Fixation du point de départ du délai de prescription en cas d'action en responsabilité
04.09.2024
Gestion d'entreprise

Il varie selon qu'il s'agit de réparer un préjudice dont l'existence est en lien avec une première action en justice, ou si c'est le même dommage qui doit être réparé dans les deux procédures.
Dans un souci de clarification du droit, la chambre mixte de la Cour de cassation a été saisie de litiges relatifs au point de départ du délai de prescription en cas d’action en responsabilité. Elle l’a fait dans deux arrêts distincts rendus le même jour, en adoptant une motivation enrichie, ainsi qu’une formulation identique bien qu’il s’agît de deux affaires distinctes.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Dans la première affaire dont le recours en responsabilité contre un notaire dépendait du sort d’un redressement fiscal, elle a fixé ce point de départ au jour du jugement irrévocable ayant statué sur cette question (Cass. ch. mixte, 19 juill. 2024, n° 20-23.527, n° 295 B + R). Dans la seconde, qui concernait une action récursoire contre un coauteur, elle a fixé ce point de départ au jour de l’assignation en justice engagée par la victime, portant sur le même dommage qu’il s’agit de réparer dans les deux procédures (Cass. ch. mixte, 19 juill. 2024, n° 22-18.729, n° 296 B + R).
Selon ces arrêts (points 17 et 15), « Ces solutions, ainsi précisées, assurent un juste équilibre entre les intérêts respectifs des parties et contribuent à une bonne administration de la justice, en limitant, pour la première, des procédures prématurées ou injustifiées et en favorisant, pour la seconde, la possibilité d'un traitement procédural dans une même instance du contentieux engagé par la victime ».
Ces deux affaires ont fait l’objet d’un communiqué de presse publié le 19 juillet 2024.
L'action principale en responsabilité
En 1998, des parents cèdent des actions à leurs enfants et un notaire établit les actes de cession. Par la suite, les enfants ont à leur tour donné ces titres à leurs propres enfants. En 2001, estimant que ces actes avaient pour but d'échapper à l'impôt, l’administration fiscale a procédé à un redressement fiscal. En 2013, les enfants ont alors assigné leur notaire en responsabilité. Mais la cour d’appel a déclaré leur action prescrite, après avoir fixé le point de départ du délai de prescription de droit commun à la date de la notification par l'administration fiscale de l'avis de mise en recouvrement, soit le 30 septembre 2002.
La chambre mixte de la Cour de cassation casse l’arrêt pour violation de l’article 2224 du code civil, aux termes duquel « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ». Elle en déduit qu’en matière d’action en responsabilité civile, le délai de prescription « court à compter du jour où celui qui se prétend victime a connu ou aurait dû connaître le dommage, le fait générateur de responsabilité et son auteur ainsi que le lien de causalité entre le dommage et le fait générateur ».
Or, lorsque le dommage invoqué par une partie dépend d'une procédure contentieuse l'opposant à un tiers, il ne se manifeste qu'au jour où cette partie est condamnée par une décision passée en force de chose jugée. La Cour de cassation cite plusieurs arrêts statuant en ce sens, notamment en matière fiscale. De ce fait, « Seule la décision juridictionnelle devenue irrévocable établissant ce droit met l'intéressé en mesure d'exercer l'action en réparation du préjudice qui en résulte ». L’arrêt est donc cassé pour avoir fixé un autre point de départ et il appartiendra à la cour de renvoi de rechercher à quelle date le redressement fiscal a fait l’objet d’une décision irrévocable (Cass. ch. mixte, 19 juill. 2024, n° 20-23.527, n° 295 B + R).
L'action récursoire en responsabilité
En 2006, un notaire est chargé de régler une succession. Les héritiers ont fait le choix d’établir une convention de partage amiable, sous le contrôle de leurs avocats. En 2010, le conjoint survivant, insatisfait du partage, estime que le notaire n’a pas rempli son devoir d'information et de conseil et engage une action en responsabilité contre lui. Le notaire est définitivement condamné en 2016 à verser des dommages et intérêts au conjoint survivant. Estimant que l’avocat ayant assisté le conjoint survivant est pour partie responsable du dommage, il l’assigne en responsabilité, ainsi que ses assureurs, en 2017.
Mais la cour d’appel déclare la demande prescrite au visa de l’article 2224 du code civil, après avoir fixé le point de départ du délai de prescription de droit commun de son action récursoire à la date à laquelle le notaire avait été assigné par le conjoint survivant, soit en 2010. En effet, le notaire ne pouvait ignorer, dès la délivrance de l'assignation le concernant, ni l'erreur commune à tous les professionnels du droit intervenus, commise lors de l'établissement de l'acte de notoriété, ni le fait que le conjoint n'avait pu obtenir la validation de l'option qu'il avait entendu régulariser sur ses conseils, ni les conséquences préjudiciables qu'il en tirait.
La chambre mixte de la Cour de cassation confirme la solution ainsi retenue. En effet, de telles actions récursoires « sont fondées sur un préjudice unique causé à ce tiers par une pluralité de faits générateurs susceptibles d'être imputés à différents coresponsables. Or, une personne assignée en responsabilité civile a connaissance, dès l'assignation, des faits lui permettant d'agir contre celui qu'elle estime responsable en tout ou partie de ce même dommage, sauf si elle établit qu'elle n'était pas, à cette date, en mesure d'identifier ce responsable ». Elle cite également, au point 11 de son arrêt, des décisions ayant statué dans ce sens (Cass. ch. mixte, 11 juill. 2024, n° 22-18.729, n° 296 B + R).
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