La loi portant mesures d’urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation a été publiée au Journal officiel du 18 novembre. Elle modifie le calendrier des négociations commerciales dans un périmètre défini. Dans sa chronique, Gaël Chantepie revient sur le champ d'application de la loi et les conséquences en cas d'échec des négociations.
Les négociations commerciales dans le secteur de la grande distribution obéissent à un calendrier précis, progressivement rigidifié depuis la loi du 3 janvier 2008. Les relations entre fournisseurs et distributeurs sont ainsi rythmées par une saisonnalité qui court de la fin de l’été à la date fatidique de clôture, en principe fixée au 1er mars. Cette contrainte temporelle vise à lutter contre les pratiques de prolongation artificielle des négociations, en imposant à tous les opérateurs une négociation simultanée, propre à stimuler la concurrence favorable aux consommateurs. Car la règlementation des négociations commerciales n’a pas pour unique objectif de permettre le contrôle administratif ultérieur de leur déroulement afin de garantir un minimum de loyauté. Elle vise aussi le résultat concret de ces négociations, les prix bas dont sont censés pouvoir bénéficier directement les consommateurs.
Le législateur ne manque jamais une occasion de réformer ce corps de règles devenu, au fil du temps, un maquis de règles spéciales enchevêtrées qu’il faut tâcher d’articuler. Mais jamais sans doute, avant la loi du 17 novembre 2023 portant mesures d’urgence pour lutter contre l’inflation concernant les produits de grande consommation, une loi sur les négociations commerciales n’avait assumé d’une manière aussi nette son ambition de peser sur le cours des négociations à venir, quitte à remettre en cause des accords passés en 2023. Au point que si la loi Descrozaille avait déjà largement laissé de côté les enjeux d’une meilleure répartition de la valeur dans la chaîne agricole, en englobant les produits alimentaires dans la catégorie plus vaste des produits de grande consommation, la loi du 17 novembre 2023 ne fait aucun mystère du résultat attendu des négociations à venir : une baisse des prix.
Le gouvernement avait bien esquissé des initiatives non législatives, au cours de l’été, avec l’incitation à une renégociation de leurs conventions par les gros fournisseurs, le « top 75 », puis à la rentrée avec un « trimestre anti-inflation » auquel étaient invités les distributeurs. Assurément déçu, peut-être vexé de constater l’ineffectivité du verbe politique, le ministre s’est alors décidé à engager une procédure législative accélérée destinée à avancer la date des négociations commerciales pour l’année 2024. Le résultat tient en deux articles, dont l’un prévoit, de manière rituelle désormais, la remise d’un rapport par le gouvernement, visant cette fois-ci à « évaluer les effets de l’avancée des négociations commerciales », en analysant « spécifiquement l’évolution des marges des industriels, filière par filière, et des acteurs de la grande distribution ». Ledit rapport doit être remis dans les trois mois à compter de la promulgation de la loi, soit au plus tard le 18 février, à peine quelques jours après la fin des négociations.
Mais c’est bien l’article 1er de la loi qui a concentré toute l’attention médiatique au cours des débats parlementaires, fournisseurs et distributeurs étant désireux de connaître l’organisation des négociations à venir. Le texte se contente de modifier le calendrier des négociations commerciales dans un périmètre restreint, fixé en considération des consommateurs visés. L’étude du champ d’application de la loi précédera ainsi l’analyse de ses effets pratiques sur la temporalité des négociations pour l’année 2024.
La loi du 17 novembre 2023 n’opère pas une réforme générale du droit des négociations commerciales. Elle vise exclusivement des situations pour lesquelles une « urgence » est ressentie, tout en apportant des précisions sur son application dans l’espace et le temps.
Champ d’application matériel
Sont seulement visés les distributeurs exerçant une activité de « commerce de détail à prédominance alimentaire ». La notion de « commerce de détail » se retrouve couramment employée par le législateur, au sujet notamment des autorisations d’exploitation commerciale ou des gérants de succursales de commerces de détail alimentaire. Ses contours exacts suscitent parfois cependant quelques incertitudes, par exemple au sujet de l’application de l’article L 341-2 du code de commerce. Faute pour ce dernier texte de contenir la moindre définition du « commerce de détail » ou d’en restreindre la portée à la distribution de produits, la cour d’appel de Paris l’a interprété comme pouvant s’appliquer à des franchises de services, en l’occurrence des agences immobilières.
