"La VAE inversée constitue une alternative très intéressante aux pénuries de compétences"

"La VAE inversée constitue une alternative très intéressante aux pénuries de compétences"

11.06.2023

Gestion du personnel

David Rivoire, co-auteur du rapport sur la VAE remis, le 15 mars 2022, à Elisabeth Borne, alors ministre du travail, revient sur le lancement de l’expérimentation portant sur la "VAE inversée". L’objectif est de développer une nouvelle forme de validation des acquis de l’expérience via les actions de formations en situation de travail.

Le décret, publié au Journal officiel du 27 mai, en application de la loi du 21 décembre 2022, donne le coup d’envoi à une expérimentation sur la "VAE inversée" jusqu’au 28 février 2026. En quoi consiste ce dispositif qui figurait au centre des propositions de votre rapport sur la VAE (*) ?

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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 Ce dispositif met à contribution un troisième acteur, un accompagnateur extérieur

Contrairement à la VAE classique, l’objectif est ici de permettre à un candidat d’obtenir une expérience professionnelle, en vue d’acquérir des compétences. On parle ainsi de "VAE inversée" mais le terme le plus approprié est "formation en situation de travail diplomante". Le principe pédagogique repose sur l’expérience apprenante, la formation en situation de travail.

Reste qu’il fallait donner un cadre pour mettre en œuvre cette nouvelle voie de certification professionnelle. Le dispositif ne se limite pas à une simple relation entre un apprenant et tuteur. Il met à contribution un troisième acteur, un accompagnateur extérieur, formateur au sein d’un organisme de formation certifié Qualiopi. Lequel peut être externe ou interne si l’entreprise dispose de son propre centre de formation.

C’est à cet accompagnateur de garantir la faisabilité du projet. Autrement dit, de vérifier que l’entreprise peut mettre en place des situations de travail apprenantes et qu’elle dispose bien d’un ou de plusieurs tuteurs disponibles.

C’est aussi à lui de définir le référentiel de compétences de l’apprenant, à partir de l’emploi réellement occupé et en collaboration étroite avec l'entreprise d’accueil.

A charge, enfin, pour lui, d’accompagner l’apprenant dans l’acquisition de ses connaissances définies mais aussi le tuteur dans son rôle pédagogique.

Quel est l’objectif de cette VAE inversée ?

Ce dispositif vise à favoriser l’accès à la certification et à l’insertion professionnelle dans des secteurs rencontrant des difficultés particulières de recrutement. Cette approche, connectée au terrain, est complémentaire des formations classiques ou par alternance. C’est actuellement ce qui manque pour que l’on puisse s’adresser à tout le monde, jeunes décrocheurs, bénéficiaires du RSA, personnes souhaitant se reconvertir.

Justement, il manque encore une pièce au puzzle. Un appel à projets devrait être lancé prochainement à destination des porteurs de projets intéressés par cette expérimentation. Pour être éligibles, ils devront répondre à un cahier des charges qui sera défini par arrêté, actuellement non publié.

5 000 personnes seront intégrées à ce dispositif

Effectivement. Les entreprises des secteurs en tension comme l’hôtellerie-restauration, le secteur médico-social sont les premières concernées. Mais il n’y a pas d’exclusivité. Les branches professionnelles ne sont pas les seules à pouvoir répondre à cet appel d’offres. Une entreprise, un Opco ou un organisme de formation pourra également candidater.

Ces projets seront validés par la DGEFP avant d’être déployés. 5 000 personnes seront intégrées à ce dispositif qui sera expérimenté jusqu’au 28 février 2026.

Quel est le cadre juridique de cette expérimentation ?

L'apprenant est à 100 % chez son employeur 

Cette VAE est adossée à un contrat de professionnalisation. A la différence près que l’apprenant ne partagera pas son temps entre un centre de formation et une entreprise. Il sera à 100 % chez son employeur. On transforme ici l’école en situation de travail.

Les conditions d’accès de ce contrat ont également été assouplies : les actions de professionnalisation ne comportent plus de durée minimale (6 à 12 mois pour les contrats de professionnalisation classiques). Le délai maximal reste, lui, à 36 mois. De plus, ce contrat est accessible à partir de 16 ans et il n'y a pas de limite d’âge : il peut s’adresser à tous ou presque.

Enfin, il peut déboucher sur une certification, un bloc de compétences ou encore viser une classification d’une convention collective de branche.

Comment est financé ce dispositif ?

Le montant de la prise en charge est plafonné à 9 000 euros par an pour l'accompagnateur

Contrairement à un contrat de professionnalisation classique, l’enveloppe destinée à financer le centre de formation est ici transférée à l’accompagnateur (interne ou externe). Le montant de la prise en charge est plafonné à 9 000 euros par an.  

L’employeur peut, lui, bénéficier de l’aide exceptionnelle fléchée vers l’alternance, à savoir un montant de 6 000 euros maximum pour un contrat d'un an.

Que se passe-t-il à l’issue de la formation ?

L'apprenant aura deux alternatives à sa disposition :

  • Soit valider les compétences liées au référentiel de compétences du métier correspondant à la convention collective qui avait été ciblé lors de l’embauche. Dans ce cas, cette évaluation est tripartite (apprenant, entreprise, accompagnateur) et se fait tout au long du parcours.
  • Soit valider une certification ou un ou plusieurs blocs de compétences. Dans ce cas, l’apprenant devra présenter un dossier de VAE.

Sur quelle base sera évaluée ce dispositif, à l’issue de l’expérimentation ?

Rien n’empêche un employeur de compléter cette formation par des modules théoriques pour l'optimiser

Le point principal portera sur le retour à l’emploi durable de ces personnes. L’objectif est bien qu’elles développent des compétences directement opérationnelles pour qu’elles puissent ensuite rester dans leur entreprise d’accueil ou le secteur concerné d’une part, et qu’elles acquièrent les soft skills indispensables pour négocier les virages professionnels suivants. C’est donc bien le niveau d’insertion professionnelle qui va être mesuré.

Mais je ne suis pas trop inquiet. Ce dispositif constitue une alternative très intéressante aux pénuries de compétences. Les entreprises devraient s’emparer rapidement de cette nouvelle VAE. D’autant qu’elles pourront former elles-mêmes leur personnel sur des points précis, à travers des parcours personnalisés. Rien n’empêche, en effet, un employeur de compléter cette formation par des modules de formation théoriques, sous format digital, pour la bonifier, l'optimiser, par exemple en proposant un module d’électricité à un futur électricien. Du sur-mesure, en quelque sorte.

 

(*) David Rivoire est co-auteur avec Claire Khecha, directrice générale de l’Opco Constructys lors du lancement de la mission, et Yanic Soubien, ex vice-président de la région Normandie en charge des politiques d’emploi et de formation professionnelle, du rapport "De la VAE 2002 à la Reva 2020 : libérer la VAE ; Reconnaître l’expérience tout au long de la vie", remis le 15 mars 2022. David Rivoire a créé VAE 2 Rives en 2002, société spécialisée en accompagnement VAE. 

 

 

Anne Bariet
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