Huissier de justice : exercice de la profession par une société commerciale

25.07.2016

Gestion d'entreprise

La profession d'huissier peut dorénavant s'exercer dans le cadre d'une société de type commercial. Les demandes de nomination s'effectueront directement auprès du ministère de la justice par télé-procédure. Une société peut être nommée dans plusieurs offices.

Le décret n° 2016-883 du 29 juin 2016, relatif à l’exercice des professions d’huissier de justice, de notaire et de commissaire-priseur judiciaire sous forme de société autre qu’une SCP ou qu’une SEL précise les modalit��s d’application des dispositions introduites par l’article 63 de la loi Macron permettant à une société de type commercial d’exercer la profession d’huissier de justice (Ord. n° 45-2592, 2 nov. 1945, art. 1erbis AA, créé par L. n° 2015-990, 6 août 2015, art. 63). Il est applicable à toutes les sociétés de forme commerciale, excepté celles qui donnent la qualité de commerçant à leurs associés c’est-à-dire les SNC, les sociétés en commandite simple et les sociétés en commandite par action (D., art. 1er).

Nomination de la société dans un ou plusieurs offices

La nomination de la société dans un office public et ministériel est prononcée par arrêté du ministre de la justice et vaut agrément (D., art. 2, al. 1er). La demande de nomination doit être adressée au ministre de la justice, par télé procédure sur le site internet du ministère de la justice (D., art. 3). Le recours à la télé procédure deviendra obligatoire à une date fixée par arrêté du ministre de la justice, et au plus tard le 31 décembre 2016. Avant cette date, la demande doit être transmise au ministre de la justice, par LRAR (D., art. 34, II). Les pièces justificatives qui doivent accompagner la demande sont énumérées par l’article 4 du décret.

Le bureau de la Chambre nationale des huissiers de justice (CNHJ) doit communiquer au ministre de la justice, dans les 20 jours suivant sa demande, toute information dont elle dispose permettant d’apprécier les capacités professionnelles et l’honorabilité de chacun des associés qui entendent exercer au sein de l’office. Les associés n’exerçant pas la profession au sein de la société, ainsi que les représentants légaux qui ne sont pas associés et les personnes physiques membres des organes d’administration, de direction ou de surveillance de la société, doivent présenter des garanties suffisantes en ce qui concerne leur honorabilité. Le ministre de la justice rejette la demande d’agrément de la société si les conditions légales ou réglementaires auxquelles elle est soumise ne sont pas remplies (D., art. 5).

Une société peut être nommée dans plusieurs offices d’une même profession (D., art. 2, al. 3), sous réserve du respect des mêmes conditions fixées à l’article 24 du décret pour l’huissier associé. Ainsi, un associé exerçant sa profession d’huissier au sein d’une telle société ne peut exercer cette profession à titre individuel, en qualité de membre d’une autre entité dotée de la personnalité morale ou en qualité d’huissier salarié. Si la société est titulaire de plusieurs offices, il doit être nommé et exercer dans un seul de ces offices. De plus, chaque huissier associé, qui exerce au sein d’une société, doit accomplir les actes de sa profession au nom de la société. Il doit consacrer son activité professionnelle à l’accomplissement du service public dont il a la charge, au titre de l’office dans lequel il est nommé en qualité d’associé. Enfin, les associés exerçant au sein de la société doivent s’informer mutuellement de leur activité (D., art. 24, al. 1 à 4).

Activités accessoires

L’huissier associé peut exercer une autre activité professionnelle, au sein de la société ou en dehors de celle-ci, dès lors qu’aucune disposition législative ou réglementaire et aucune stipulation des statuts de la société ne l’interdit, que cette activité est exercée à titre accessoire et qu’elle est compatible avec l’accomplissement du service public dont il a la charge ainsi qu’avec les règles de déontologie de sa profession. L’huissier associé qui fait usage de cette dérogation doit en informer par écrit la chambre départementale ou interdépartementale dont il relève dans un délai de 30 jours suivant le début de l’activité concernée. La chambre départementale ou interdépartementale peut lui demander tous renseignements ou documents utiles pour lui permettre d’apprécier si les exigences de compatibilité sont satisfaites (D. art. 24, al. 5 et 6).

Modification du capital, de la composition des associés et de répartition des droits de vote
Cession d’actions entre associés ou modification de la répartition des droits de vote entre associés

Toute modification de la répartition ou du nombre des actions ou parts sociales détenues par les associés exerçant la profession dont l’exercice constitue l’objet social de la société, ou des droits de vote afférents, fait l’objet, dans un délai de 30 jours, d’une déclaration au ministre de la justice, par télé procédure. Toute cession d’actions ou de parts sociales entre ceux des associés qui n’exercent pas la profession considérée et toute modification de la répartition du capital et des droits de vote entre de tels associés sont soumises à déclaration dans les mêmes conditions. Tous les autres projets de cession d’actions ou de parts sociales sont soumis à la procédure de déclaration préalable assortie d’un pouvoir d’opposition (D., art. 8).

