Du contradictoire dans la mission confiée à un technicien par le juge-commissaire
31.03.2016
Gestion d'entreprise

La mission confiée en vertu de l'article L. 621-9, alinéa 2 du code de commerce n'est pas une expertise judiciaire relevant du code de procédure civile mais doit néanmoins respecter un minimum de contradictoire.
Le débat est ancien. Pour essayer de clarifier la situation, la loi du 26 juillet 2005 a, dans l’article L. 621-9, alinéa 2 du code de commerce, précisé que, lorsque la désignation d’un technicien est nécessaire, seul le juge-commissaire peut y procéder en vue d’une mission qu’il détermine, sous certaines réserves qui n’intéressent pas la cause. De ce texte, a déjà été déduite la compétence exclusive, en principe, du juge-commissaire pour ordonner des investigations de toute sorte dans le cadre d’une procédure collective, les plus fréquentes portant sur la recherche de responsabilités (des dirigeants, de tiers…), mais l’espèce montre que le champ d’intervention du technicien désigné est plus vaste.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Avant la loi de 2005, la Cour de cassation n’avait jamais qualifié d’expertise judiciaire ce type de mesure confiée par le juge-commissaire à un technicien. L’arrêt commenté affirme qu’il n’en va pas autrement, malgré l’opinion d’une partie de la doctrine, après l’entrée en vigueur du nouvel article L. 621-9 du code de commerce. Il faut sans doute voir, dans cette constance de la jurisprudence, le souci de la Cour de cassation d’éviter, alors que les mesures d’investigation requièrent une certaine célérité en matière de procédure collective, l’application des règles très contraignantes du code de procédure civile, dont le non-respect est également source de nombreuses nullités. Dès lors que le texte ne renvoie pas lui-même au code de procédure civile et donne compétence au juge-commissaire pour déterminer librement la mission du technicien sans autre précision, la Cour de cassation a estimé que celui-ci n’était pas tenu de respecter les formes de l’expertise judiciaire.
Pour autant, bien consciente que les résultats des investigations confiées au technicien par le juge-commissaire seront déterminantes dans le débat judiciaire qui pourrait naître ultérieurement, la Cour de cassation fait évoluer sa jurisprudence en exigeant, dans le déroulement même des opérations du technicien, le respect d’un minimum de contradictoire. C’est l’apport de l’arrêt du 22 mars 2016.
Sans aller jusqu’à imposer une contradiction permanente lors de l’exécution des opérations, la Cour de cassation, à la recherche d’un équilibre délicat, impose, désormais, avec l’arrêt commenté, que les intéressés y soient quand même associés, même si elle exclut clairement l’obligation de communiquer un pré-rapport. Certes, en l’absence de référence aux règles du code de procédure civile sur l’expertise judiciaire, tout sera question d’espèce, mais l’arrêt donne au moins quelques exemples d’une possible association. Ainsi, pour une mission consistant à évaluer les immeubles du débiteur, l’organisation d’une ou plusieurs réunions avec leur propriétaire (au siège de son exploitation et sur le site des immeubles à estimer), la possibilité pour celui-ci de communiquer des éléments d’information en cours d’investigation, la référence à ces éléments par le technicien, la réponse de ce dernier aux observations du propriétaire sont autant d’éléments démontrant une réelle association de celui-ci aux opérations qui ne se réduit pas, comme auparavant, à la simple prise de connaissance, au cours des débats ultérieurs, du contenu du rapport du technicien. La Cour de cassation appréciera, dans chaque cas, si les juges du fond, en validant ou non les opérations discutées d’investigation, ont légalement justifié leur décision. C’est un contrôle léger, mais réel.
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