Forfait-jours : la convention collective nationale des cabinets d'experts comptables n’est pas suffisamment protectrice du salarié
08.12.2021
Gestion du personnel

La Cour de cassation confirme que la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables ne garantit pas que l’amplitude et la charge de travail du salarié restent raisonnables. Les conventions de forfait en jours conclues sur son fondement doivent donc être annulées.
La CCN des cabinets d’experts-comptables n'est pas suffisamment protectrice
Une salariée soumise à la convention collective nationale (CCN) des cabinets d’experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974 saisit le conseil de prud’hommes afin de faire prononcer la nullité de la clause de forfait en jours insérée dans son contrat de travail.
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
La Cour d’appel lui donne raison au motif que les dispositions de la CCN sont insuffisamment protectrices de la sécurité et de la santé des salariés et condamne l’employeur à lui payer un rappel d’heures supplémentaires.
L’employeur saisit la Cour de cassation. Selon lui, l’article 8.1.2.5 de la CCN sur laquelle est basée la convention de forfait en jours de la salariée avait été considéré, dans un arrêt rendu le 12 janvier 2011 (Cass. soc., 12 janv. 2011, n° 09-69.679), comme suffisamment protecteur de la sécurité et de la santé des salariés. La convention de forfait en jours de la salariée qui a été conclue le 24 septembre 2012, soit après la décision de la Cour de cassation du 12 janvier 2011, doit donc être reconnue comme valable.
Les deux arrêts de la Cour de cassation du 14 mai 2014 qui ont opéré, selon l'employeur, un revirement de jurisprudence en déclarant nulles les conventions de forfait en jours basées sur l’article 8.1.2.5 de la CCN (Cass. soc., 14 mai 2014, n° 12-35.033 et n° 13-10.637) ne peuvent pas s’appliquer à la convention de forfait qu'il avait valablement conclue avec la salariée. Selon l’employeur, cette règle jurisprudentielle affirmant que l'article 8.1.2.5 de la CCN n'est pas de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé des salariés concernés a été édictée après la conclusion de la convention de forfait de la salariée et son application porterait atteinte aux principes de proportionnalité et de sécurité juridique.
La convention de forfait en jours est nulle
La Cour de cassation ne suit pas le raisonnement de l’employeur.
D'une part, l’arrêt du 12 janvier 2011 cité par l'employeur n’a pas statué sur les garanties édictées par la CCN des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes aux salariés ayant signé une convention de forfait en jours mais simplement sur la possibilité de soumettre la salariée qui était partie au litige au régime du forfait compte tenu de l’autonomie dont elle disposait. La Cour de cassation n’a donc pas opéré de revirement de jurisprudence dans les arrêts postérieurs du 14 mai 2014 dans la mesure où elle se prononçait pour la première fois, dans ces arrêts, sur les garanties assurées par les dispositions de la CCN.
D'autre part, les deux arrêts du 14 mai 2014 s’inscrivaient dans le cadre d’une jurisprudence établie selon laquelle toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif garantissant le respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires (v. Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-71.107).
Les dispositions de la CCN des cabinets d’experts-comptables n’étant pas de nature, comme elle l’avait déjà reconnu, à assurer ces garanties, la Cour de cassation confirme la décision des juges du fond qui ont fait ressortir que la clause de forfait en jours avait été conclue sur le fondement d’un accord collectif ne satisfaisant pas aux exigences légales.
La clause du contrat de travail relative au forfait en jours de la salariée doit logiquement être annulée.
Les heures supplémentaires doivent être majorées sur la base du salaire réel
En cas d’annulation de la convention de forfait en jours, le salarié peut alors demander à ce que les heures accomplies au-delà de la durée légale du travail soient considérées comme des heures supplémentaires et soient rémunérées comme telles.
C'est au juge qu’il appartient alors de vérifier l'existence et le nombre de ces heures supplémentaires (Cass. soc., 4 févr. 2015, n° 13-20.891).
Dans ce cas, la Cour de cassation précise que la majoration doit porter sur le salaire de base réel de la salariée et non, comme le prétend l’employeur, sur la base du salaire minimum conventionnel. En d'autres termes, la majoration doit porter sur le salaire réel, peu importe que le niveau de salaire tienne déjà compte de dépassements de la durée légale de travail.
Pour rappel, l'employeur peut demander, de son côté, le remboursement des jours de réduction du temps de travail accordés en exécution de la convention de forfait nulle (Cass. soc., 4 déc. 2019, n° 18-16.937).
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