Au début du mois de mai, Philips a accepté, pour la deuxième fois en 10 ans, de mettre un terme à une action répressive issue du Foreign Corrupt Practices Act américain (« FCPA »), et de verser à la Securities and Exchange Commission (« SEC ») 62 millions de dollars au titre de son comportement. Il s'agit de la troisième action répressive récente en vertu du FCPA impliquant des distributeurs. Sara Susnjar et Jérôme Herbet, avocats associés au sein du cabinet Winston & Strawn, reviennent sur cette décision.
Le 11 mai 2023, Koninklijke Philips N.V. (« Philips »), une société de dispositifs médicaux basée à Amsterdam qui est active dans plus de 100 pays et compte 79 000 salariés, a accepté une transaction avec la SEC au titre de son comportement à l’occasion de la vente de matériels de diagnostic médical en Chine, qui a directement violé les dispositions du FCPA en matière de tenue de comptabilité et de contrôles internes.
Philips n’a pas admis ou contesté la conclusion de la SEC mais a payé :
- une amende civile de 15 millions de dollars,
- et le remboursement de frais ainsi que le paiement d’intérêts d’avant-jugement à hauteur de 47,1 millions de dollars.
Selon le communiqué de presse de la SEC, « des filiales de Philips en Chine, dénommées ensemble Philips China dans l’ordonnance de la [SEC], ont appliqué des réductions de prix spécifiques pour certains distributeurs, créant ainsi un risque que ces marges excessives des distributeurs soient utilisées pour effectuer des versements inappropriés à des fonctionnaires [chinois]. L’ordonnance de la SEC a également retenu que des salariés, distributeurs ou revendeurs des filiales de Philips en Chine avaient eu un comportement inapproprié destiné à encourager des agents publics hospitaliers à rédiger des spécifications techniques dans des appels d’offres afin de favoriser les produits Philips ».
Philips n’a pas été condamnée pour le versement de pots-de-vin. Au contraire, Philips a été sanctionnée pour défaut dans ses contrôles internes, lesquels ont été considérés comme insuffisants pour donner des garanties raisonnables (par exemple, concernant les opérations de distribution et l’utilisation de ces tiers.).
Premièrement, le FCPA était applicable du fait de l'utilisation du dollar dans cette affaire. Un directeur commercial de Philips pour la province de Hainan a apporté un montant équivalent à 14 500 dollars dans la résidence d’un directeur de service de radiologie d’un hôpital en contrepartie de son aide pour réaliser des ventes à hauteur de 4,6 millions de dollars pour deux dispositifs.
Ce point concerne la plupart des sociétés étrangères : l’extraterritorialité de l’action à son plus haut niveau concernant une société étrangère (qui n’est pas américaine) opérant dans un autre pays étranger (autre que les Etats-Unis), et qui est soumis au FCPA uniquement en raison de son accès aux marchés de capitaux américains. Cette application extra-territoriale de la loi américaine a conduit le Président Macron en avril 2023, au cours de son vol en provenance de Chine, à affirmer que l’UE devait s’opposer à l’« extraterritorialité du dollar américain ». Cela souligne une deuxième tendance dans les actions répressives en vertu du FCPA, qui voit des sociétés en difficulté uniquement en raison de leur accès aux marchés de capitaux américains.
Deuxièmement - le cas est d'autant plus complexe qu’en 2013 - Philips avait accepté de verser 4,5 millions de dollars à la SEC pour des infractions au FCPA en matière de tenue de comptabilité et de contrôles internes, sur la base d’un comportement similaire en Pologne.
Des salariés d’une filiale polonaise de Philips, dans au moins trente réponses à des appels d’offres, ont effectué des versements inappropriés à des fonctionnaires d’établissements de santé polonais pour augmenter les chances que les appels d’offres pour la vente de matériels médicaux soient attribués à Philips.
L'ordonnance du SEC notait toutefois les mesures mises en place par Philips au cours de l'enquête à savoir :
- retenir trois cabinets d’avocats et deux cabinets d’expertise comptable pour mener l’enquête et concevoir des mesures correctives pour remédier aux défauts des contrôles internes ;
- établir des procédures strictes en matière de due diligence dans le cadre de la sélection de tiers ;
- formaliser et centraliser sa gestion des contrats / le processus de leur vérification ;
- établir un processus global de vérification lié aux paiements contractuels ;
- modifier et réviser les politiques globales et les formations, entre autres.
Indépendamment, Charles Cain du département de répression de la SEC a noté en mai que « cette affaire souligne le besoin pour les sociétés de concevoir et mettre en œuvre des contrôles internes suffisants pour tenir compte de l’ampleur de leurs activités. Malgré les corrections mises en place suite à ses infractions antérieures, Philips n’a toutefois pas réussi, en plusieurs années, à mettre en œuvre des contrôles internes suffisants concernant ses ventes de produits technologiques médicaux en Chine ».
Le FCPA est une loi fédérale américaine de 1977 qui criminalise les versements à des fonctionnaires étrangers pour satisfaire leurs intérêts économiques. Le FCPA s’applique dans le monde entier aux personnes physiques et morales ayant une certaine relation avec les Etats-Unis et se livrant à des pratiques « corruptrices » à l’étranger, y compris les sociétés américaines, les entreprises étrangères dont les titres sont cotés aux Etats-Unis, les ressortissants, citoyens et résidents américains agissant dans le cadre d’une pratique étrangère de corruption, sur le sol américain ou ailleurs. Le FCPA interdit toute instrumentalisation du commerce entre Etats pour faciliter ces pots-de-vin. En plus des dispositions en matière de lutte contre la corruption, le FCPA a modifié la loi américaine « 1934 Securities Exchange Act » pour imposer à toutes les sociétés dont les titres sont cotés aux Etats-Unis de remplir certaines obligations comptables, afin de garantir des états financiers exacts et transparents et l’existence de contrôles internes adéquats. Le FCPA est mis en œuvre conjointement par le ministère de la Justice américain et la SEC, qui peuvent prononcer des sanctions civiles et pénales. Sur la seule année 2022, le ministère de la Justice et la SEC ont initié des actions répressives en vertu du FCPA à l’encontre de huit sociétés, imposant des sanctions financières pour un montant total de 1,5 milliard de dollars. |
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Nos engagements
La meilleure actualisation du marché.
Un accompagnement gratuit de qualité.
Un éditeur de référence depuis 1947.
Des moyens de paiement adaptés et sécurisés.