Garantie dans le temps : exemple de passé connu avant la date de prise d'effet du contrat

08.11.2017

Gestion d'entreprise

Est considéré comme tel le cas du gynécologue qui avait eu connaissance du risque d'une procédure judiciaire, en raison des conséquences très graves d'un accouchement et des courriers exigeant la communication du dossier médical.

« Lorsqu’un même sinistre est susceptible de mettre en jeu la garantie apportée par plusieurs contrats successifs, il est couvert en priorité par le contrat en vigueur au moment de la première réclamation, sans qu’il soit fait application des dispositions des quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 121-4 » (C. assur., art. L. 251-2, al. 7, relatif à l’assurance de responsabilité médicale). Par ailleurs, selon ce même article (al. 6), « le contrat ne garantit pas les sinistres dont le fait dommageable était connu de l’assuré à la date de la souscription ».
Un enfant présente depuis sa naissance en mai 1989 une infirmité motrice cérébrale. Le gynécologue obstétricien qui a procédé à son accouchement était assuré à cette date par société d’assurance A. Le contrat d’assurance ayant été résilié le 1er mars 2000, ce gynécologue souscrit un nouveau contrat prenant effet à cette même date auprès de la société B.
En novembre 2003, les parents de la victime l’assignent en référé expertise, puis en 2011 et 2012, ils assignent en indemnisation le gynécologue et ses assureurs successifs. Le second assureur (B) ayant soutenu que le fait dommageable était connu de l’assuré lors de la souscription du contrat le 1er mars 2000, le premier assureur (A) est condamné à indemniser les préjudices subis par la victime et ses parents.
Cet assureur forme un pourvoi, dont le moyen unique comporte dix branches, dont les sept dernières « s’attaquent aux motifs surabondants par lesquels la cour d’appel a retenu qu’en outre, la société [A] ayant pris la direction du procès, elle était présumée avoir renoncé à toutes les exceptions connues à cette date ». En effet, l’accouchement litigieux étant survenu pendant la période de garantie, celle-ci était en tout état de cause acquise au gynécologue obstétricien. Les deux premières branches contestent le fait que le dommage était connu de l’assuré avant la souscription du second contrat, qui avait pris effet plus de 10 ans après les faits. En effet, il n’a jamais été saisi d’une réclamation avant cette date (première branche). De plus, le fait dommageable susceptible d’engager sa responsabilité était incertain dans sa réalisation et non déterminable dans son étendue lors de cette souscription (deuxième branche).
Remarque : aux termes de l’article L. 251-2, alinéa 3, du code des assurances, tout contrat d’assurance de responsabilité médicale « garantit l’assuré contre les conséquences p��cuniaires des sinistres pour lesquels la première réclamation est formée pendant la période de validité du contrat, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs du sinistre ». En d’autres termes, cette assurance doit garantir les réclamations intervenues pendant la période de validité du contrat, ce qui était le cas, même si le fait générateur du dommage est antérieur à la date de souscription. Les contrats en base réclamation comportent donc, de par la loi, une clause dite de « reprise du passé ».
Mais encore faut-il que ce « passé » soit inconnu de l’assuré au moment de la souscription. Dans ce cas, les deux assurances successives auraient vocation à intervenir de manière cumulative si l’article L. 251-2, alinéa 7, ne précisait pas que le contrat en vigueur lors de la réclamation doit s’appliquer en priorité. En l’espèce, le contrat de la société B devait intervenir en priorité si le passé était inconnu de l’assuré.
La Cour de cassation rejette le pourvoi, car la cour d’appel a souverainement estimé que le fait générateur du dommage était connu de l’assuré lors de la souscription du contrat. En effet, elle a relevé que le gynécologue « avait eu connaissance, d’une part, des conséquences extrêmement graves pour l’enfant des circonstances de sa naissance, d’autre part, en 1996, à compter des courriers itératifs de [sa mère] exigeant la communication de son dossier médical, du risque d’une procédure judiciaire ».
Remarque : cela permet à la Cour de cassation de rejeter la troisième branche du moyen, qui repose sur le postulat erroné selon lequel le sinistre était susceptible de mettre en jeu la garantie apportée par plusieurs contrats successifs. Elle juge ce moyen inopérant « dès lors qu’en l’absence de garantie due par la société [B], seul avait vocation à recevoir application le contrat souscrit auprès de la société [A] ».
S’agissant de contrats conclus avant le 31 décembre 2002, date d’application de la loi n° 2002-1577 du 30 décembre 2002, on peut toutefois se demander si l’article L. 251-2 du code des assurances était effectivement applicable ou s’il ne fallait pas plutôt appliquer la jurisprudence antérieure (en ce sens, à propos de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 sur l’assurance de responsabilité non médicale : Cass. com., 14 déc. 2010, n° 08-21.606, n° 1267 P + B ; Cass. 2e civ., 15 sept. 2011, n° 10-20.970, n° 1534 D).
Enfin, selon un autre arrêt, « pour considérer que le fait générateur était connu de l’assuré, il ne suffit pas qu’un incident grave soit survenu au cours des soins dispensés par lui, encore faut-il qu’il ait connaissance d’éléments permettant d’imputer cet incident grave à son intervention ». Tel n’est pas le cas si un médecin anesthésiste « a toujours nié tout lien de causalité entre l’arrêt cardiaque de son patient et son intervention », en l’absence de pièces justificatives contraires (Cass. 2e civ., 30 juin 2011, n° 10-15.048, n° 1298 D).

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La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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James Landel, Conseiller scientifique du Dictionnaire Permanent Assurances
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