Index de l'égalité : "Je m'interdis parfois d'augmenter un salarié pour ne pas creuser les écarts de rémunération"

Index de l'égalité : "Je m'interdis parfois d'augmenter un salarié pour ne pas creuser les écarts de rémunération"

25.02.2020

Gestion du personnel

Au 1er mars 2020, les entreprises dont l'effectif est compris entre 50 et 250 salariés seront obligées de publier leur index de l'égalité professionnelle. Où en sont ces entreprises, à quelques jours de la date fatidique ? Quelles difficultés rencontrent-elles pour calculer leurs indicateurs ? Entretiens avec trois responsables RH de PME.

"C’était plutôt simple. Durant une réunion du CSE, j’ai été chercher la feuille Excel et les données de l’entreprise et on a calculé ça ensemble, en direct". Pour Philippe Besnier, dirigeant du pôle informatique de TGS France comptant une centaine de salariés, l’index de l’égalité professionnelle est loin d’être une révolution. Car même les petites structures sont normalement déjà familières du suivi des données en matière de parité. Elles doivent fournir aux représentants du personnel, dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, des chiffres relatifs à l'égalité entre les femmes et les hommes.

Le calcul de l’index nécessite toutefois davantage de précision quant aux données collectées. Un travail minutieux qui a été entamé par les PME de plus de 50 salariés, dans l’objectif de publier avant le 1er mars 2020 la totalité de leurs indicateurs en matière d’égalité professionnelle.

Un appui sur la branche

"Il y a eu un travail conséquent de vérification des données, s’agissant des rémunérations à prendre en compte", explique Roseline Laurent, DRH de la filiale France de Glory, un groupe japonais de fabrication de distributeurs de billets. "Par exemple, les primes d’ancienneté ne sont pas intégrées au calcul de l’index".

 Difficile de trouver une place pour l'index sur le site corporate !

Une fois les données fiabilisées, le calcul technique n’est qu’une formalité. "Le site du ministère du travail propose une documentation qui nous a bien aidés, avec des tableurs préparamétrés", explique Emmanuelle Bogros, responsable contrôle de gestion sociale pour la filiale française de Moncler, marque de prêt-à-porter haut-de-gamme. "Ce qui est plus difficile, c'est de trouver ensuite une place sur le site corporate monde pour publier l'index en français!" Roseline Laurent s’est elle aussi fondée en partie sur le tableur fourni par le gouvernement, mais elle s’est aussi tournée vers sa branche, celle de la métallurgie. "L’UIMM propose une documentation en ligne d’une centaine de pages très détaillée, avec des cas concrets qui ont été très utiles."

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
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Trop différent pour être comparé

Lorsque vient l’heure de découvrir sa note, c'est souvent le même critère qui pose problème, celui des écarts de rémunération entre femmes et hommes. C'est particulièrement le cas dans les secteurs traditionnellement non-paritaires. Philippe Besnier considère ses 85/100 comme une très bonne note pour son entreprise du secteur informatique, historiquement très masculinisée. "Cela donne une bonne image de l'entreprise, même si force est de constater qu’il y a des écarts de rémunération dans notre collège cadre. Il y a beaucoup de raisons à cela, liées à l’histoire, à des situations de reprise d’entreprises... mais cela ne veut pas dire qu'on restera inactifs !"

Nous obtenons 29/40 en termes d'écarts de rémunération

Chez Glory (85/100), on compte seulement 20 % de femmes. Ce qui, étonnament, ne signifie pas que ces dernières sont désavatangées. "La méthode de calcul exclut les primes d’astreinte et de repas attribués aux techniciens itinérants, qui sont principalement des hommes, explique Roseline Laurent. Cela peut donner l’impression qu’ils sont moins bien rémunérés que les femmes de la même catégorie." Autre problématique métier chez Moncler (89/100) où les différences de salaire importantes entre les managers de boutiques sont justifiées par la taille des magasins. "Comme les chiffres d’affaires à générer sont différents, les profils le sont aussi, explique Emmanuelle Bogros. Pour les grandes boutiques on recrute des managers expérimentés, chassés dans des grandes maisons de luxe. Ce qui génère des grandes disparités dans l’index : nous obtenons 29/40 en termes d'écarts de rémunérations." Difficile, dans des petites structures, de comparer les salariés entre eux lorsque les postes sont tous différents.

La tentation de la discrimination positive

Et une fois l’index publié ? "Nous allons continuer à assurer le suivi des rémunérations individuelles, assure Roseline Laurent. Nous avons un outil qui permet au manager, lors de la revue salariale annuelle, d’observer l’effet d’une augmentation sur les écarts entre femmes et hommes. Et j’ai également une visibilité sur ces chiffres." Chez TGS, l'index a généré de nouvelles méthodes. "Chaque fois que je touche un salaire, je regarde en direct l’impact sur l’index, indique Philippe Besnier. Cela implique malheureusement d’avoir volontairement une attitude discriminante... Je m’interdis parfois fois d’augmenter quelqu’un car je sais que je risque de creuser les écarts dans une même catégorie professionnelle."

A notre niveau, on essaie de changer la tendance

Chez Moncler comme chez Glory, on agit plus en profondeur sur les causes des inégalités. "Nous n’avons pas prévu d’action qui découle directement de la publication de l’index, indique Emmanuelle Bogros. Nous allons continuer à travailler sur le guide de la parentalité, l’équilibre entre vie professionnelle et personnelle. Cela fait partie des choses sur lesquelles on peut travailler en faveur de l'égalité, sans être sur une problématique économique : permettre des jours de congé, l’organisation de planning, des actions managériales, etc." "Les responsabilités familiales aggravent les écarts, renchérit Roseline Laurent. A notre niveau, on essaie de changer la tendance. Cela fait plusieurs années qu’on met en place le maintien de salaire durant le congé paternité. On maintient le variable du père, sans proratiser durant son absence. Notre but est d'inciter les pères à prendre également part à la vie de famille."

Laurie Mahé Desportes
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