La "fast fashion" : une mode destructrice pour l'environnement...
15.06.2022
Environnement

Terrible constat : les vêtements usagés des marques de "fast fashion", exportés vers d'autres pays pour être soi-disant réutilisés, sont d'une qualité si médiocre qu'ils finissent directement dans des décharges à ciel ouvert saturées et polluantes dans les pays du Sud.
Savez-vous ce que deviennent nos vêtements usagés donnés au recyclage ? L’association Greenpeace explique que lorsqu’on donne nos vêtements usagés à une organisation caritative, qu’on les dépose dans la boîte à recyclage d’un magasin de marque ou dans un conteneur, on peut supposer qu’ils seront vendus pour une bonne cause dans une friperie caritative ou qu’ils seront recyclés en nouveaux vêtements. En réalité, seule une petite quantité est effectivement revendue dans le pays où les vêtements ont été collectés. Certains sont recyclés en produits de moindre qualité, comme des chiffons, et plus de la moitié sont exportés pour être « réutilisés », principalement en Afrique de l’Est et de l’Ouest et en Europe de l’Est. Pour la majorité ils atterrissent dans un dépotoir à ciel ouvert !
Environnement
La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)
Viola Wohlgemuth, chargée de campagne sur l’économie circulaire et les substances toxiques chez Greenpeace Allemagne, a mené l’enquête au Kenya et en Tanzanie pour se rendre compte du problème des déchets textiles importés dans ces pays, notamment ceux issus de la fast fashion.
Pour mémoire, la fast fashion, ou mode rapide, désigne une mouvance de marques qui produisent des vêtements à bas prix selon un rythme de production très soutenu, avec des matières premières de faible qualité, et sans considérations éthiques. Très vorace en énergie, en ressources humaines, et en matières premières, cette industrie est décriée pour ses nombreuses conséquences sociales et environnementales.
Un constat édifiant qui doit nous interpeller sur nos modes de consommation.
Les vêtements usagés et de seconde main exportés en Afrique sont connus localement sous le nom de "Mitumba", qui signifie "balle" ou "paquet", car ils sont généralement vendus aux détaillants sous forme de balles. Cela concerne également les vêtements d’occasion collectés et emballés par des entreprises de recyclage de textiles dans les pays occidentaux. Le Kenya est le plus grand importateur de vêtements de seconde main au monde. S’il ne fait aucun doute qu'il existe une demande en Afrique pour des vêtements abordables et à la mode, l’évaluation de la qualité des Mitumba est devenue problématique. En effet les vêtements sont de si mauvaise qualité qu’ils sont immédiatement jetés.
Le discours commun qui est que le don de vêtements est un moyen circulaire de traiter les déchets vestimentaires ne tient donc pas. Le simple fait de déplacer des vêtements d’une décharge dans un pays à une décharge dans un autre pays ne le rend pas circulaire.
Car en réalité si on fait référence à des vêtements d’occasion, il va s’agir de déchets textiles qui seront exportés vers d’autres pays puis mis à la décharge ou brulés à ciel ouvert. Peu portés dans le pays d’expédition, ils vont voyager avec le bilan carbone que cela occasionne, mais une fois arrivés dans les pays de destination et après un tri, la majorité sera directement jetée en raison de leur qualité médiocre empêchant leur réutilisation. Et en raison de la surproduction croissante des marques de fast fashion, des quantités massives de textiles et de chaussures finissent comme tel. La tendance à la mode rapide a ainsi transformé les vêtements en articles jetables à très courte vie et donc à des tonnes de déchets textiles.
Les énormes quantités de déchets textiles dont sont inondés quotidiennement des pays comme la Tanzanie et le Kenya ont de graves conséquences sur la santé des populations et l'environnement. On peut notamment citer :
- la pollution et les impacts sanitaires dus aux fibres microplastiques, car la majorité des fibres utilisées dans les vêtements étant synthétiques (principalement du polyester), elles sont donc des plastiques non biodégradables à base de pétrole. Après leur élimination, ces fibres microplastiques continuent de s'infiltrer dans l'environnement et finissent par se retrouver dans la chaîne alimentaire humaine. Lorsque les vêtements sont brûlés à l’air libre, elles sont libérées dans l'air. Des études récentes ont révélé la présence de microplastiques dans le tractus gastro-intestinal, le sang et les poumons des humains ;
- l’aggravation de la crise des déchets dans les pays destinataires : les déchets de vêtements en plastique ou non continuent de s’accumuler dans les décharges déjà pleines depuis des années et viendront s'ajouter à la crise des déchets que ces pays ne savent pas comment gérer. Cela s’explique notamment par l’absence d’infrastructure pour éliminer ces quantités massives de déchets textiles ;
- la pollution due à la combustion à ciel ouvert des déchets : une grande partie des déchets est brûlée à ciel ouvert, rejetant des fumées contenant des substances dangereuses issues de la production des vêtements ;
- la pollution des eaux des fleuves et rivières par les déchets et les substances toxiques qu’ils peuvent contenir ;
- la pollution de l’air : les vêtements en décomposition dégagent du méthane, un gaz à effet de serre nocif qui contribue au changement climatique.