Dans le contexte de la loi du 17 novembre 2023, le commerce de détail s’entend plutôt par opposition au commerce de gros, les grossistes bénéficiant désormais d’un régime de négociations « sanctuarisé ». C’est d’autant plus vrai que la « prédominance alimentaire » met évidemment l’accent sur la distribution de produits, dont une part prépondérante du chiffre d’affaires doit être de nature alimentaire. Le législateur vise donc la grande distribution alimentaire, ce qui permet, sans le préciser expressément comme cela était le cas dans la version adoptée en première lecture par l’Assemblée nationale, d’exclure les officines pharmaceutiques du champ d’application de la loi. Les distributeurs visés doivent en effet être compris à raison des conventions conclues.
Le texte restreint en effet sa portée aux seules conventions portant sur des produits de grande consommation (PGC). Si, depuis la loi du 30 mars 2023, la complexité des négociations commerciales s’est encore accrue, les conventions PGC ont concentré l’essentiel des modifications apportées cette année. Ces conventions portent non seulement sur les produits alimentaires et boissons alcoolisées, mais également sur les produits d’hygiène ou d’entretien, ce qui recoupe largement les produits distribués dans les grandes surfaces alimentaires.
Champ d’application spatial
La loi du 17 novembre 2023 entend s’appliquer à l’ensemble des conventions relatives à des produits commercialisés en France, à l’exclusion des territoires ultramarins.
Alors que les interrogations subsistent sur la portée réelle de l’article L 444-1, A, du code de commerce issu de la loi du 30 mars 2023, le législateur confirme la volonté du législateur de faire du droit des négociations commerciales une loi de police, sans toutefois utiliser le terme, dont l’application relèverait de la compétence exclusive des juridictions françaises. L’article 1er prévoit ainsi que ses dispositions sont d’ordre public et que tout litige portant sur leur application relève de la compétence exclusive des tribunaux français, sous réserve du respect du droit de l’Union européenne et des traités internationaux ratifiés ou approuvés par la France et sans préjudice du recours à l’arbitrage. Le législateur étend ainsi la portée de l’affirmation d’impérativité de la loi française et de compétence juridictionnelle à une disposition qui se contente de modifier le calendrier des négociations commerciales. Ce faisant, il entend éviter le contournement de la loi par les distributeurs opérant via des centrales d’achat implantées à l’étranger.
Le contraste est remarquable avec l’exclusion des distributeurs établis dans les territoires ultramarins. La loi du 17 novembre 2023 « ne s’applique pas aux distributeurs établis dans les collectivités mentionnées à l’article 72-3 de la Constitution, pour les produits commercialisés dans ces collectivités ». Cette exclusion des territoires ultramarins, qui ne figurait pas dans le projet de loi initial, résulte de plusieurs amendements discutés directement en séance publique au Sénat. Des sénateurs de territoires ultramarins ont fait valoir la spécificité de la chaîne d’approvisionnement, notamment sa complexité, du fait d’un grand nombre d’acteurs, et le délai moyen d’approvisionnement supérieur à celui observé en métropole. La commission mixte paritaire a précisé la rédaction adoptée par le Sénat, jugée trop large, en se contentant d’exclure de l’application de la loi les distributeurs établis dans les territoires ultramarins, afin qu’ils ne soient pas soumis aux dates de négociations anticipées pour les produits commercialisés dans les outre-mer. Cette rédaction conduit cependant à ce que « les entreprises établies dans les outre-mer négocieront de manière anticipée si leurs produits ne sont pas commercialisés dans les territoires d’outre-mer ». La solution adoptée confirme le traitement dérogatoire généralement retenu à l’égard des distributeurs situés dans des territoires ultramarins.
