Le bilan de compétences menacé d'exclusion du compte personnel de formation

Le bilan de compétences menacé d'exclusion du compte personnel de formation

10.07.2025

Gestion du personnel

Les acteurs de la formation professionnelle dont la Fédération nationale des CIBC, Les Acteurs de la compétence, le Syndicat national des organismes de formation (Synofdes), s'inquiètent d'une possible suppression du financement des bilans de compétences par le compte personnel de formation (CPF) dans le cadre de la loi de finances 2026.

Une mobilisation inédite se dessine dans le secteur de la formation professionnelle. Hier, plusieurs organisations représentatives - la Fédération nationale des CIBC, Les Acteurs de la compétence, le Syndicat national des organismes de formation (Synofdes) et la Fédération française des professionnels de l'accompagnement et du bilan de compétences (FFPABC) - ont lancé un "cri d'alarme" face à la perspective d'une exclusion des bilans de compétences du dispositif du compte personnel de formation (CPF).

Cette mesure, qui pourrait être intégrée au projet de loi de finances 2026, s'inscrit dans la continuité des restrictions déjà appliquées. La loi de finances 2025 a en effet supprimé l'éligibilité au CPF des formations d'accompagnement à la création et à la reprise d'entreprise, désormais limitées aux seules certifications inscrites au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) ou au Répertoire spécifique (RS).

Un outil plébiscité par les actifs

Pourtant, les chiffres témoignent de l'importance du dispositif. Selon les données de la  Dares de juillet 2024, les formations relatives au "développement des capacités d'orientation, d'insertion ou de réinsertion sociales et professionnelles" - catégorie qui englobe les bilans de compétences - occupent la deuxième place des formations les plus suivies, après celles portant sur les transports et la manutention.

Plus précisément, 6,2 % de l'ensemble des formations réalisées en 2023 concernaient des bilans de compétences. En 2024, ces derniers représentent 5,9 % des dossiers financés via le CPF et 7,4 % des fonds dépensés, selon les données rapportées par la fédération patronale Les Acteurs de la compétence. Un usage "ciblé" et "circonscrit" qui ne "cannibalise pas" les fonds du CPF, selon les organisations mobilisées.

La notoriété de cet outil confirme son ancrage : 92 % des actifs interrogés connaissent le bilan de compétences, d'après le sixième baromètre de l'emploi et de la formation 2024 du Centre Inffo, le plaçant en deuxième position après l'apprentissage et loin devant le conseil en évolution professionnelle (45 %).

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Une "catastrophe" pour les petits centres de bilans de compétences

"C'est un cri d'alarme que nous lançons, le bilan de compétences est menacé", a déclaré Garance Yverneau, secrétaire générale de la fédération patronale Les Acteurs de la compétence. Pour elle, cette éventuelle suppression constituerait "une catastrophe" pour les petits centres de bilans de compétences qui "ne pourraient pas se relever".

L'argumentaire développé par les professionnels du secteur met l'accent sur les enjeux sociaux et économiques. "Se priver d'un outil aussi efficace serait dramatique pour les actifs [qui] ne pourraient pas se reconvertir, à l'heure du choc démographique, des mutations du marché de l'emploi liées aux transitions écologiques [et à] l'intelligence artificielle", souligne Garance Yverneau, rappelant qu'"un actif sur deux envisage une reconversion professionnelle".

Nathalie Déchelette, déléguée générale de la fédération nationale des CIBC, a rejoint cette analyse. Elle rappelle que ces centres, comptant 750 permanents répartis sur l'ensemble du territoire, "ont toute [leur] place" face à "un monde du travail en perpétuelle évolution".

Un dispositif encadré depuis 1991

Institué par la loi du 31 décembre 1991 et réaffirmé par la loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018, le bilan de compétences bénéficie d'un cadre réglementaire spécifique. Une instance de labellisation reconnue par l'Etat encadre cette activité, contrairement à d'autres formations du CPF.

Les organisations professionnelles plaident pour une "structuration durable du marché" plutôt que pour une restriction de l'accès. Elles pointent les effets de "la dérégulation du marché" consécutive à la mise en place du CPF, qui a entraîné "une hétérogénéité des pratiques et des prix" ainsi qu'"une hétérogénéité de la qualité des prestations".

Selon une étude Harris interactive présentée hier par les organisations mobilisées, les bilans de compétences permettent aux bénéficiaires d'atteindre "complètement ou partiellement leurs objectifs initiaux", avec une amélioration de leur situation professionnelle pour une majorité d'entre eux.

Les acteurs de la formation professionnelle redoutent désormais que cette mesure n'impacte particulièrement "les salariés les plus fragiles, les seniors, les personnes en longue maladie et les femmes" qui pourraient voir leurs évolutions professionnelles "totalement freinées".

D'autres acteurs patronaux sont appelés à rejoindre cette mobilisation, à l'image du Medef, de la CPME, de l'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (Udes) ou encore du Mouvement des entreprises de taille intermédiaire (Meti). Un courrier doit être adressé en ce sens, dès le début de la semaine prochaine, à la ministre du travail ainsi qu'au ministre de l'économie.

Anne Bariet
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