L'appréciation de la proportionnalité du cautionnement

26.09.2018

Gestion d'entreprise

Le cautionnement n'est pas disproportionné lorsqu'au moment où la caution est appelée, son patrimoine lui permet de faire face à son obligation.

En l’espèce, une personne physique, associée unique d’une société, s'était rendue caution solidaire pour garantir le remboursement de quatre prêts accordés à cette société. Cette dernière ayant été placée en redressement judiciaire, converti par la suite en liquidation judiciaire, la banque a assigné la caution en paiement de la somme de 69 900 euros. Cette dernière, invoquant le caractère manifestement disproportionné de son engagement, demandait à en être déchargée, la banque soutenant devant le juge du fond, qu'au moment où elle a été appelée, la caution était en mesure de faire face à son engagement.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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La cour d’appel de Besançon constatait dans un arrêt du 8 mars 2017, que la banque ne contestait  pas le caractère disproportionné de l’engagement à la date de signature du contrat et que la caution se reconnaissait propriétaire d'un appartement évalué à 155 000 euros, Cependant, la cour d’appel soulignait  que la caution restait redevable du solde d'un emprunt immobilier de 80 000 euros contracté le 24 décembre 2008, dont le solde s'élevait à la somme de 48 621,19 euros au jour de la mise en jeu du cautionnement, ce qui réduisait la valeur estimée de son immeuble à 106 378,81 euros, et qu'elle percevait une pension d'invalidité mensuelle de 1 140,81 euros. La caution prétendait donc qu'au vu de la modicité de ses revenus, de son état de santé, et de l'état actuel du marché immobilier, son patrimoine, uniquement constitué de cet appartement, ne lui permettait pas de faire face à son obligation de caution, ce que validaient les juges du fond  qui décidaient donc que le cautionnement s’avérait disproportionné aux ressources de la caution.

La chambre commercial casse la décision au motif que la caution ne peut être déchargée de son engagement de caution, ce dernier serait-il manifestement disproportionné à ses biens et revenus lors de sa conclusion, lorsqu'au moment où elle est appelée, son patrimoine lui permet de faire face à son obligation., ce qui était manifestement le cas en dépit du fait que la situation économique de cette caution semblait peu florissante !

L’arrêt est justifié au regard de la loi. Il convient de rappeler si besoin est,  qu’en application de l’article L. 332-1 du code de la consommation, si le cautionnement n’était pas, à l’origine, disproportionné ou si, au moment où la caution est appelée, c’est-à-dire à la date de la constatation de sa dette de caution suite à la défaillance du débiteur principal (Cass. com., 1er mars 2016, n° 14-16.402), son patrimoine lui permet de faire face à son obligation, elle devra exécuter son engagement. En revanche, si aucune de ces conditions n’est satisfaite, la caution est libérée de son engagement et aucune exécution ne peut lui être demandée, même en proportion de sa solvabilité (Cass. com., 22 juin 2010, n° 09-67.814, I : Bull. civ. IV, n° 112).

De façon générale, le cautionnement est un contrat par lequel une personne dénommée caution, s’engage vis-à-vis d’un créancier à le payer si le débiteur principal est défaillant à l’échéance (C. civ., art.  2288). Le cautionnement donne ainsi au créancier qui en est bénéficiaire, le droit, en cas de défaillance du débiteur principal, d’agir contre la caution, qui garantit, le cas échéant à hauteur d’un montant déterminé (obligatoirement s’il s’agit d’une personne physique), le paiement de la dette du débiteur sur l’ensemble de son patrimoine. Ce principe devrait être réaffirmé dans le texte issu prochainement de l’ordonnance réformant les sûretés (cf projet d’article 2288-1 du code civil). La caution devant payer, il reste simplement à vérifier que l’engagement ne souffre aucun vice de forme ou de fond.

A ce titre, s’agissant d’une question liée à la proportionnalité de l’engagement, l’appréciation des facultés de remboursement de la caution doit par conséquent s’effectuer obligatoirement à deux moments par le juge : au moment de la signature de l’engagement et le cas échéant, lors de l’appel de la caution en paiement. Si le cautionnement s’avère disproportionné au jour de sa souscription, il faut examiner, au moment de sa mise en jeu, si la caution peut alors faire face à son engagement, avant de déclarer la nullité de l’engagement (Cass. com., 19 oct. 2010, n° 09-69.203).

Si la caution bien que pouvant justifier d’un patrimoine suffisant, se trouve en situation financière délicate au niveau de sa trésorerie, il lui appartient d’entreprendre les démarches nécessaires pour démontrer un état de surendettement et tenter d’obtenir un aménagement de sa dette. Mais en aucun cas, cette situation ne peut justifier une nullité du cautionnement, au regard de la loi applicable.

 

Patrice Bouteiller, Docteur en droit, Senior of Counsel, Cabinet Ravet et Associés
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