La fin de la mention manuscrite de la caution dans le cadre d'un bail d'habitation ou mixte

08.01.2019

Gestion d'entreprise

Les informations qui étaient jusqu'alors requises de la main de la caution, doivent figurer dans l'acte de cautionnement, que le garant se contente de signer.

Le bail d’habitation, chacun le sait, est l’un des contrats dans le cadre duquel le recours à un engagement de caution est le plus fréquent. Jusqu’il y à peu, la souscription de cet engagement était soumise à un formalisme strict, l’article 22-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 imposant à la caution pas moins d’une triple mention manuscrite : la reproduction du montant du loyer et des conditions de sa révision tels que figurant au contrat de location, celle de l’alinéa du même article 22-1 régissant la durée du cautionnement et la faculté de résiliation des cautionnements à durée indéterminée, ainsi qu’une mention exprimant de façon explicite et non équivoque la connaissance que le garant a de la nature et de l'étendue de l'obligation qu'il contracte.

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Au final, cette mention manuscrite à trois branches, jugée particulièrement longue et complexe par beaucoup, jusqu’à être dissuasive n’emportait pas une forte adhésion. Cependant, la Cour de cassation l’a jugée proportionnée à la finalité de la loi, qui tend à protéger la caution (Cass. 3e civ., 3 déc. 2015, n° 15-18.194, P+B), alors même que le manquement aux exigences de la loi était sanctionné par la nullité de l’engagement de caution, sans qu’il soit d’ailleurs nécessaire de démontrer un grief (Cass. 3e civ., 8 mars 2006, n° 05-11.042, P+B).

Déjà la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 en avait limité le domaine d’application aux cautions personnes physiques là où le texte initial soumettait toutes les cautions au formalisme évoqué. Avant elle, la jurisprudence (Cass. 3e civ., 9 juill. 2008, n° 07-10.926, P+B), puis la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 décidaient de dispenser des exigences de la mention manuscrite les cautionnements consentis en la forme authentique ( CCH., art. L. 442-3-5). L’actuel article 1369 alinéa 3 du code civil (C. civ., anc. art. 1317-1) indique en effet que, lorsqu’il est reçu par notaire, l’acte authentique est dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.

Suppression des exigences de mention manuscrite

C’est cependant à un allègement beaucoup plus radical que se livre la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique dite loi ELAN. L’article 134 de ce texte supprime purement et simplement les exigences de mention manuscrite évoquées.

Désormais, pour les contrats conclus depuis le 25 novembre 2018, les informations qui étaient jusqu’alors requises de la main de la caution, doivent figurer dans l’acte de cautionnement, que le garant se contente de signer. La première phrase du dernier alinéa de l’article 22-1 de la loi de 1989 prévoit en effet que « la personne physique qui se porte caution signe l'acte de cautionnement faisant apparaître le montant du loyer et les conditions de sa révision tels qu'ils figurent au contrat de location, la mention exprimant de façon explicite et non équivoque la connaissance qu'elle a de la nature et de l'étendue de l'obligation qu'elle contracte ainsi que la reproduction de l'avant-dernier alinéa du présent article ».

Ces nouvelles exigences sont requises, comme les anciennes, à peine de nullité du cautionnement, étant encore précisé que le bailleur reste, comme autrefois, tenu de remettre à la caution un exemplaire du contrat de location.

Souci de simplification du législateur

L’objectif du législateur ressort assez clairement des travaux parlementaires, et spécialement de l’exposé des motifs de la loi, qui évoque le souci de simplification du formalisme de l’acte de cautionnement tel que prévu par l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, « en supprimant la lourdeur de l’obligation actuelle du caractère manuscrit de la mention d’engagement par la caution », outre que la nécessité de permettre « la dématérialisation complète de la procédure de mise en location de logements», la rendant ainsi « plus simple et plus rapide, favorisant l’accès au logement ».

L’étude d’impact au projet de loi ELAN en date du 3 avril 2018 souligne que la suppression de l’exigence de mention manuscrite à l’égard des cautions personnes morales par la loi du 17 janvier 2017 a permis « à l’association pour l’accès aux garanties locatives (APAGL), en charge de la sécurisation des loyers du parc locatif privé, qui prend la forme d’une caution dénommée Visale, de gérer l’activité de caution de manière dématérialisée par l’intermédiaire d’une plateforme électronique », ce qui a dû bénéficier à près de 150.000 cautions. Pour le législateur, la généralisation de la dispense de mention manuscrite permet donc de parachever la dématérialisation entière du processus à l’égard des personnes physiques.

