L'Europe se dote de nouvelles règles pour réduire l'utilisation du mercure

29.05.2017

Environnement

Afin de combler le fossé entre la législation existante de l'Union européenne et la convention de Minamata sur le mercure, un nouveau règlement du 17 mai 2017 établit une nouvelle réglementation visant à restreindre progressivement mais fortement l'utilisation du mercure et de ses composés, notamment dans les amalgames dentaires.

Afin de garantir un niveau élevé de la santé humaine et de l’environnement contre les émissions et les expositions au mercure métallique, un nouveau règlement 2017/852 du 17 mai 2017 relatif au mercure fixera à compter du 1er janvier 2018, tout un dispositif de règles visant à limiter au maximum et à interdire progressivement l’utilisation du mercure. De nombreuses interdictions sont ainsi modulées dans le temps en fonction de diverses échéances et du produit concerné.

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Ce règlement permet de transposer la convention de Minamata sur le mercure dans le droit de l’Union européenne en vue de sa pleine mise en œuvre. Il complète ainsi les acquis de l’Union et les met en adéquation avec les dispositions de la convention. Précisons surtout que certains aspects (comme le commerce des produits contenant du mercure ajouté) réglementés par la convention de Minamata relèvent de la compétence exclusive de l'Union ou supposent une modification de l'acquis, et ne peuvent donc être traités qu'à l'échelon de l'Union. De plus, bien que tous les États membres se soient engagés à ratifier la convention de Minamata, ils ne pourront le faire qu'après que cet instrument aura été transposé et ratifié par l'Union.

Précision : pour rappel, la convention de Minamata, signée à Kumamoto (Japon) le 10 octobre 2013, a pour objectif de protéger la santé humaine et l'environnement contre les émissions et rejets anthropiques de mercure et de composés du mercure. Elle vise à réduire et contrôler d'ici à 2020 une variété de produits, procédés et industries qui émettent, rejettent ou utilisent du mercure. A la suite du dépôt du 50ème instrument de ratification le 18 mai 2017, la convention de Minamata sur mercure entrera en vigueur le 16 août 2017. Pour rappel, la ratification par la France de cette convention a été autorisée par une loi du 28 juillet 2016 (L. n° 2016-1032, 28 juill. 2016 : JO, 29 juill.). Elle sera définitivement ratifiée lors de la publication du décret de ratification portant publication de cette convention.

 

Ce règlement remplace et abroge le règlement n° 1102/2008 du 22/10/08 relatif à l'interdiction des exportations de mercure métallique et de certains composés et mélanges de mercure et au stockage en toute sécurité de cette substance qui était jusqu’alors un des deux seuls actes juridiques de l’Union européenne sur le mercure, avec la directive 1999/31/CE concernant la mise en décharge des déchets et comprenant des dispositions sur le stockage temporaire de mercure métallique.

 

Il appartient aux États membres de fixer les sanctions applicables à la violation des dispositions de ce nouveau règlement.

 

Interdictions et restrictions à l’exportation et l’importation de mercure

Sont interdites (art. 3 à 5) :

- les exportations de mercure ;

- les exportations des composés du mercure et des mélanges à base de mercure énumérés à l’annexe I du règlement en fonction des dates fixées (1er janvier 2018 ou 1er janvier 2020), sauf pour ceux destinés à la recherche ou l’analyse en laboratoire ;

- les exportations, à des fins de récupération du mercure, des composés du mercure et des mélanges à base de mercure ;

- les importations de mercure et les mélanges à base de mercure énumérés à l’annexe I du règlement, sauf si l’État membre importateur a donné son consentement en fonction de certaines conditions à remplir par le pays exportateur ;

- les importations de déchets de mercure provenant de l’industrie du chlore, de l’épuration du gaz naturel, des opérations d’extraction et de fusion des métaux non ferreux ou de l’extraction du minerai de cinabre, sauf si elle est autorisée car le pays exportateur n'a accès à aucune capacité de conversion disponible sur son propre territoire ;

Remarque : lorsque l'importation de déchets de mercure est autorisée, le règlement n° 1013/2006 concernant les transferts de déchets reste applicable en plus des exigences du présent règlement.

- les importations, à des fins de récupération du mercure, des mélanges à base de mercure et des composés du mercure non énumérés à l’annexe I du règlement ;

- les importations de mercure aux fins de son utilisation dans l’extraction minière et la transformation artisanale et à petite échelle d’or.