Champ d’application temporel
La loi du 17 novembre 2023 est entrée en vigueur au lendemain de sa publication au Journal officiel, soit le 19 novembre 2023. Elle s’applique donc à l’ensemble des contrats conclus à compter de cette date. Le dispositif ne saurait cependant être compris sans le mettre en relation avec la rupture anticipée imposée à la quasi-totalité des contrats en cours. De manière originale, en effet, le texte prévoit que « les conventions en cours d’exécution à la date d’entrée en vigueur de la présente loi qui ont été signées avant le 1er septembre 2023 prennent automatiquement fin », soit au 31 janvier 2024, soit au 15 janvier 2024, suivant la date à laquelle devront avoir été conclues les nouvelles conventions. Pour rendre effectives les nouvelles conventions annuelles anticipées, il fallait nécessairement mettre un terme aux précédentes, afin que les parties ne reportent pas leur prise d’effet au terme initialement convenu, soit le 1er mars 2024. Pour la plupart des conventions, conclues suivant un rythme annuel, la rupture anticipée n’affectera que quelques semaines d’exécution du contrat, ce qui laisse subsister les doutes quant à l’efficacité réelle de la mesure. Deux points méritent cependant d’être relevés.
D’une part, le législateur exclut l’automaticité de la rupture automatique pour les contrats conclus à compter du 1er septembre 2023. Le terme initialement convenu leur demeure applicable, sans qu’il soit nécessaire de repasser par de nouvelles négociations. D’autre part, la rupture automatique s’applique même aux conventions pluriannuelles, conclues pour deux ou trois ans. Si la situation demeurerait exceptionnelle en pratique, l’automaticité de la rupture décidée par le législateur suscite malgré tout un doute sur sa constitutionnalité. Car la conclusion d’une convention pluriannuelle répond en principe à la recherche d’une sécurité justifiée par la nécessité de réaliser des investissements dont l’amortissement est étalé dans la durée. Sans préjuger de l’issue des négociations à venir, il est incontestable qu’elles pourraient modifier l’économie de la convention initiale. On sait que le Conseil constitutionnel admet qu’« il est loisible au législateur d’apporter à la liberté d’entreprendre et à la liberté contractuelle qui découlent de l’article 4 de la Déclaration de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi ». Le contrôle exercé demeure assez souple lorsque la contestation porte sur l’intensité des restrictions à la liberté contractuelle apportées par le législateur. En témoignent notamment les différentes décisions rejetant des questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la sanction du déséquilibre significatif ou de l’avantage sans contrepartie. Mais la loi du 17 novembre 2023 ne se contente pas de contraindre les parties à une procédure rigoureuse pour les négociations à venir, elle met fin à des contrats en cours pour imposer une renégociation anticipée, potentiellement de plusieurs années. Or le Conseil constitutionnel interdit au législateur de « porter à l’économie des conventions et contrats légalement conclus une atteinte d’une gravité telle qu’elle méconnaisse manifestement la liberté découlant de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ». À ce titre, il paraît douteux que l’objectif d’intérêt général tiré du bénéfice attendu de manière anticipée, pour les consommateurs, de nouveaux prix de vente justifie de manière suffisante l’atteinte portée à la sécurité de conventions valablement conclues pour une durée plus longue. Le risque d’une question prioritaire de constitutionnalité demeure toutefois largement hypothétique, tant en raison du nombre de conventions pluriannuelles en cours que du contrôle très lâche exercé par le Conseil constitutionnel sur le terrain du principe de « pérennité contractuelle ». Tout juste peut-on constater que le législateur, dans son souci d’obtenir des baisses de prix, a évacué sans ménagement les anticipations légitimes des parties en modifiant la temporalité des négociations.
La temporalité raccourcie des négociations
Avancer les négociations commerciales aboutit à mettre en pratique, pour la première fois, les modifications issues de la loi du 30 mars 2023, particulièrement importantes en matière de produits de grande consommation. Cela se traduit directement sur le calendrier des négociations mais aussi, indirectement, sur les conséquences en cas d’échec de ces négociations.
Calendrier des négociations
Sans remettre en cause le principe d’annualité régissant les négociations commerciales, la loi du 17 novembre 2023 en avance le terme pour l’année 2024, ce qui se traduit à deux niveaux complémentaires.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
L’effet le plus direct de la loi est l’avancée de la date de communication des conditions générales, suivant un régime différencié selon la taille des fournisseurs. Objet de nombreuses modifications à l’occasion des débats parlementaires, les seuils et les dates ayant changé au fil de la discussion, ce calendrier distingue deux catégories de fournisseurs.
