Deux règlements délégués publiés en novembre 2023 précisent la classification des activités durables établie par le règlement Taxonomie. Ils constituent une référence importante pour permettre aux émetteurs et aux acteurs des marchés financiers d'arrêter leur stratégie au regard des exigences de la finance durable. Dans cette chronique, Myriam Roussille, professeur agrégée des facultés de Droit, revient sur l'apport majeur de ces textes.
Le cadre sur la finance durable étant posé, vient désormais le temps d’en concrétiser les objectifs. La préoccupation pour les questions environnementales a conduit à l’adoption de plusieurs textes d’importance, ces dernières années.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Le règlement (UE) 2019/2088 sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers impose aux acteurs des marchés financiers, notamment aux investisseurs institutionnels (sociétés gérant des fonds d’investissement, entreprises d’assurance, conseillers en investissement financier, etc.), la publication de leur politique en matière d’investissement durable et le classement des produits qu’ils créent, conseillent ou commercialisent (Règl. (UE) dit « SFDR » pour Substainable Finance Disclosure Regulation).
Les sociétés cotées sont, de leur côté aussi, lourdement affectées. Après que la directive comptable a été aménagée pour imposer une déclaration non financière, la CSRD les oblige à publier des données standardisées sur la manière dont elles se positionnent par rapport aux objectifs environnementaux (Dir. 2013/34/UE dite « Directive comptable » ; Dir. 2022/2464 dite « Directive CSRD »). L’AMF – qui a affirmé porter une attention particulière désormais à ce reporting - a d’ailleurs publié récemment un rapport analysant les publications de 31 sociétés non-financières cotées relatives à l’alignement de leurs activités économiques sur la taxonomie.
La pertinence de ces mesures est évidemment conditionnée par l’existence d’un langage commun en la matière. A cet égard, le règlement Taxonomie établissant les critères de définition d’une activité durable constitue la pierre angulaire de la finance durable (Règl. (UE) 2020/852 dit « Règlement Taxonomie »). Les sociétés soumises à la CSRD doivent se conformer à ce règlement Taxonomie (le considérant 17 de la directive CSRD visant l’article 8 du règlement Taxonomie). Les acteurs des marchés financiers seront aussi enclins à s’y référer pour se conformer à leurs propres obligations de reporting.
Si le règlement Taxonomie énonce les six objectifs environnementaux auxquels doivent contribuer les activités et auxquels celles-ci ne doivent pas causer de préjudice pour être qualifiées de durables (critères dit « DNSH » pour « Do no significant harm »), ces deux premiers critères de qualification appellent évidemment des précisions. Deux de ces six objectifs constituent ce qu’il est convenu d’appeler le volet climatique de la Taxonomie : l’atténuation du changement climatique et l’adaptation au changement climatique. Un premier acte délégué a été adopté en 2021 pour préciser les critères d’examen technique permettant de déterminer à quelles conditions une activité économique peut être considérée comme contribuant substantiellement à l’atténuation du changement climatique (Règl. délégué (UE) 2021/2139 de la Commission, 4 juin 2021 : JOUE n° L 442, 9 déc.). Mais il ne couvrait que des activités relevant de neuf secteurs économiques, choisies en raison de leur poids significatif dans les émissions globales de gaz à effet de serre.
Par conséquent, un nouvel acte complète ces critères pour des activités qui n’avaient pas été couvertes par le premier texte (Règl. délégué (UE) 2023/2485 de la Commission, 27 juin 2023 : JOUE n° L, 21 nov.). Les sociétés cotées dont l’activité est en lien avec le secteur des transports (notamment, par navire) ou encore le dessalement, et les services de prévention et de réaction aux catastrophes et urgences climatiques, de même que les investisseurs institutionnels qui produisent ou commercialisent des fonds en partie investis dans ces secteurs ou activités pourront donc affiner l’information qu’ils sont tenus de publier ou de mobiliser pour leurs obligations de transparence.
Un second acte délégué du même jour précise les critères relatifs aux quatre autres objectifs environnementaux, à savoir :
- l’utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines ;
- la transition vers une économie circulaire ;
- la prévention et la réduction de la pollution ; et
- la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes (Règl. délégué (UE) 2023/2486).
Cela recouvre concrètement de très nombreux domaines. Les émetteurs et les acteurs des marchés financiers sont ainsi en mesure de mieux appréhender quelles sont les activités économiques pertinentes dans lesquelles se développer et investir, sachant que les textes prévoient les seuils ou des niveaux de performance que l’activité économique doit atteindre pour pouvoir être considérée comme contribuant substantiellement à l’un de ces objectifs et les critères permettant d’exclure qu’elle ait des incidences négatives importantes sur l’environnement.
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