La Scop La collective adopte le congé menstruel

La Scop La collective adopte le congé menstruel

13.04.2021

Gestion du personnel

La société coopérative de production La collective donne aux femmes la possibilité de prendre un jour de congé supplémentaire par mois pour leur permettre de surmonter les règles douloureuses. Les explications de Dimitri Lamoureux, co-gérant de la coopérative.

C’est une première en France : la société coopérative La collective, spécialisée dans le recrutement de nouveaux donateurs au profit d’ONG (Médecins du monde, Action contre la faim, Aides), d’associations caritives ou écologiques, octroie depuis le 1er janvier dernier, à son personnel féminin (16 femmes sur 37 salariés) un jour de congé supplémentaire par mois afin de faire face plus facilement aux contraintes qu’elles rencontrent durant leurs règles. Une initiative retranscrite noir sur blanc dans l’accord du 18 décembre signé entre les gérants et les 18 salariés présents au moment de l’assemblée générale (avec une abstention).  

"Il s’agit d’une avancée sociale importante pour favoriser la qualité de vie au travail et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, insiste Dimitri Lamoureux, co-gérant de la coopérative. Ce congé évite la double peine : les douleurs physiques et la perte de salaire". D’autant que l’activité de la coopérative ne permet pas de télétravailler.

Ce jour pourra être posé le jour même du congé

Concrètement, ce jour de congé supplémentaire est facultatif et doit être posé sur le temps de travail effectif. Il pourra être posé le jour même du congé. Seule démarche à effectuer : un mail à l’attention du directeur administratif de la Scop qui s’engage à respecter "la confidentialité des informations" fournies. Le salaire sera intégralement versé durant cette journée et cette absence ne pourra être comparée, ni additionnée aux traditionnels arrêts de travail. Cela afin de bien marquer que les règles ne sont pas une maladie, comme l’endométriose, par exemple.

"J’ai senti un peu de perplexité chez certains hommes"

A l’origine de cette idée : Jessica Martinez, salariée associée, recruteuse itinérante, qui a soumis cette question à l’assemblée générale de septembre 2020. "Il y a eu des interrogations, notamment sur l’intensité de la douleur, explique-t-elle mais pas d’opposition à ce projet". "J’ai senti un peu de perplexité chez certains hommes mais personne ne s’est exprimé ouvertement", complète Dimitri Lamoureux. Des questionnaires anonymes ont ensuite été envoyés aux 14 femmes salariées à l’époque. Neuf y ont répondu. "Parmi elles, 88,9 % se plaignaient d’avoir des règles douloureuses et autant estimaient que ces douleurs avaient un impact négatif sur leur travail, notamment pour les itinérantes, poursuit Jessica Martinez. La position debout était vécue comme un facteur aggravant de la douleur".

Convaincue de l’utilité d’un tel congé, Jessica Martinez a ensuite contacté deux entreprises pionnières, l’une en Angleterre, l’autre en Egypte.

Restait à estimer l’impact de cette mesure sur le budget de la coopérative. C’est chose faite avec la simulation financière qui évalue le coût entre 6 700 euros et 13 949 euros pour un jour d’absence, la fourchette basse ciblant 30 % des femmes, la plus haute, 50 % de l’effectif féminin.

Une fausse bonne idée ?

Un projet réaliste, selon l'assemblée des associés. Les deux gérants, Michael Mezi et Dimitri Lamoureux, ont donc décidé d’accompagner le programme. D’autant que le temps de travail porte sur 33 semaines, en raison des récupérations données en contrepartie des nombreux déplacements effectués par les salariés itinérants. Ce qui réduit le nombre de jours d’absence potentielle.

Mais cette initiative peut aussi ressembler à une fausse bonne idée : un congé menstruel peut-il constituer un frein supplémentaire à l’embauche des femmes ? Entraîner une mise à l’écart de ces dernières durant cette période ? Renforcer les préjugés à leur encontre ? Ou tout simplement accentuer leur culpabilité, en laissant le travail à leurs collègues masculins ? Voire accroître la discrimination entre femmes et hommes ?

Dimitri Lamoureux balaie d’un revers de main ces craintes. Pour le co-gérant, ce congé ne peut pas "créer de discrimination entre hommes et femmes sur un sujet qui ne concerne qu'un seul des sexes". "L'essentiel est pour nous que le bien-être au travail prime pour tous les salariés". L’accord est toutefois expérimental. Il est conclu pour une durée d’un an. Un bilan sera dressé d’ici à novembre afin d’évaluer la pertinence de cette initiative. Depuis janvier dernier, neuf femmes ont effectué une demande de congé menstruel. Un chiffre encore faible en raison de l’activité malmenée par la crise sanitaire.  

 

"Un accord peut bénéficier aux seuls salariés de sexe féminin"
Le congé menstruel constitue-t-il une discrimination positive ou une inégalité de traitement ? Dans un arrêt du 12 juillet 2017, la chambre sociale de la Cour de Cassation a admis qu’un accord collectif pouvait bénéficier aux seuls salariés de sexe féminin. Cette décision visant à réduire les inégalités professionnelles entre les sexes. Ainsi, un salarié de sexe masculin contestait le fait que son entreprise octroyait une demi-journée de congé supplémentaire, à ses collègues féminins, le 8 mars, à l’occasion de la Journée de la femme. Il critiquait cette mesure arguant qu’elle n'était pas fondée et dénonçait dès lors une inégalité de traitement à son égard : selon le plaignant, il faisait partie des effectifs de la société et il n'avait pas bénéficié d'un tel avantage. Mais pour la Cour de cassation, il ne s'agissait pas d'une discrimination positive mais d'un rétablissement "de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes".

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Anne Bariet
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