Imprimez la patte de votre direction juridique

« Lorsqu’on parle de marque à des directeurs juridiques, le premier terme qui leur vient à l’esprit est généralement : INPI », constate dans un sourire Arthur Sauzé, avocat chez EY Société d’avocats qui animait le 25 octobre dernier un webinaire sur le thème « construire la marque de sa direction juridique ». Une manière de souligner que le marketing appliqué à la fonction juridique n’en est encore qu’aux balbutiements, notamment en raison de la place du droit dans l’entreprise. « L’enjeu de la direction juridique est de sortir du rôle de fonction support, pour agir au coeur de la stratégie, résume Cécile Russeil, directrice juridique de l’éditeur de jeux vidéo Ubisoft. 

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Il est important qu’une direction juridique ait un ADN, et que celui-ci soit connu. Chez Ubisoft, nous nous définissons comme des partenaires du business. Notre objectif est de comprendre le métier et les besoins des opérationnels, et à partir de là, de proposer des solutions adaptées, en ayant analysé et contrôlé les risques. » Un directeur juridique membre du Comex renforce ainsi la visibilité de son service. C’est le cas de Cécile Russeil, mais aussi de Patrick Remot, directeur juridique de l’afficheur Clear Channel : « Le Comex se réunit chaque semaine. Je peux y faire état des dernières informations juridiques et mettre la fonction en lumière. »

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Sihem Ayadi, fondatrice et CEO de la plateforme Juridy Legal Design, conseille de fabriquer une véritable marque de la direction juridique, comme elle l’a fait elle-même lorsqu’elle était directrice juridique d’Auchan, explique-t-elle dans le webinaire d’EY Avocats. «Une marque, c’est une équipe, une expertise, des services, des process et une communication. La première étape consiste à se renseigner sur la stratégie et les valeurs de son entreprise, son ambition, ses objectifs à moyen long-terme, la qualité de ses clients, partenaires et fournisseurs. Il faut ensuite lister tout ce que fait la direction juridique pour permettre à l’entreprise d’atteindre ses ambitions et d’incarner ses valeurs ». Cela permet de pointer les manques ou les opacités pour y remédier. 

L’un des principaux points à clarifier porte souvent sur le rôle et l’action de la direction juridique. Arthur Sauzé conseille : « Il faut apporter de la lisibilité sur les prestations proposées : contrats, compliance, etc. Et travailler sur un parcours clair pour les clients internes. »  La direction juridique de Clear Channel a ainsi pris l’habitude de sensibiliser les opérationnels à la compliance via une newsletter dédiée : « Nous résumons l’actualité de l’Agence Française Anticorruption, celle des affaires qui secouent le monde économique, et enfin nous mettons en lumière l’action de la direction juridique en matière de conformité », indique Patrick Remot.

D’autre part, les juristes de Clear Channel communiquent sur leurs résultats et les prix remportés, comme, tout récemment le Trophée d’or de la compliance*. Concrètement, Arthur Sauzé préconise la présence d’un juriste à tous les événements de l’entreprise, et pourquoi pas, l’organisation d’événements par la direction juridique elle-même, tels que des afterworks. Côté parcours clients, il est conseillé de bâtir un process simple et intuitif, afin que les opérationnels sachent vers qui se tourner, pour quoi, comment. Ce qui implique aussi l’automatisation de certains contrats basiques et leur gestion par les opérationnels eux-mêmes.

La direction juridique d’Ubisoft , largement digitalisée, s’appuie sur la créativité pour innover : « Au sein de notre direction, une équipe Innovation de 4 personnes travaille sur l’évolution du rôle des juristes dans l’entreprise, ce qui passe par des approches nouvelles en termes de formation – comme les vidéos et tutoriels pour les opérationnels – mais aussi en termes de rédaction des contrats. Après nous être formés au legal design, nous y avons recours systématiquement pour rendre plus pragmatiques les documents remis aux opérationnels, ainsi que les contrats », explique Cécile Russeil.

Tout le monde a en mémoire la vidéo de formation au RGPD d’Ubisoft avec les Lapins Crétins, qui a rencontré un tel succès qu’elle a même été commercialisée en externe, à la demande de certaines sociétés. Communiquer sur de nouvelles méthodes de travail, « briller » à l’extérieur, permet aussi d’attirer les talents et de faciliter le recrutement des juristes.

Faut-il pour autant créer une véritable « marque », avec slogan et logo ? Selon Patrick Remot : « L’enjeu est tout d’abord de faire reconnaître sa plus-value, ses résultats, afin d’être crédible en interne et en externe. Le marketing est utile à condition qu’il y ait du fond, et qu’il garde un « effet waouh ».  Donc un côté exceptionnel, marquant et authentique.

^{*lors de la 6e édition du Sommet du Droit en Entreprise}