La lutte contre l'artificialisation des sols pierre angulaire du projet de loi Climat et résilience

14.02.2021

Immobilier

Les documents d'urbanisme et les zones commerciales sont mis à contribution pour parvenir à l'objectif de diviser par deux le rythme de l'artificialisation en 10 ans.

La lutte contre l'artificialisation des sols se met en ordre de bataille avec le projet de loi "portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets". Élaboré en réponse aux propositions de la Convention citoyenne pour le climat, le texte a été présenté en Conseil des ministres le 10 février. Il sera discuté au Parlement dès le mois de mars, selon la procédure accélérée (une seule lecture par chambre).

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La gestion immobilière regroupe un ensemble de concepts juridiques et financiers appliqués aux immeubles (au sens juridique du terme). La gestion immobilière se rapproche de la gestion d’entreprise dans la mesure où les investissements réalisés vont générer des revenus, différents lois et règlements issus de domaines variés du droit venant s’appliquer selon les opérations envisagées.

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Inscription de la lutte contre l'artificialisation dans les documents d'urbanisme

Afin de tendre vers le "zéro artificialisation nette" (ZAN), le projet de loi fixe l'objectif de diviser par deux le rythme de l’artificialisation des sols dans les 10 années suivant la promulgation de la loi (article 47). Il s'agit de mettre fin aux 20 000 à 30 000 hectares d’espaces naturels, agricoles ou forestiers qui disparaissent chaque année en France, dont la moitié du fait de l’étalement des logements.

La définition de l'artificialisation

Le texte donne une définition de la notion d’artificialisation, en référence à l’atteinte à la fonctionnalité des sols (occupation ou usage qui en est fait affectant durablement tout ou partie de ses fonctions). Cette définition nécessitera toutefois d'être précisée par décret (article 48).

L'objectif ZAN inscrit dans le code et les documents d'urbanisme

Surtout, le projet de loi inscrit l'objectif de limitation de l’artificialisation, et à terme de ZAN :

- d'une part, dans les objectifs généraux  prévus à l’article L. 101‑2 du code de l’urbanisme (article 48) ;

- d'autre part, dans les documents de planification que sont les SRADDET, PADDUC, SAR, SDRIF, SCOT, PLU et cartes communales, en fixant notamment une limite temporelle.

Cette mesure impliquera de modifier (le cas échéant) ces documents en cascade, dans un délai de 6 mois à compter de l'entrée en vigueur de la loi s'agissant du SRADDET, du PADDUC, du SAR et du SDRIF. Puis, compte tenu des liens de compatibilté entre les documents, ce sera au tour du SCOT d'être modifié dans les 3 mois suivant l'entrée en vigueur de la norme supérieure modifiée, et au plus tard le 1er juillet 2024, faute de quoi les ouvertures à l’urbanisation seront bloquées. De même, la modification du PLU ou la révision de la carte communale devra être engagée dans le délai de 3 mois suivant l'entrée en vigueur du SCOT (ou de la norme supérieure modifiée en l'absence de SCOT). A défaut de mise en compatibilité de ces documents avant le 1er juillet 2025, aucune autorisation d’urbanisme ne pourra être délivrée dans une zone à urbaniser du PLU ou une zone constructible de la carte communale (article 49). Que de procédures en perspective !

Par ailleurs, les collectivités ne pourront prévoir dans leur PLU ou carte communale l’ouverture à l’urbanisation de sols naturels, agricoles ou forestiers qu'en justifiant l'absence de parcelle disponible dans les espaces urbanisés.

Un rapport annuel

Tous les ans, le maire ou le président de l’EPCI compétent en matière de PLU ou carte communale devra présenter au conseil municipal ou communautaire un rapport sur l’artificialisation des sols sur son territoire au cours de l’année civile. Ce rapport donnera lieu à un débat de l'assemblée délibérante (article 50).

Un frein à l'étalement urbain notamment des zones commerciales

D'autres mesures du projet de loi visent à réduire la consommation d’espace et encourager des projets d’aménagement plus vertueux.

L’article 52 pose un principe général d’interdiction des implantations ou extensions de surfaces commerciales qui entraîneraient une artificialisation des sols. Une dérogation pourra néanmoins être accordée par la commission départementale d’aménagement commercial (CDAC), à titre exceptionnel et sous certaines conditions, pour autoriser des projets inférieurs à 10 000 m2.

L'article 51 introduit l'obligation de déterminer une densité minimale de constructions pour les grands projets d’aménagement mis en œuvre dans le cadre de grandes opérations d’urbanisme (GOU), une mesure qui devrait contribuer à limiter l’étalement urbain.

Par ailleurs, l’autorité compétente en matière de création de zones d’activité économique (industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire) sera chargée d’établir un inventaire de ces ZAE mentionnant, pour chacune d'elle, le taux de vacance. Cet inventaire sera transmis aux autorités compétentes en matière de SCOT, de PLU ou encore de PLH et actualisé tous les 6 ans (article 53).

Le préfet ainsi que le maire ou le président de l'EPCI compétent (après avis de leur organe délibérant) pourront imposer, sous peine d'expropriation, des travaux d’office pour la réhabilitation des locaux vacants dans les ZAE situées dans le périmètre d’un projet partenarial d’aménagement (PPA) ou d’une opération de revitalisation du territoire (ORT).

Des ordonnances programmées

L'article 55 du projet de loi autorise le gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance afin de :

- renforcer et rationaliser les conditions d’ouverture à l’urbanisation dans les règles d’urbanisme ainsi que dans les documents d’urbanisme pour atteindre les objectifs de consommation économe de l’espace, de lutte contre l’étalement urbain et l’artificialisation des sols ;

- étendre les possibilités de dérogation au PLU pour les projets sobres en foncier ;

- introduire des objectifs de sobriété foncière dans les documents de planification relatifs à l’habitat et à la mobilité ;

- rationaliser les procédures d’autorisation prévues dans le code de l’urbanisme et le code de l’environnement pour accélérer les projets sur des terrains déjà artificialisés, dans les périmètres d’opérations de revitalisation des territoires, de GOU ou d’OIN.

Par ailleurs, l'article 58 comporte des dispositions permettant au gouvernement de prendre des mesures par ordonnance afin d’adapter les territoires littoraux au recul du trait de côte, amplifié par les effets du dérèglement climatique. Il s’agit notamment d'identifier les collectivités et les zones concernées, d'informer acquéreurs et locataires de ce risque ou encore de planifier durablement l’adaptation des territoires, en prenant en compte le recul du trait de côte et les besoins de relocalisation dans les documents d’urbanisme, notamment par un zonage spécifique.

 

 

 

 

Laurence Guittard, Dictionnaire permanent Construction et urbanisme
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