Difficultés d’articulation avec d’autres textes

Une question peut cependant se poser quant à la dispense totale de mention manuscrite dans certains cas présents ou à venir (v. A. Gouêzel, Mention manuscrite au cautionnement d’un bail d’habitation : entre étonnement et interrogations, D. 2018, p. 2380).

Pour le présent, on peut penser aux situations qui, tout en relevant du domaine d’application de l’article 22-1 de la loi de 1989 dans sa nouvelle rédaction, pourraient encore relever de l’article L. 331-1 du code de la consommation (C. consom., anc. art. L. 341-2), lequel impose une mention manuscrite précise aux cautions personnes physiques s’engageant à l’égard de créanciers professionnels. Si le bailleur bénéficiant du cautionnement garantissant l’exécution d’un contrat de location est un professionnel, ces exigences ne sont-elles pas applicables ? Même si la nouvelle rédaction des textes pourrait relancer le débat, on se souviendra d’une réponse donnée à cette question sous l’empire de l’ancienne rédaction de l’article 22-1 de la loi de 1989 par le secrétaire d’Etat au logement, qui indiquait que « sous réserve de l’appréciation des tribunaux de l’ordre judiciaire, ce dispositif qui concerne toutes les personnes physiques s’engageant en qualité de caution à l’occasion d’un crédit ne s’applique pas au cautionnement des baux d’habitation régis par la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, laquelle fixe, en son article 22-1 des règles spécifiques en la matière » (Rép. min. n° 12024, M. Schosteck, JO Sénat 13 mai 2004, p. 1018 et 30 sept. 2004, p. 2236 ).

Pour l’avenir, on peut s’interroger sur l’articulation qu’il conviendrait de faire entre la nouvelle rédaction de l’article 22-1 de la loi de 1989 et l’éventuelle nouvelle rédaction de l’article 2298 du code civil telle que ressortant de la proposition d’avant-projet de réforme du droit des sûretés de l’association Henri Capitant (www.henricapitant.org). Cet avant-projet suggère, en effet, l’introduction dans l ’article 2298 d’une mention manuscrite, obligatoire pour toute caution personne physique, par laquelle le garant devrait indiquer qu’il s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires, exprimé en toutes lettres et en chiffres.

Cette exigence, qui devrait, le cas échéant, se doubler de celle d’une mention manuscrite propre à l’engagement solidaire, devrait être sanctionnée par la nullité. Elle devrait s’accompagner de l’abrogation corrélative des dispositions du code de la consommation déjà évoquées, avec lesquelles elle ferait double emploi. Si elle venait à être adoptée, le caractère très général de cette disposition, comme son entrée en vigueur postérieure à la loi du ELAN du 23 novembre 2018, poseraient nécessairement la question de sa prévalence sur la dispense de mention manuscrite désormais prévue à l’article 22-1 de la loi de 1989.

On notera pour finir le retrait d’un amendement présenté devant le Sénat, qui ne manquait pourtant pas de pertinence (Sénat, séance du 23 juillet 2018, amendement n° 672 rectifié bis). Cet amendement proposait de revenir sur une différence de traitement entre les salariés et les étudiants ou apprentis en matière d’accès à la location. On rappellera en effet que la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 interdit au bailleur de cumuler un cautionnement et un contrat d’assurance, sauf, a précisé la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009, en cas de logement loué à un étudiant ou un apprenti. Or, si cette disposition se justifiait en 2009 par l’impossibilité pour ces derniers d’être couverts par un contrat d’assurance en l’absence de justification de ressources, il n’en est plus ainsi depuis 2018, le dispositif VISALE ayant été ouvert à l’ensemble des étudiants et alternants, sans condition de ressources. L’amendement proposait donc de supprimer ce régime spécifique. Il a cependant été retiré par ses auteurs, qui se sont rangés à l’argument selon lequel le maintien de cette exception les incitant à consentir des baux au public visé, permet de rassurer les propriétaires (Sénat, séance du 23 juillet 2018, compte rendu intégral des débats,).

Florence Reille, auteur
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