Jean-Baptiste Barféty, auteur du Manifeste "Du sens à l’ouvrage", décrypte les nouveaux ressorts qui déterminent l’engagement des salariés. Avec à la clef, un leitmotiv : expérimenter les propositions du rapport au plus près du "terrain" au sein des 10 entreprises partenaires. L’idée étant de parvenir, d’ici à un an, à un annuaire de bonnes pratiques.
Vous avez rédigé, en juin dernier, un Manifeste "Du sens à l’ouvrage : comprendre les nouvelles aspirations dans le travail" comportant 10 engagements pour redonner de la motivation au travail, à destination des DRH. Quel accueil a-t-il reçu ?

Excellent. Nous avons eu 2 000 téléchargements. Preuve s’il en faut que la question du sens au travail n’est pas une lubie passagère post-Covid, un joujou pour trentenaires gâtés. Voire une exigence disproportionnée des salariés à l’heure où les offres d’emploi se multiplient. Il y a vraiment un changement de mentalités qui s’est opéré depuis quelques années. Les enquêtes le confirment, le travail ne tient plus ses promesses.
En 1990, 60 % des Français considéraient spontanément le travail comme très important, selon une étude de la fondation Jean Jaurès publiée l’an passé. Ils n’étaient plus que 21 % à le penser en 2022.
Ce sujet est devenu un thème central du débat public. Et on ne peut que s’en féliciter car le rapport au travail est en train de changer à vitesse grand V.
Certes, quelques entreprises ont tenté de prendre le sujet à bras-le-corps, en lançant des initiatives pour favoriser le bien-être au travail. Mais elles ne sont souvent que des palliatifs : il ne suffit pas d’avoir un baby-foot ou une salle de sieste pour s’épanouir à travers le travail. A fortiori lorsque ces situations sont en totale incohérence avec la charge de travail, l’ambiance, la culture de l’entreprise. Il faut donc aller plus loin pour faire en sorte que les aspirations des salariés rejoignent les engagements macro de l’entreprise. C’est cet alignement que nous devons trouver. Ce qui implique d’aborder les questions sur le contenu du travail, sa finalité, mais aussi les modes de management afin que le salarié soit responsabilisé et reconnu.
Que proposez-vous ?

La question du travail pose la question très largement sous-estimée de la réalisation de soi à travers le travail. Elle s’inscrit dans la continuité des travaux menés avec Nicole Notat et Jean-Dominique Sénard, il y a cinq ans, à l’occasion du rapport sur la raison d’être, les entreprises à mission et l’obligation inscrite dans le Code civil pour les entreprises de prendre en considération leurs enjeux sociaux et environnementaux. Ce rapport, très juridique, a eu un excellent écho auprès des dirigeants. Mais les salariés sont restés sur leur faim : ils ne voyaient pas venir les changements concrets dans leur quotidien au travail.
Nous nous sommes alors rendu compte que nous n’avions fait qu’une partie de chemin : il fallait désormais décliner la démarche au niveau des salariés, comprendre leur ressenti, faire remonter leurs propositions pour saisir leurs aspirations. Il faut donc revenir à une logique plus "terrain" : à quoi sert mon travail ? Quelle est ma contribution ?
Quelle suite donnez-vous à ce Manifeste ?

Une dizaine d’entreprises totalisant un million de salariés (RATP, Veolia, SNCF, Orange, Crédit Mutuel, Maif, Renault, ADP, Dassault Systèmes...) nous ont aidées à construire ce Manifeste. Le mouvement s’élargit avec de nombreuses entreprises qui sont en train de nous rejoindre.
Nous allons maintenant adapter ces propositions aux métiers et cultures des entreprises partenaires. Concrètement, nous rencontrons des salariés en focus groups (sans hiérarchie et sans RH) pour connaître les points forts ou faibles de tel ou tel engagement.
L’objectif est d’adapter les engagements du manifeste, par exemple, les échanges entre les différents métiers, pour "rendre visible l’utilité des missions de chacun", la création de filières d’experts aux côtés des filières managériales, le droit à l’erreur, le soutien aux initiatives lancés par les salariés…
En parallèle tout au long de l’année, nous organiserons des points d’étape avec les professionnels RH, les référents de cette expérimentation (des membres de l’équipe RH). L’idée étant de parvenir, d’ici à un an, à un annuaire de bonnes pratiques, adaptées à la totalité des cultures d’entreprise et des différents métiers, à l’intention des DRH. Il sera à disposition des entreprises qui souhaitent adhérer à l’association Projet sens.
Nous prévoyons également des tables-rondes avec les centrales syndicales pour discuter de ce projet.
Il y a urgence que les entreprises s’emparent de ces questions pour ressouder le collectif de travail. Il s’agit d’une démarche gagnante-gagnante.
Son parcours |
---|
Fondateur de l’association Projet Sens, Jean-Baptiste Barféty, diplômé de l’Essec, de Sciences Po et de l’ENA, est membre de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et enseignant à Sciences Po Paris. Il a été le secrétaire général du Conseil de l’inclusion dans l’emploi auprès de la ministre du travail Muriel Pénicaud. Jean-Baptiste Barféty est le rédacteur de plusieurs rapports, comme le rapport Notat-Sénard, qui a inspiré la création de la raison d’être et du statut d’entreprise à mission, le rapport Borello ayant abouti à la dernière réforme des contrats aidés et le rapport Frouin sur l’ubérisation, ayant donné lieu à la création d'une autorité de régulation des plateformes. En juin 2023, il a publié le rapport sur le sens au travail, parrainé par Jean-Dominique Senard et Nicole Notat, en partenariat avec les DRH de 10 entreprises réunissant un million de salariés. |
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
Nos engagements
La meilleure actualisation du marché.
Un accompagnement gratuit de qualité.
Un éditeur de référence depuis 1947.
Des moyens de paiement adaptés et sécurisés.