La rupture amoureuse entre collègues reste un fait relevant de la vie privée

La rupture amoureuse entre collègues reste un fait relevant de la vie privée

06.01.2021

Gestion du personnel

Comment le droit du travail appréhende-il les relations amoureuses au travail, et leur rupture ? Avec la plus grande prudence dès lors que cette situation n'entraîne aucune conséquence négative pour l'entreprise ou la carrière des salariés concernés. C'est ce qui ressort d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 16 décembre 2020.

Parfois travail rime avec amour. Mais lorsque la situation du couple se détériore, il n'est pas toujours simple de gérer la rupture sans que cela n'ait d'impact sur le travail. Pourtant, la relation amoureuse reste une affaire privée. Jusqu'à un certain point. Dans l'affaire soumise à la Cour de cassation le 16 décembre 2020 les juges ont estimé que la ligne rouge entre vie privée et vie professionnelle n'avait pas été franchie. 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Une rupture qui tourne mal

Un salarié est licencié pour faute grave à la suite de faits liés à sa rupture amoureuse avec une collègue. Il faut dire que le salarié avait été jusqu'à poser une balise GPS sur le véhicule personnel de son ex compagne afin de pouvoir vérifier son emploi du temps car il la soupçonnait d'entretenir une nouvelle relation avec un autre collègue. Il lui avait par ailleurs envoyé de nombreux messages sur sa boite mail professionnelle pour la presser de reprendre contact alors que la salariée lui avait expressément indiqué qu'elle ne souhaitait plus avoir de relations avec lui en dehors de l'activité de l'entreprise. 

Ces comportements étaient-ils fautifs et pouvaient-ils justifier son licenciement ? La cour d'appel, puis la Cour de cassation répondent par la négative. 

Des faits qui restent d'ordre privé

Toute la question était de savoir si les faits reprochés au salarié constituaient des fautes de nature professionnelle. Pour l'employeur, pas de doute ! Installer un GPS sur sa voiture, lui envoyer des messages non souhaités sur sa messagerie professionnelle sont autant de faits établis.

Pourtant, la cour d'appel, qui reconnait la matérialité des faits, en conclut que ces derniers étaient exclusivement liés aux relations privées des salariés et qu'ils n'étaient pas constitutifs de manquement fautif aux obligations de son contrat de travail. 

La Cour de cassation confirme la solution retenue par la cour d'appel. Elle souligne que les juges du fond, avaient constaté que "les salariés avaient entretenu pendant des mois une relation amoureuse faite de ruptures et de sollicitations réciproques". Que, par ailleurs, un courriel de la salariée du 16 octobre 2014 "établissait que chacun d'eux avait suggéré de rompre, excluant une demande non équivoque résultant de la seule initiative de l'intéressée". Enfin, toute allégation de harcèlement moral avait été écartée. Elle retient également le fait que "la balise avait été posée sur le véhicule personnel de la salariée, que l'envoi à celle-ci de courriels au moyen de l'outil professionnel était limité à deux messages et que les faits n'avaient eu aucun retentissement au sein de l'agence ou sur la carrière de l'intéressée".

Elle estime ainsi, comme la cour d'appel, que ces faits relevaient de la vie personnelle du salarié et ne constituaient pas un manquement aux obligations découlant de son contrat de travail, en sorte que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse.

Reste une interrogation à la lecture de cet arrêt. Si la rupture avait dégénéré au point de mettre en danger physiquement et/ou psychologiquement la salariée, l'obligation de sécurité de l'employeur à l'égard de ses collaborateurs aurait sans doute dû justifier des mesures afin de mettre fin à ces faits de violence.

Florence Mehrez
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