actuEL-RH donne régulièrement la parole aux membres de l'association Réalités du dialogue social. Ce mois-ci, Nicolas Héron, directeur des relations sociales et de la santé au travail de Métro France, détaille les motivations et les enjeux qui ont conduit à la signature d'un nouvel accord sur la qualité de vie au travail en juin 2021 dans un contexte de crise sanitaire inédit.

Avec la pandémie, la santé et la sécurité au travail sont revenues au premier plan des préoccupations tant des collaborateurs que de la population managériale et des représentants des salariés. Indissociables de la qualité de vie au travail (QVT) et de la qualité des conditions de travail, elles constituent des facteurs de développement du bien-être au travail, qu’il soit individuel ou collectif. C’est sur cette définition que les acteurs sociaux de Métro France se sont accordés en 2020, bien en amont de leur négociation sur la QVT. Cela a fait l’objet de riches discussions mais qui ont abouti à une vision partagée : un sentiment de bien-être au travail, à la fois perçu collectivement et individuellement, qui englobe l’ambiance de travail, la culture de l’entreprise, le travail, les conditions de travail, le sentiment d’implication, le sens donné au terme travail, le degré d’autonomie et de responsabilisation, l’égalité, le droit à l’erreur accordé à chacun, la reconnaissance, mais également la valorisation du travail effectué.
L’accord signé en juin 2021 a érigé des engagements concrets que ce soit en faveur de la protection de la santé, de la sécurité des salariés mais également au niveau de la promotion de la QVT. Il importe de concilier l’individuel et le collectif pour assurer le bien-être au travail ; les deux n’étant clairement pas incompatible. Cela répond aux mêmes motivations qui préfigurent l’organisation du travail en présentiel et à distance. Il s’agit de refaire corps, refaire société et de réfléchir à la manière dont le travail sera défini demain. Chez Métro France, si les entrepôts n’étaient pas assujettis au télétravail, les 800 salariés du siège social se sont retrouvés du jour au lendemain confinés. Depuis l’été, ils sont incités à revenir petit à petit, pour un retour souhaité de l’ensemble des équipes, au siège, à partir du 1er octobre. A cette date, les termes du dernier accord télétravail seront appliqués, à savoir deux jours par semaine de travail à distance possible. Ce rythme n’a pas été décrété subitement ; l’idée était de préparer les esprits afin de donner du sens par rapport à la situation. Le télétravail a ses vertus tout comme il est important de se retrouver en équipes en se posant la question de l’intérêt d’être en présentiel. C’est finalement tout le rapport au travail qui se trouve questionné, avec un rôle considérable donné à la ligne managériale.
Incontestablement, un mouvement s’est enclenché de transformation du management par le contrôle à un management par objectif. Cela change un peu l’approche et exige que les managers soient accompagnés pour que cela fonctionne. Là aussi, il s’agit d’articuler l’individuel et le collectif et de rechercher un savant dosage : comment chaque individu se positionne au niveau du collectif et à l’inverse comment celui-ci favorise la place que chacun doit y retrouver. Il convient d’y aller progressivement, de donner le maximum de sens – peut-être encore plus que précédemment - et d’infuser une culture managériale durable.
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
Les entreprises les mieux armées sont celles qui ont su développer un arsenal de prévention. C’est pourquoi, chez Métro France, deux instances ont été mises en place : d’une part, un observatoire de la qualité de vie au travail avec un fonctionnement paritaire et, d’autre part, une commission exclusivement dédiée aux risques psycho-sociaux (RPS).
L’observatoire de la QVT s’est imposé dans le cadre des négociations entre la direction et les élus afin de pouvoir suivre l’ensemble du plan d’actions mis en place avant l’été 2021. Dans cette période où les changements sont extrêmement rapides, il parait indispensable d’examiner les mesures de manière régulière et de se laisser une agilité pour les adapter afin que le plan d’actions soit toujours d’actualité. L’observatoire se réunit tous les trimestres et doit potentiellement mettre à l’ordre du jour de nouveaux sujets.