D’une part, pour les fournisseurs dont le chiffre d’affaires hors taxes, le cas échéant consolidé ou combiné, réalisé au cours du dernier exercice clos, est supérieur ou égal à 350 millions d’euros, les conditions générales doivent être communiquées au plus tard le 5 décembre 2023. D’autre part, pour les fournisseurs dont le chiffre d’affaires est inférieur à 350 millions d’euros, elles devaient l’être au plus tard le 21 novembre 2023. Le critère du chiffre d’affaires demeure discutable en raison des effets de seuil qu’il entraîne, considérant que suivant les secteurs d’activité, la concurrence peut s’exercer entre des entreprises situées de part et d’autre du seuil. Quoi qu’il en soit, la fixation de ce seuil a fait l’objet d’âpres discussions jusqu’au stade de la commission mixte paritaire. Si l’on résume, l’objectif visé par la fixation d’un seuil était essentiellement de protéger les petites et moyennes entreprises (PME) et les entreprises à taille intermédiaires (ETI) qui, traditionnellement, négocient de manière anticipée avec les distributeurs. De sorte que le seuil fixé pour différencier formellement les calendriers devrait s’entendre en agrégeant l’ensemble des filiales d’un groupe, ce qui, selon les parlementaires, concernerait quarante-quatre groupes.
Faut-il lire cette initiative comme le présage d’une inscription dans la loi de cette dissociation des calendriers à l’occasion d’une énième réforme des négociations commerciales ?
Il faut souligner l’extrême brièveté du délai, à peine trois jours, entre la publication de la loi au Journal officiel et la date limite pour la communication des conditions générales de certains fournisseurs. Très concrètement, cela signifie qu’une saisine préalable du Conseil constitutionnel aurait rendu impraticable ce délai. On pourra toujours faire remarquer que les délais étaient connus depuis l’examen en commission mixte paritaire, une dizaine de jours auparavant, ou que la date habituelle de communication des conditions générales de vente (CGV) pour les produits de grande consommation (PGC), au plus tard trois mois avant le 1er mars, ne se trouve pas modifiée de manière significative. Considérant néanmoins les lourdes sanctions prévues en cas de défaut de communication dans les délais, il est douteux que cette précipitation soit propice à instaurer un climat de confiance et d’apaisement des négociations commerciales à venir. Le législateur n’a toutefois pas modifié le délai de réponse par le distributeur à la suite de l’envoi des conditions générales : délai raisonnable pour les conventions PGC ; délai d’un mois pour les produits alimentaires et agricoles.
En revanche, la date limite de conclusion des accords est avancée du 1er mars au 15 ou au 31 janvier, respectivement pour les fournisseurs réalisant un chiffre d’affaires inférieur, ou supérieur ou égal à 350 millions d’euros hors taxes. Le législateur permet ainsi de maintenir la pratique d’un premier temps de négociations entre les distributeurs et les plus petits fournisseurs, avant un second temps avec les plus importants d’entre eux.
La prise d’effet des nouveaux accords aura lieu au plus tard au lendemain de la date de fin des négociations, soit respectivement le 16 janvier ou le 1er février. Où l’on voit la portée très limitée, pour les consommateurs, de cette loi dont l’effet sera, au mieux, d’avancer d’un mois d’éventuelles baisses de prix obtenues par les distributeurs lors des négociations.
Puisque la loi n’a pas pour objet de modifier le principe d’annualité des conventions entre fournisseurs et distributeurs, ni d’avancer définitivement leur tenue, il fallait nécessairement déroger à la durée d’un, deux ou trois ans normalement applicable.
Les conventions 2024 auront donc une durée légèrement plus longue, leur terme étant fixé au jour précédant la fin des négociations commerciales, c’est-à-dire le 28 février 2025, voire le 28 février 2026 ou 2027 dans l’hypothèse de conventions pluriannuelles.
