Experts-comptables, avocats, notaires… peuvent travailler dans une même société

Experts-comptables, avocats, notaires… peuvent travailler dans une même société

11.05.2017

Gestion d'entreprise

Une même société a désormais le droit de proposer une offre large de services fournis notamment par des experts-comptables, des avocats et des notaires. Les textes attendus pour ces structures pluri-professionnelles d’exercice viennent d'être publiés.

Un vent léger de libéralisation souffle à nouveau sur l'exercice du droit et de la comptabilité. Fin 2016, plusieurs professions de ces secteurs ont obtenu explicitement le droit de faire du démarchage commercial (voir l'article 3 de la loi de 2016 dite de modernisation de la justice du XXI ème siècle), quand ce n'était pas déjà le cas pour certaines d'entre elles. Depuis quelques jours, une nouvelle étape a été franchie. Un administrateur judiciaire, un avocat, un avocat au conseil d’Etat et à la Cour de cassation, un commissaire-priseur judiciaire, un conseil en propriété industrielle, un expert-comptable, un huissier de justice, un mandataire judiciaire et un notaire ont le droit d'exercer dans une même société. Cette faculté est offerte depuis le 8 mai 2017 par le biais de la société pluri-professionnelle d’exercice (SPE) — les décrets attendus ont été publiés ce 7 mai pour une entrée en vigueur dès le lendemain. En théorie, ce dispositif, qui est le fruit de la loi Macron de 2015 (loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques) voire aussi de PDF iconla directive services de 2006, est important pour bâtir des offres relativement complètes et intégrées. Une même société peut proposer plusieurs services juridiques et comptables (à l'exclusion sur ce dernier point des activités réservées au commissaire aux comptes lesquelles ne peuvent être fournies via une SPE) mais aussi pourquoi pas d'autres prestations tels que le conseil en gestion ou en système d'information. Jusqu’à présent, les libéraux du chiffre et du droit ne pouvaient pas travailler dans une même société. Leurs moyens de collaborer étaient plus limités, par exemple en travaillant dans un même groupe via des sociétés de participation financière de professions libérales (SPFPL) dont l’objet est davantage capitalistique, en créant des réseaux pluridisciplinaires, comme le font les Big four Deloitte, EY, KPMG et PwC, ou encore, situation probablement la plus fréquente, en intervenant ponctuellement de façon complémentaire comme c'est le cas entre experts-comptables et avocats.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

Découvrir tous les contenus liés
Communication entre autorités compétentes

Les textes publiés, qui viennent compléter l’ordonnance n° 2016-394, apportent des précisions d’une part communes aux SPE et d’autre part spécifiques aux professions susceptibles d’y être exercées sous cette forme. On y apprend notamment que la SPE doit être inscrite (ou nommée) auprès de chaque autorité compétente, tel qu’un Ordre professionnel, dont relève la profession exercée. Chaque autorité doit informer son (ses) homologue (s) de la décision qu’elle a prise sur la demande d’inscription (nomination). Le contrôle que peut exercer cette autorité est limité aux conditions d’exercice qui relèvent de la profession qu’elle «supervise». Toutefois, "les contrôles ou inspections peuvent être conjoints entre deux ou plusieurs de ces autorités", précise le décret n° 2017-794.

Le secret partageable peut être dénoncé

Des précisions sont également apportées sur la relation entre la société et le client. L’ordonnance de 2016 pose le principe selon lequel la SPE doit informer le client potentiel des prestations susceptibles de lui être fournies mais indique que ce dernier n’est pas tenu de souscrire à l’offre complète proposée par la SPE. Ainsi, une entreprise peut choisir de ne travailler qu’avec l’avocat et l’expert-comptable d’une SPE bien que celle-ci propose également les services d’un notaire. Le décret n°2017-794 précise qu’un contrat écrit doit être conclu. Autre aspect important : le respect du secret. L’ordonnance fixe aux professionnels exerçant dans la SPE le principe d’une obligation de confidentialité et de secret professionnel avec toutefois la possibilité de partager les informations sous-jacentes, en cas d’accord du client, aux autres professionnels de la SPE. Le décret n° 2017-794 ajoute notamment que le client peut, sans préavis et sans pénalité, dénoncer l’accord qu’il a donné. De ce point de vue-là, le client reste maître de ses confidences. Bref, l'outil juridique pour faciliter l'interprofessionnalité entre ces métiers est disponible. Mais le sujet de fond est davantage culturel : ces professionnels libéraux auront-ils envie de travailler dans une même société ?

Ludovic Arbelet
Vous aimerez aussi