La SPE connaît un engouement modéré auprès des cabinets comptables (1°)

La SPE connaît un engouement modéré auprès des cabinets comptables (1°)

21.04.2020

Gestion d'entreprise

Les sociétés pluri-professionnelles d’exercice (SPE) entre experts-comptables et avocats peinent encore à se généraliser. Voici, dans un premier volet, le regard des hommes du chiffre.

29. C’est le nombre de sociétés pluri-professionnelles d’exercice, relevé par le Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables début janvier, qui rassemblent hommes du chiffre et avocats. Depuis 2016 (ordonnance n°2016-394 puis décret n°2017-794 en mai 2017), ces deux professions réglementées peuvent travailler dans une même structure d’exercice. Finis les partenariats, expression fourre-tout où les ascenseurs ne sont pas systématiquement renvoyés. Les experts-comptables qui ont franchi le pas ne cachent pas leur enthousiasme : "Nous avons créé la SPE Exosial, avec la société d’avocats Socialex, qui compte deux avocates spécialisées en droit du travail, et que nous connaissions au préalable, explique Rémy Deschamps, dirigeant du cabinet comptable Cofif (30 salariés à Franconville, Val d’Oise). Notre profession va affronter la réduction des revenus générés par la tenue comptable, voire sa quasi-disparition si le monopole tombe. Il faut donc élargir le champ des possibles, ce que permet la complémentarité avec les avocats". Full-service dans le cadre des missions d’acquisition, d’audit social, accompagnement dans le contentieux… les possibilités de prestations ne manquent pas. Avec un intérêt évident pour le client : "Plus besoin de multiplier les rendez-vous avec l’expert-comptable d’un côté, l’avocat de l’autre, de répéter les informations… Pour nos clients, une société unique comme interlocuteur est un gage d’efficacité et un renforcement des compétences apportées", indique Emmanuel Larrazet, expert-comptable associé chez SR Conseil (cabinet rhônalpin, 400 salariés).

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Verrouiller le respect déontologique

Pour autant, l’association avec une autre profession réglementée n’est pas un parcours de santé. "J’ai cherché pendant deux ans à m’associer avec un avocat en droit des affaires, sans y parvenir", déplore Rémy Deschamps. La France compte près de 69 000 avocats (68 464 au 1er janvier 2019 selon le Ministère de la Justice) et 21 000 experts-comptables (source : CSOEC), comment expliquer les débuts timides de la SPE ? Pour Christian Scholer, président de la commission juridique et déontologie du  CSOEC : "Les commissaires aux comptes n’étaient pas autorisés à s’associer dans une SPE, jusqu’à la loi Pacte de mai dernier. Ce qui a représenté un frein. Nous attendons toujours le décret d’application transverse qui lèvera cet obstacle, sachant qu’il concerne les cabinets exerçant une activité mixte de Cac et d’expertise comptable".

Autre cause probable : la grande nouveauté de la SPE, qui réunit dans une même structure d’exercice hommes du chiffre et hommes du droit, nécessite une gestion du changement. L’inscription auprès des Ordres concernés est soumise à validation, afin de vérifier que les paramètres de déontologie, d’indépendance, de respect du secret professionnel ou encore la prévention du conflit d’intérêts soient bien respectés. Car une SPE obéit à des règles précises de gouvernance et d’exercice. Ce qui n’est pas du goût de tous les hommes du chiffre. "J’ai attendu avec impatience le texte autorisant la création de SPE, et j’ai été déçu, relate Laurent Chapart, PDG du groupe Cogep. Car le capital d’une SPE doit être détenu intégralement par des professionnels diplômés, ce qui n’est pas le cas de mon cabinet, où nous avons notamment accueilli des ingénieurs. A mon sens, la SPE correspond plus aux besoins de cabinets de taille réduite, aux mains de quelques experts-comptables diplômés, et qui veulent s’associer avec d’autres professions libérales".

Bientôt des statuts-type

Convaincu par l’intérêt de l’inter-professionnalité, Laurent Chapart a opté pour la création d’une société de participations financières de professions libérales (SPFPL). Cette holding peut prendre des participations dans des sociétés d’avocats, d’experts-comptables mais aussi de notaires ou d’huissiers. Pour aider les experts-comptables désireux de se lancer dans l’inter-professionnalité en SPE, le CSOEC travaille avec le Conseil National des Barreaux à la création d’un guide et de statuts type qui devraient être proposés dans le courant de l’année.

Olga Stancevic
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