Sur ce point, rappelons que la Commission européenne a fait une proposition de règlement relatif aux transferts de déchets afin d’interdire les exportations de déchets vers des pays non membres de l'OCDE sauf si les pays tiers souhaitent recevoir certains déchets et sont en mesure de les gérer de manière durable. Pour plus d’informations sur cette proposition de règlement, voir notre actualité du 19 novembre 2021 « La Commission européenne va durcir la réglementation sur les transferts transfrontaliers de déchets ».
Emissions de CO2, forte consommation et pollutions des eaux, microplastiques, produits chimiques, déchets, etc. On le sait déjà mais Greenpeace le rappelle à bon escient : la mode est l'une des industries les plus polluantes au monde et est responsable de près de 10 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Toujours plus de vêtements et de moins en moins chers, et toujours plus de pollution sans parler de la violation des droits de l’homme. En raison de ces impacts négatifs massifs sur l'environnement, l’économie circulaire est devenue le mot à la mode pour les marques qui tentent de redorer leur image. Et pour les marques de fast fashion, elle serait « un mythe » !
Ces dernières années, la "circularité" a été présentée comme la dernière solution technique aux problèmes environnementaux de notre société de gaspillage, notamment par l'industrie de la mode et les décideurs politiques. Cependant, selon Greenpeace, elle est pratiquement inexistante dans l'industrie de la mode : moins de 1 % des vêtements sont recyclés en nouveaux vêtements. La grande majorité des vêtements bon marché finissent leur courte vie dans d'immenses décharges, brûlés sur des feux ouverts, le long des cours d'eau et rejetés dans la mer avec de graves conséquences pour les personnes et la planète. En parallèle, les volumes de production de vêtements augmentent de 2,7 % par an. Cette mode rapide et polluante s'accélère donc au lieu de ralentir…
Le dernier rapport de Greenpeace Allemagne intitulé "Autorégulation : un conte de fées de la mode" (Self regulation : a fashion farytale) a clairement démontré que si les marques de mode mondiales ont tendance à parler de circularité, très peu d'entre elles ont réellement mis en place des mesures efficaces pour devenir circulaires et encore moins, voire aucune, ne prend de mesures pour ralentir le flux de matériaux. Pire, elles détournent la circularité pour faire du blanchiment écologique !
Au niveau européen, la nouvelle stratégie de l’Union européenne pour des textiles durables et circulaires a été présentée le 30 mars 2022. Elle précise que ces incidences négatives trouvent leur origine dans le modèle linéaire sur lequel repose le secteur textile, qui se caractérise par de faibles taux d’utilisation, de réemploi, de réparation et de recyclage des fibres en boucle fermée, et qui, le plus souvent, ne fait pas de la qualité, de la durabilité et de la recyclabilité des priorités pour la conception et la fabrication des vêtements. Le recyclage des textiles est encore un grand défi technique et relève plus du rêve que de la réalité à l'heure actuelle, et aussi par le fait que la plupart des vêtements sont fabriqués à partir de tissus mélangés et sont donc difficiles ou impossibles à recycler.
Dans ses actions clés pour des textiles durables et circulaires, elle mise sur des exigences plus contraignantes en matière de durabilité, de recyclabilité, de réparation et de réutilisation et une responsabilité accrue des producteurs (REP). À l’horizon 2030, l’objectif est que les produits textiles mis sur le marché de l’Union soient à longue durée de vie et recyclables, dans une large mesure fabriqués à partir de fibres recyclées, exempts de substances dangereuses, et produits dans le respect des droits sociaux et de l’environnement.
Pour mettre un terme au flux de déchets textiles déversés dans les pays du Sud, il n’y a pas d’autre solution que de ralentir significativement la fast fashion. Les marques de mode mondiale doivent intensifier leurs efforts pour revoir complètement leurs modèles commerciaux linéaires et commencer à produire moins de vêtements, de meilleure qualité, plus durables, réparables et réutilisables afin de réduire les impacts catastrophiques de leurs produits en fin de vie.
Si la stratégie de l'Union européenne pour une industrie textile durable et circulaire est un bon début pour Greenpeace, il est pourtant nécessaire qu’une réglementation de l’industrie de la mode doit être établie au niveau international par le biais d’un traité mondial.
Face aux abus de la fast fashion, il est possible de se tourner vers des articles de mode plus éthiques et responsables, acheter moins et mieux, et de se tourner également vers les vêtements d’occasion. De nombreuses marques proposent aujourd’hui de nous habiller de manière plus responsable, sans entrer dans le jeu vicieux de la mode rapide !
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