La face cachée de cette pandémie est la fatigue morale, psychologique avec un risque de résurgence des RPS qu’il est fondamental d’encadrer. Dans les entreprises, en fonction de signaux faibles sur les lieux de travail, des enquêtes sur les RPS sont menées. Leur prévention est le plus souvent réalisée de façon ponctuelle : une fois un risque détecté, il est analysé puis traité sans démarche globale. Car le mal-être psychologique des collaborateurs fait toujours partie des sujets tabous : les responsables et managers ne sont pas à l’aise avec ces difficultés. Or, les RPS font partie intégrante de la QVT ; il faut les suivre, les étudier, de manière co-construite avec les représentants du personnel. Chez Métro France, l’idée est de faire un point périodique avec les organisations syndicales au sein d’une commission 100 % dédiée aux RPS. Ce satellite de l’observatoire de la QVT a été créé en raison de la situation sanitaire mais également dans le cadre des transformations de l’entreprise avec pour objectif de fournir aux managers une boîte à outils qui permette de répondre, le plus rapidement et le plus efficacement possible, à l’ensemble des salariés. Car le dialogue social commence par le dialogue entre un salarié et son N+1, à un niveau certes de base mais essentiel.
C’est la confiance créée et tissée entre les partenaires sociaux, avec un grand sens de responsabilités et une volonté de construire des dispositifs qui favoriseront l’amélioration de la santé, des conditions de travail et de la QVT de l’ensemble des collaborateurs. C’est ambitieux et cela demande d’y aller par étape, "baby step by baby step", et en toute transparence ; ce qui peut interroger, en particulier les différentes directions, sur l’acceptation de l’entreprise à partager un éventuel mal être des collaborateurs. Or, il vaut mieux prévenir que guérir. Cette démarche de vigie des RPS doit permettre de mieux échanger et de pouvoir répondre à différentes problématiques. Elle doit être menée "avec" les représentants des salariés et "pour" le bien-être collectif, "pour" l’entreprise.
De la même façon, lorsque des enquêtes ou baromètres sont réalisés auprès des collaborateurs, les analyses tout comme les plans d’actions sont partagés "avec" ces derniers et "avec" les managers. La suite est fondamentale. Il faut maintenir un bruit d’actions et pas seulement un bruit de fond ; c’est à dire poursuivre les mesures fixées, avec un calendrier, et rendre compte des résultats. Si les étapes ne sont pas cadencées, il y a un risque d’essoufflement. Si le plan se révèle trop ambitieux, il faut revoir les objectifs à la baisse ou à l’inverse, créer des dynamiques vertueuses, si ces derniers sont vite atteints. Le plus important est de donner de la considération, de partager des informations, d’améliorer des situations. Quand il y a une volonté réciproque, c’est positif pour le collectif. Cela ne vaut que s’il y a un plan et que ce dernier est exécuté. C’est un peu comme un accord collectif ; le travail ne fait que commencer à la signature, lorsque chacun s’engage sur le dispositif négocié.
La pandémie a considérablement contribué à faire entrer les enjeux sociétaux au sein de l’entreprise ; d’une part en amplifiant la porosité entre les sphères privée et professionnelle, et, d’autre part, en mettant en lumière la notion de solidarité en tant qu’arme pour combattre cet ennemi commun. Il apparait désormais compliqué, voire inenvisageable de cantonner les objets de dialogue social au périmètre de l’entreprise, que ce soit pour la QVT mais aussi pour l’aspect environnemental.
Chez Métro France, dans le cadre de l’accord, il était important de graver dans le marbre des engagements, notamment sur le sujet des violences faites aux femmes sur le lieu de travail ou sur celui des violences intrafamiliales. L’obligation de santé et de sécurité des collaborateurs va au-delà de l’entreprise compte tenu des conséquences sur l’exercice du travail (retards, absences, stress). C’était une promesse qu’il fallait prendre dans l’accord, d’engager le dialogue afin de libérer la parole, de dédramatiser le sujet vis-à-vis des directions, de proposer des ressources, de guider et former les équipes RH pour savoir comment accueillir les témoignages des victimes de ces violences, comment et vers où les orienter.
Force est de constater que ce type de dispositifs, d’accompagnement RH, psychologique, social, rencontre de l’adhésion au sein d’une entreprise comme Métro France. La responsabilité sociétale fait effectivement partie de son ADN dans la mesure où elle propose une véritable photographie de la société française, au travers de sa population de collaborateurs – les premiers de cordée – et de son maillage territorial. Avec 98 entrepôts, Métro France se trouve confronté à des problématiques francilienne, métropolitaine mais aussi d’une France rurale où se posent les questions de transport, d’écoles, d’accès au numérique….
Il y a quelques années, la prise en compte dans l’entreprise de tels sujets sociétaux, tout comme les problémes de harcèlement, ne se posait pas ou pas suffisamment. Tout ne peut être traité mais chaque organisation doit faire en sorte de relever nombre de ces enjeux, avec des actions concrètes, en lien avec les associations spécialisées. Il est néanmoins délicat de délimiter le champ de sa responsabilité sociétale et la question demeure de savoir où placer le curseur de son intervention.
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