De plus, la fabrication, l’exportation et l’importation de produits contenant du mercure ajouté figurant à l’annexe II du règlement (par exemples les piles ou accumulateurs, les tubes fluorescents, certains cosmétiques…) sont interdites en fonction de dates précisées dans le tableau de ladite annexe. Cette interdiction ne concerne toutefois pas les produits essentiels à des fins militaires et de protection civile ainsi qu’aux produits utilisés pour la recherche, pour l’étalonnage d’instruments ou comme étalon de référence.

 

Interdictions à l’utilisation et au stockage du mercure

L'utilisation de mercure et de composés du mercure dans les procédés de fabrication est :

- interdite pour ceux énumérés à l’annexe III partie I en fonction des dates indiquées dans ladite annexe ;

- autorisée sous conditions pour ceux énumérés dans l’annexe III partie II.

 

Le stockage provisoire de mercure ainsi que des composés du mercure et des mélanges à base de mercure énumérés à l'annexe I du règlement doit être effectué d'une manière écologiquement rationnelle, conformément aux seuils et exigences établis par la directive 2012/18/UE concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances dangereuses et par la directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles.

Autorisation pour fabriquer et mettre sur le marché des nouveaux produits contenant du mercure ajouté fabriqués après 2018
Demande d’autorisation

Pour fabriquer et mettre sur le marché des produits contenant du mercure ajouté qui n’étaient pas fabriqués avant le 1er janvier 2018, ou pour avoir recours à un procédé de fabrication nécessitant du mercure ajouté, les opérateurs économiques concernés doivent y être autorisés.

 

Cela ne s’applique pas :

- aux équipements qui sont nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sécurité des États membres, y compris les armes, les munitions et le matériel de guerre destinés à des fins spécifiquement militaires ;

- aux équipements destinés à être envoyés dans l'espace ;

- aux améliorations techniques apportées aux produits contenant du mercure ajouté qui étaient fabriqués avant le 1er janvier 2018 ou à la modification de tels produits, à condition que ces améliorations ou cette modification donnent lieu à une réduction de la quantité de mercure utilisée dans ces produits.

Obligation de notification

Lorsqu'un opérateur économique qui a l'intention de requérir une autorisation afin de fabriquer ou de mettre sur le marché un nouveau produit contenant du mercure ajouté, ou d'avoir recours à un nouveau procédé de fabrication qui apporterait d'importants avantages sur le plan environnemental ou sanitaire et ne représenterait aucun danger significatif pour l'environnement ou la santé humaine, et pour lequel il n'existe aucune solution de remplacement techniquement réalisable sans mercure offrant les mêmes avantages, doit le notifier aux autorités compétentes de l'État membre concerné. C’est la commission européenne qui délivre l’autorisation.

 

Interdiction de l’utilisation de l’amalgamation au mercure dans l’extraction minière de l’or

L'extraction minière et la transformation artisanales et à petite échelle d'or utilisant l'amalgamation au mercure pour extraire l'or du minerai sont interdites (art. 9).

Précision : cette technique de l’amalgamation au mercure permet après avoir appliqu�� le mercure sur un minerai, d’en capturer l’or et ensuite de distiller l’amalgame obtenu afin de séparer le mercure de l’or.
Restrictions à l’utilisation des amalgames dentaires

Mesures phares de ce nouveau règlement : les interdictions d’utilisation des amalgames dentaires contenant du mercure. Ainsi, il est interdit (art. 10) :

- à compter du 1er juillet 2018 d’utiliser les amalgames dentaires dans les traitements dentaires sur des dents de lait, ni dans les traitements dentaires des mineurs de moins de quinze ans et des femmes enceintes ou allaitantes, à moins que le praticien de l'art dentaire ne le juge strictement nécessaire en raison des besoins médicaux spécifiques du patient ;

- à compter du 1er janvier 2019 pour les praticiens de l’art dentaire d’utiliser le mercure en vrac : les amalgames dentaires ne devront être utilisés que sous une forme encapsulée pré-dosée.

 

De plus, chaque État membre devra présenter un plan national relatif aux mesures qu'il entend appliquer afin d'éliminer progressivement l'usage des amalgames dentaires avant le 1er juillet 2019.

 

Enfin à partir du 1er janvier 2019, les opérateurs des établissements de soins dentaires au sein desquels des amalgames dentaires sont utilisés, ou des amalgames dentaires ou des dents contenant de tels amalgames sont retirés, devront s’assurer que leurs établissements sont équipés de séparateurs d'amalgames pour la rétention et la récupération des particules d'amalgames, y compris celles contenues dans les eaux usées. Les séparateurs d'amalgames mis en service à partir du 1er janvier 2018 devront assurer un taux de rétention d'au moins 95 % des particules d'amalgames et à partir du 1er janvier 2021, tous les séparateurs d'amalgames en usage devront garantir ce taux de rétention.