Entrée d’un nouvel associé exerçant par cession d’actions

Tout projet d’augmentation de capital conduisant à l’entrée dans la société d’un nouvel associé, non titulaire d’un office, et tout projet de convention par laquelle un des associés cède tout ou partie de ses actions ou parts sociales à un tiers, non titulaire d’un office, en vue de l’exercice, par ce tiers, de la profession pour laquelle la société est titulaire d’un office, est soumis à l’approbation du ministre de la justice. Le projet est transmis par télé procédure. Le projet est assorti de la demande du nouvel associé tendant à sa nomination dans l’office ou l’un des offices dont la société est titulaire. Le ministre de la justice, se prononce sur la demande de nomination du nouvel associé comme en matière de nomination de la société (D., art. 9).

Entrée d’un nouvel associé n’exerçant pas

Tout projet d’augmentation de capital conduisant à l’entrée, dans la société, d’un nouvel associé qui n’entend pas exercer la profession dont l’exercice constitue l’objet social de la société au sein de celle-ci ou tout projet de convention par laquelle un des associés cède tout ou partie de ses actions ou parts sociales à un tel nouvel associé fait l’objet d’une déclaration au ministre de la justice, au moins 2 mois avant sa réalisation. Le ministre de la justice, peut s’opposer au projet dans un délai de 2 mois après réception de la demande (D., art. 10).

Entrée d’un nouvel associé apportant un droit de présentation

Tout projet d’augmentation de capital ou de cessions d’actions ou de parts sociales conduisant à l’entrée dans la société d’un nouvel associé qui apporte à la société le droit de présentation sur l’office dont il est titulaire relève de la procédure de déclaration préalable assortie d’un pouvoir d’opposition. Dans le délai de 2 mois (4 mois jusqu’au 1er juillet 2019) suivant la réception de la déclaration, le ministre de la justice peut s’opposer au projet ou nommer la société dans l’office concerné (D., art. 11 et 33).

Retrait d’un ou plusieurs associés

Les statuts peuvent prévoir que, lorsqu’un associé exerçant sa profession dans ou hors de la société cesse d’exercer, notamment en cas de démission d’office, de destitution, d’atteinte de la limite d’âge, d’expiration de l’autorisation de prolongation d’activité ou de retrait volontaire accepté par le ministre de la justice, il est contraint de se retirer de la société par une décision des autres associés prise à une majorité fixée par les statuts de la société et qui ne peut être inférieure aux deux tiers des actions ou des parts sociales des autres associés (D., art. 13, I, al. 1er). Dans cette hypothèse, l’associé dispose d’un délai de 6 mois à compter de la date de prise d’effet de sa cessation d’exercice pour céder ses actions ou parts sociales à la société, à ses coassociés ou à un tiers à la société (D., art. 13, I, al. 2). Le décret prévoit la procédure en cas de désaccord du sortant (D. art. 13, al. 5 et 6).

Le retrait d’un associé, qui n’entend plus exercer la profession au sein de la société, doit être accepté par le ministre de la justice. L’associé, qui demande à cesser d’exercer au sein de la société sans céder ses actions ou parts sociales, doit préalablement en informer la société et les autres associés (D., art. 14).

Fusion et scission de sociétés

Sont soumis à la procédure de déclaration préalable assortie d’un pouvoir d’opposition :

- tout projet de fusion de sociétés existantes nommées dans un office, y compris lorsque l’une ou plusieurs des sociétés objets de la fusion est une SEL ou une SCP et résultant dans la constitution d’une société autre qu’une SCP ou une SEL ;

- tout projet de scission conduisant à la nomination d’une ou plusieurs sociétés nouvelles, autres qu’une SCP ou une SEL, dans un ou plusieurs offices dont la société scindée est titulaire.

Dans le délai de 2 mois (4 mois jusqu’au 1er juillet 2019) suivant la réception de la déclaration, le ministre de la justice peut, soit s’opposer, soit nommer la ou les sociétés issues de la fusion ou de la scission dans les offices dont étaient précédemment titulaires les sociétés fusionnées ou la société scindée et nommer leurs ou ses associés (D., art. 15 et 33).

Tout projet de transformation d’une société existante titulaire d’un office, y compris les SCP en une société d’une forme autre qu’une SCP ou une SEL est soumis à la procédure de déclaration (D., art. 16, al. 1er).

Tout projet de transformation d’une SEL titulaire d’un office en une société d’une forme autre qu’une société civile professionnelle est soumis à la procédure de déclaration préalable assortie d’un pouvoir d’opposition (D., art. 16, al. 2).

Fonctionnement de la société

Le décret précise les règles qui s’appliquent à ce type de société en ce qui concerne entre autres la discipline (D., art. 28 et 29), les contrôles de comptabilité, la suspension et le retrait d’agrément (D., art. 18 à 20), la dissolution de la société. Ces règles sont pratiquement identiques à celles qui s’appliquent aux SEL.

Jean-Yves Borel, Conseiller scientifique Dictionnaire permanent Recouvrement de créances et procédures d'exécution

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