Ententes : condamnation d'une société mère présumée responsable de l'infraction de sa filiale

03.11.2020

Gestion d'entreprise

La société-mère est présumée responsable de l'infraction de sa filiale, même si c'est un holding de type conglomérat qui contrôle plus de 100 sociétés différentes, opérant dans des secteurs commerciaux distincts.

En l’espèce, une société holding cède la totalité des titres formant le capital social d’une filiale. Puis la Commission européenne la déclare responsable de la participation de cette filiale, avant la cession, à une entente interdite par l’article 101 du TFUE.

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La Commission fonde cette responsabilité sur la jurisprudence européenne selon laquelle :

  • d’une part lorsqu’une société mère détient directement ou indirectement la totalité ou la quasi-totalité du capital social d’une filiale, il existe une présomption réfragable qu’elle exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de la filiale,
  • d’autre part à défaut d’être renversée, cette présomption justifie la condamnation par la société mère au paiement de l’amende sanctionnant l’infraction au droit de la concurrence commise par la filiale.

Dans le cadre du recours contre la décision de la Commission devant le Tribunal de l’UE, la société holding conteste l’applicabilité de cette présomption principalement pour deux motifs :

  • elle est un holding de type conglomérat qui contrôle plus de 100 sociétés différentes opérant dans des secteurs commerciaux distincts, de sorte qu’elle se borne à exercer une activité de gestion à caractère technique et financier dénuée d’aspects commerciaux,
  • elle a cédé ses titres dans la société filiale sans que cette cession n’ait la moindre répercussion sur la participation de cette dernière à l’entente interdite, ce qui met en évidence le fait que la filiale agit en pleine autonomie.

Le Tribunal de l’UE juge ces deux motifs non susceptibles de remettre en cause la présomption contestée.

La Cour de Justice de l’UE rejette le pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal et rappelle qu’en vertu d’une jurisprudence bien établie, une infraction aux règles de concurrence commise par une filiale peut être imputée à la société mère, notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques. Dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 101 du TFUE, la Commission peut adresser une décision infligeant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (notamment les arrêts du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C 521/09 P, EU:C:2011:620 ; du 5 mars 2015, Commission e.a./Versalis e.a., C 93/13 P et C 123/13 P, EU:C:2015:150; du 27 avril 2017, Akzo Nobel e.a./Commission, C 516/15 P, EU:C:2017:314).

Selon la CJUE, tel est le cas en l’espèce de la société holding de type conglomérat détenant la totalité du capital d’une filiale coupable d’une infraction aux règles de concurrence, et de ce fait présumée susceptible d’exercer effectivement une influence déterminante sur le comportement de cette filiale, dès lors qu’elle ne renverse pas cette présomption par la preuve de l’autonomie de comportement de la filiale.

Max Vague, Docteur en droit, Maître de conférence des universités, Avocat
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