut redynamiser les peines complémentaires. L’arsenal est très complet mais rarement appliqué", observe aussi Daniel Atzenhoffer. La mission recommande de faire passer le mot par circulaire.

Récidive

Cette circulaire devrait aussi favoriser les ajournements de peine avec injonction de remise en état ou réparation. Le texte devrait aussi demander aux parquets de définir dans ses réquisitions le notion de "remise en état" et de préciser ses modalités de contrôle et de suivi. 

La récidive est très peu utilisée dans ces affaires. Pour y remédier, la mission propose donc des assimilations légales entre les délits des différents codes. Dans la logique du "name and shame", elle recommande aussi d’afficher la condamnation sur la page d’accueil du site Internet commercial de l’entreprise en cause.

Coopération entre préfet et procureur

L’environnement n’est pas la priorité des parquets. Pourtant, une circulaire du 21 avril 2015 prévoyait la désignation de magistrats référents. Seulement, ces personnes ne consacrent que 0,02 % de leur temps à la répression des atteintes à l’environnement, d'après les réponses obtenues par la mission.

Cette circulaire instaurait aussi des mécanismes de collaboration avec les administrations déconcentrées et les établissements publics en charge des polices administrative et judiciaire de l’environnement, sous l’autorité des parquets. Elle n’a pas vraiment été suivie. Les protocoles d’accord "sont souvent inactifs", explique Delphine Agoguet, inspectrice de la justice membre de la mission. Celle-ci conseille donc de mettre en place des Codde, comités opérationnels départementaux de défense écologique, co-présidés par le préfet et un procureur de la République du département. Ces structures définiraient les priorités de contrôle, examineraient des atteintes à l'enteinte à l'environnement recensées, évalueraient l'impact des mesures prises... 

Le projet de loi porté par Nicole Belloubet va-t-il être modifié dans le sens de ces recommandations ? Le texte sera examiné au Sénat à partir de la fin du mois. 

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Pauline Chambost

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