 

Il est également précisé qu’il est interdit de rejeter des déchets d’amalgames dentaires dans l’environnement.

Fixation de règles de gestion des déchets de mercure
Élimination sans danger des déchets de mercure

Les déchets de mercure doivent être éliminés sans mettre en danger la santé humaine et sans nuire à l’environnement et conformément à la directive 2008/98/CE relative aux déchets (art. 11). Au titre de cette directive, sont considérés comme des déchets, le mercure et ses composés, soit purs soit en mélange, provenant de l’industrie du chlore et de la soude, de l’épuration du gaz naturel, des opérations d’extraction et de fusion des métaux non ferreux ou de l’extraction du minerai de cinabre dans l’Union.

 

L’élimination de ces déchets ne doit pas entraîner de récupération du mercure.

Déclaration annuelle des déchets de mercure

Les opérateurs économiques qui exercent leurs activités dans les secteurs industriels du chlore et de la soude, de l’épuration du gaz naturel ou des opérations d’extraction et de fusion des métaux non ferreux, doivent déclarer et transmettre tous les ans avant le 31 mai une déclaration sur les déchets présents dans leurs installations : quantité, conversion ou solidification des déchets, certificats de stockage des déchets… (art. 12).

 

Cette obligation cesse un an après la date du démantèlement complet des cellules d’électrolyse à mercure et après le transfert de la totalité du mercure dans des sites de traitement des déchets. pour les exploitations de production de chlore et de soude.

Encadrement du stockage des déchets de mercure

En application de la directive n° 1999/31/CE du 26 avril 1999 concernant la mise en décharge des déchets, les déchets liquides ne doivent pas être mis en décharge.

Par dérogation à ce principe, le nouveau règlement relatif au mercure prévoit que les déchets de mercure peuvent être temporairement stockés sous forme liquide à deux conditions :

- que les exigences spécifiques au stockage temporaire des déchets de mercure prévues aux annexes I, II et III de ladite directive soient respectées ;

- que ce stockage se fasse dans des sites de surface destinés au stockage temporaire de déchets de mercure et équipés à cet effet.

 

Si cette dérogation n’est valable que jusqu’au 1er janvier 2023, la Commission européenne est toutefois habilitée à la prolonger de trois ans supplémentaires.

 

De plus, les opérateurs des sites de stockage permanent doivent veiller à ce que les déchets de mercure ayant subi une conversion et, le cas échéant, une solidification soient stockés séparément des autres déchets et placés par lots d'élimination dans une chambre de stockage scellée.

Établissement d’un registre des déchets pour les sites chargés du stockage temporaire des déchets

Les opérateurs des sites chargés du stockage temporaire de déchets de mercure ainsi que les opérateurs des sites chargés de la conversion et, le cas échéant, de la solidification des déchets de mercure, sont tenus d’établir un registre des déchets contenant des informations pour chaque cargaison de déchets de mercure reçue et chaque cargaison quittant le site ainsi que la quantité de déchets stockée sur le site à la fin de chaque mois (art. 14).

Établissement de certificats

De plus des certificats doivent être établis (art. 14) :

- par les opérateurs de sites chargés du stockage temporaire de déchets de mercure établissent, dès que les déchets de mercure quittent le stockage temporaire, afin de confirmer que les déchets de mercure ont bien été envoyés sur un site pratiquant les opérations d'élimination ;

- par les opérateurs des sites chargés de la conversion et, le cas échéant, de la solidification de déchets de mercure, dès que l'opération de conversion et, le cas échéant, de solidification de la totalité de la cargaison est achevée, afin de confirmer que la totalité de la cargaison de déchets de mercure a été convertie et, le cas échéant, solidifiée ;

- par les opérateurs de sites chargés du stockage permanent de déchets de mercure ayant subi une conversion et, le cas échéant, une solidification délivrent, dès que l'opération d'élimination de la totalité de la cargaison est achevée, afin de confirmer que la totalité de la cargaison de déchets de mercure ayant subi une conversion et, le cas échéant, une solidification a été placée en stockage permanent.

 

Inventaire des sites contaminés par le mercure et ses composés

Un inventaire des sites contaminés par du mercure et des composés du mercure devra être mis à la disposition du public par la Commission européenne avant le 1er janvier 2021.

 

Anne-Laure Tulpain, Code permanent Environnement et nuisances

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