La revendication en nature d'un bien vaut revendication de son prix de revente

28.12.2018

Gestion d'entreprise

Dès lors que le revendiquant a respecté la procédure préalable de revendication du bien vendu sous réserve de propriété, il est recevable à saisir le juge-commissaire d'une demande de revendication du prix de revente de ce bien.

Par l’arrêt commenté, la Cour de cassation souligne que dès lors que la procédure préliminaire de la revendication du bien devant l’administrateur ou à défaut devant le débiteur, ou le liquidateur, prévue par les articles R. 624-13 et R. 641-31 du code de commerce, qui constitue un préalable obligatoire à la saisine du juge-commissaire, a été suivie, le revendiquant est recevable à saisir ce juge d’une demande de revendication du prix de revente du bien. Autrement dit, quand le bien a été revendiqué, cette revendication vaut aussi pour son prix. Une seule demande de revendication préalable est nécessaire.

Un vendeur de marchandises déclare sa créance de prix de vente au passif de la procédure de liquidation judiciaire de son acheteur. Puis, se prévalant d’une clause de réserve de propriété, il revendique les marchandises auprès du liquidateur. Ce dernier ne lui répond pas, le revendiquant saisit alors le juge-commissaire d’une demande de revendication portant à la fois sur les marchandises, mais également sur le prix de leur revente. L’article L. 624-18 du code de commerce, applicable à la liquidation judiciaire par renvoi de l’article L. 641-14, permet en effet au propriétaire de biens vendus avec une clause de réserve de propriété, lorsque les marchandises ont été revendues avant le jugement d’ouverture par l’acheteur, son débiteur, de revendiquer le prix de revente de ces biens à la condition qu’il n’ait été ni payé, ni réglé en valeur, ni compensé entre le débiteur et le second acheteur à la date du jugement d’ouverture. Le droit de propriété sur les biens se reporte sur le prix de revente. Est ici mis en œuvre un mécanisme de subrogation réelle qui permet au vendeur, sous réserve de propriété, d’appréhender, entre les mains des organes de la procédure collective ouverte à l’encontre de son débiteur, toutes les sommes qui ont pu lui être payées par le sous-acquéreur, en règlement du prix de revente, postérieurement au jugement d’ouverture. Ainsi, l’article R. 624-16 du code de commerce précise : « en cas de revendication du prix des biens en application de l’article L. 624-18, les sommes correspondantes payées par le sous-acquéreur, postérieurement à l’ouverture de la procédure doivent être versées par le débiteur ou l’administrateur entre les mains du mandataire judiciaire. Celui-ci les remet au créancier revendiquant à concurrence de sa créance ».

En l’espèce, les marchandises avaient été, pour une très grande partie, revendues avant le jugement d’ouverture. Le liquidateur s’est opposé à la revendication du prix de ces reventes au motif qu’il n’avait pas été revendiqué auprès de lui avant la saisine du juge-commissaire. Ce faisant, le liquidateur renvoyait à la phase préalable obligatoire de la procédure de revendication, qui exige que la demande en revendication doit d’abord être adressée à l’organe de la procédure collective compétent (administrateur judiciaire ou liquidateur judiciaire) et que toute saisine directe du juge-commissaire est irrecevable, ce dernier ne pouvant être saisi qu’à défaut d’acquiescement par le liquidateur judiciaire dans le délai d’un mois à compter de la réception de la demande.

La Cour de cassation approuve la cour d’appel d’avoir écarté l’irrecevabilité soulevée par le liquidateur.

Frédérique Schmidt, Conseiller référendaire à la Cour de cassation

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