La conférence de financement, un ovni dans le paysage social

La conférence de financement, un ovni dans le paysage social

28.01.2020

Gestion du personnel

La conférence sur l'équilibre et le financement des retraites démarre ce jeudi au Conseil économique, social et environnemental. Au menu : l'équilibre financier du régime de retraite à court et moyen terme. Cette conférence est inédite à plusieurs points de vue : ses participants, son déroulement, ses modalités. Un caractère inconnu qui n'est pas sans soulever des questions sur les conclusions auxquelles elle aboutira.

C'est la voie de passage - étroite - qui a été trouvée pour espérer aboutir sur un consensus sur le financement des retraites à court terme. Mettre sur pieds une conférence tripartite sur l'équilibre et le financement des retraites afin de réfléchir à des alternatives à l'âge pivot initialement prévu dans l'avant-projet de loi. Cet âge pivot fixé à 64 ans se serait appliqué à tous les assurés partant à la retraite, à compter de 2022, même ceux nés avant 1975 qui ne seront pourtant pas concernés par le futur système universel de retraite. 

Une conférence de financement assez cadrée dans le courrier que le Premier ministre a adressé aux partenaires sociaux le 11 janvier dernier, écartant d'emblée certaines pistes, notamment une augmentation du coût du travail.

Cette conférence est inédite au sein du dialogue social : de par sa forme, de par ses conclusions, de par son déroulement et de par ses participants. 

Ni une négociation, ni une concertation

La conférence de financement ne peut se rattacher à aucune modalité de discussion que l'on connait déjà. Il ne s'agit pas d'une négociation interprofessionnelle : aucun document d'orientation n'est transmis préalablement aux partenaires sociaux ; les intervenants dépassent les seules organisations syndicales et patronales représentatives dans le secteur privé ; il n'y aura pas d'accord national interprofessionnel en bout de course.

Il ne s'agit pas non plus de concertations puisque les discussions ne se résument pas à des bilatérales ou des multilatérales à Matignon ou au ministère du travail.

Se rapproche-t-on alors des anciennes conférences sociales du quinquennat Hollande ou - pour remonter plus loin dans le temps, à un Grenelle ? Tel n'est pas l'avis du secrétaire général de l'Unsa, Laurent Escure qui se félicite que "l'élargissement de la représentativité [lire ci-dessous] permette de sortir des sentiers battus de la négociation balisée côté public, et de la négociation interprofessionnelle côté privé. On fabrique quelque chose de nouveau".

Même le Conseil d'Etat y a perdu son latin, qui l'analyse dans son avis rendu vendredi, "par sa composition et par le rôle qui lui est assigné – fournir un avis au Premier ministre –, [à] une commission administrative à caractère consultatif". 

Une représentativité étendue 

Qui dit discussions entre les partenaires sociaux, dit organisations représentatives. Prise en compte de la représentativité qui diffère dans le public et dans le privé. La conférence de financement réunira elle, outre les représentants des organisations patronales, les organisations syndicales qui ont obtenu "une audience combinée supérieure à 5 %". Un mode de calcul qui permet à l'Unsa de rejoindre la table des discussions avec la CFDT, la CFT, FO, la CFTC et la CFE-CGC. Un décalque de ce qui est prévu pour la gouvernance de la future Caisse nationale de retraite universelle.

Les partenaires seront accompagnés de représentants de l'Etat, tout cela sous la houlette de Jean-Jacques Marette, ancien président de l'Agirc-Arrco qui en sera en quelque sorte le "facilitateur", comme il en existait pour chacune des tables rondes des conférences sociales.

Des discussions parallèles au CESE et au Parlement

Inédit là encore, la concordance des temps entre la conférence de financement et l'examen du projet de loi au Parlement. Dans le cadre d'une négociation interprofessionnelle par exemple, les parlementaires discutent d'un projet de loi qui reprend tout ou partie un accord national interprofessionnel (la loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013 en est un exemple). Il y a le temps de la démocratie sociale, puis celui de la démocratie politique.

Avec la conférence de financement les deux s'enchevêtrent puisque la conférence de financement débute ces travaux ce jeudi tandis que la commission spéciale de l'Assemblée nationale démarre l'examen du projet de loi le 3 février.

Cela n'est pas sans risque. La conférence de financement doit remettre ses conclusions d’ici la fin du mois d’avril 2020 concernant les mesures à prendre pour atteindre l’équilibre financier de l’assurance vieillesse en 2027. L'objectif du gouvernement est de pouvoir intégrer ces éléments lors de la lecture au Sénat. Reste à savoir si chacun tiendra ses délais.

Par ailleurs, il s'agit d'une procédure accélérée, soit une seule lecture dans chaque chambre et une nouvelle lecture après la commission mixte parlementaire, le cas échéant. Le Conseil constitutionnel appréciera-t-il que la première lecture à l'Assemblée nationale soit parcellaire ? Un autre écueil pour le gouvernement. 

Le sort incertain des conclusions

Enfin la question de la concrétisation des solutions issues de la conférence de financement reste assez obscure. Le Premier ministre a déjà rappelé qu'en cas d'échec des participants à trouver un consensus, il reprendrait la main et ne s'interdit pas de réintroduire dans le texte l'âge pivot retiré provisoirement. 

Si la conférence aboutit à des alternatives, quel sort leur sera réservé ? Le projet de loi se contente de préciser que le gouvernement pourra prendre "toute mesure permettant d’assurer cet équilibre (...) au regard des propositions de cette conférence qui pourront être ainsi transcrites dans la loi". Aucune obligation formelle pour le gouvernement qui pourra en reprendre tout ou partie ou - pourquoi pas - aucune. 

Laurent Escure se veut toutefois rassurant. Selon lui, le Premier ministre s'est clairement engagé dans le courrier adressé aux partenaires sociaux. "Nous avons crée en bilatéral les conditions pour que la confiance ait lieu et qu'on aille vers l'idée d'une obligation de résultat et d'un compromis. La lettre dit que le gouvernement a toute confiance sur la capacité des partenaires sociaux à trouver un compromis".

Que peut-on attendre de la réunion du 30 janvier ? 

La séance de jeudi, qui débutera à 15 heures au Conseil économique, social et environnemental, ne devrait être qu'une séance introductive d'installation de la conférence de financement, avec une intervention d'Edouard Philippe. 

Les partenaires sociaux souhaitent que la conférence débute par une remise à plat de l'étude d'impact. "Sur le fond, il y a beaucoup de lacunes sur le financement, a déclaré hier matin le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, au micro d'Europe 1. (...) Il faut qu'on ait tous les sujets de financement sur la table, toutes les hypothèses qui ont été prises pour pouvoir se prononcer et prendre les bonnes ressources". 

Même exigence du côté de Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, interviewé hier matin par France inter, qui souhaite d'abord discuter de l'étude d'impact "et de son biais". La conférence de financement "doit commencer par une étude avec des experts indépendants, très claire, des projection financières et ce qui est mis aujourd'hui dans l'étude d'impact", a-t-il insisté. 

Deux points distincts devraient être abordés, souligne pour sa part Laurent Escure. "Se mettre d'accord sur les besoin de financement et l'équilibre jusqu'en 2027. Et évaluer le futur dispositif à 2037". 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Florence Mehrez
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