Le non-respect du calendrier est sanctionné par une amende administrative dont le montant ne peut excéder, par infraction constatée, 200 000 € pour une personne physique et 5 000 000 € pour une personne morale. Il faut cependant réserver la conclusion ultérieure de conventions logistiques, lesquelles peuvent être différées après la conclusion de la convention annuelle. Un distributeur pourrait alors préférer ne pas conclure d’accords ? Ce serait méconnaître le dispositif prévu en cas d’échec des négociations depuis la loi du 30 mars 2023.
La loi du 17 novembre 2023 se borne à modifier le calendrier des négociations commerciales. Mais elle a pour effet d’avancer la mise en œuvre de la loi Descrozaille, qui entraîne des conséquences importantes dans l’hypothèse d’un échec des négociations entre les opérateurs.
Responsabilité en cas d’échec provoqué. Rappelons que les négociations commerciales doivent être conduites de bonne foi. Cette règle de droit commun, désormais reprise à l’article L. 441-4, IV, du code de commerce, prend une valeur particulière en matière de négociation commerciale. Est en effet sanctionné, depuis la loi du 30 mars 2023, le fait « de ne pas avoir mené de bonne foi les négociations commerciales conformément à l’article L. 441-4, ayant eu pour conséquence de ne pas aboutir à la conclusion d’un contrat dans le respect de la date butoir » prévue à l’article L. 441-3. En l’occurrence, cette date butoir est, pour l’année 2024, avancée au 15 ou 31 janvier suivant les fournisseurs. En d’autres termes, les distributeurs devront veiller à ne pas faire échec de mauvaise foi à la conclusion d’un accord, ce qui pourrait s’entendre de la situation où aucune proposition sérieuse n’est faite pour répondre aux demandes du fournisseur. Le montant de l’amende administrative est de nouveau particulièrement dissuasif.
L’enjeu est d’autant plus important qu’en l’absence d’accord au terme de la relation contractuelle en cours, avancé au 15 ou 31 janvier par l’effet de la loi, le contrat, à durée déterminée, prend fin. Néanmoins, dès lors qu’une relation commerciale établie peut être caractérisée entre les parties, ce qui s’inférera couramment de la succession de contrats à durée déterminée, l’échec des négociations pourra être qualifié de rupture brutale, au sens de l’article L. 442-1, II, du code de commerce. Or précisément, l’article 9 de la loi du 30 mars 2023 prévoit un dispositif spécifique, rendu spécialement applicable aux négociations 2024. Suivant la date butoir des négociations, 15 ou 31 janvier 2024, et à défaut d’accord, le fournisseur pourra, à son choix, mettre fin à la relation commerciale, sans risquer de se voir reprocher une rupture brutale, ou demander l’application d’un préavis conforme à l’article L. 442-1, II, du code de commerce.
L’application d’un tel préavis, dans l’attente d’un éventuel nouvel accord, conduirait à fixer un prix qui tienne compte « des conditions économiques du marché sur lequel opèrent les parties ». Le fournisseur pourrait également saisir le médiateur des relations agricoles ou le médiateur des entreprises afin de conclure sous son égide un accord au plus tard le 29 février 2024. La détermination du prix au cours du préavis, avec ou sans le recours à la médiation, demeure à ce stade sujette à de nombreuses incertitudes. Il ne s’agit pas, pour le fournisseur, de conserver purement et simplement le prix initialement convenu. Dans un contexte d’inflation, ce qui était le cas au moment de l’adoption de la loi Descrozaille, le dispositif avait pour objectif de ne pas permettre aux distributeurs de mettre la pression sur les fournisseurs en conservant leur approvisionnement, pendant la durée du préavis, au tarif 2022. Mais si le prix des matières premières a effectivement baissé depuis lors, c’est à une application inversée que devront faire face les parties.
En résumé, au-delà des apports pratiques au calendrier des négociations commerciales 2024, la loi du 17 novembre 2023 n’opère pas de changement à la procédure issue de la loi Descrozaille. S’il n’y a rien d’étonnant à ce que le jeu des négociations commerciales suscite de la tension entre les parties, particulièrement dans un contexte de forte volatilité des prix, la réaction du législateur, particulièrement prompte, sinon véritablement urgente, suggère que le droit des négociations commerciales est désormais devenu un terrain d’expression privilégié pour la communication des pouvoirs publics.
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