Le "conclave" sur les retraites bouscule le lien entre démocratie sociale et démocratie politique

Le "conclave" sur les retraites bouscule le lien entre démocratie sociale et démocratie politique

07.07.2025

Gestion du personnel

Alors que le "conclave" sur les retraites a abouti à un désaccord, Guy Groux, sociologue au sein du Centre de recherches politiques de Sciences-Po (Cevipof), analyse la manière dont cet exercice inédit a modifié les relations entre démocratie sociale et démocratie politique.

En quoi ce "conclave" a-t-il bousculé les liens traditionnels entre la démocratie sociale et la démocratie politique ?

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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La loi Larcher de 2008 a été une grande avancée pour la démocratie sociale en permettant aux partenaires sociaux d'élaborer des accords collectifs au niveau interprofessionnel qui puissent être repris par le Parlement. Avec le conclave, c'est de tout autre chose dont il s'agit. Réuni à l'initiative du Premier ministre, François Bayrou, ce dernier s'est engagé, s'il y a un accord, à le porter devant le Parlement et, s'il n'y a pas d'accord, à reprendre les points qui ont fait plus ou moins consensus entre les partenaires sociaux. Nous ne sommes plus dans le registre de la loi Larcher. 

Le pouvoir politique a-t-il pesé davantage sur la démocratie sociale avec cette nouvelle méthode ?

En France, il ne s'agit pas d'une démocratie sociale comme on en connaît dans certains pays d'Europe du Nord. C'est une démocratie sociale qui est à la fois un complément de la démocratie politique car elle peut influencer le droit mais d'un autre côté, elle reste soumise ou dépendante du pouvoir politique avec un Etat très centralisateur qui a face à lui des partenaires sociaux qui généralement sont faibles, notamment du côté syndical. Le conclave est un cas caricatural de l'intervention du politique dans la démocratie sociale puisque dès le début du processus du conclave, beaucoup l’ont analysé comme une opération politique de François Bayrou face aux pressions du PS et à une éventuelle motion de censure. Même la reprise annoncée de certaines dispositions dans le prochain PLFSS à l'automne prochain permet de rallonger le débat de trois, quatre mois. François Bayrou a cherché à marquer des points autant sur le terrain politique que sur le terrain social.

D'un point de vue du dialogue social, certains ont salué une nouvelle méthode. Qu'en pensez-vous ?

Effectivement, on a pu se demander si inviter les partenaires sociaux à se réunir pendant trois mois dans un lieu - le conclave - n'a pas constitué une nouvelle avancée au moins méthodologique des rapports contractuels entre les partenaires sociaux. L'examen des diverses péripéties qui ont marqué le conclave montre qu'on peut en douter. Deux syndicats parmi les plus importants - FO et la CGT - ont quitté le conclave très tôt parce qu'ils disaient qu'il n'y avait rien à négocier, le gouvernement et le Medef refusant d’envisager un retour aux 62 ans. Dès lors, la négociation se déroulait dans des conditions qui affaiblissaient la partie syndicale mais également si un accord avait été signé, sa portée. D’où des conditions très précaires et qui l’étaient a priori car le conclave fut mis en place dans une situation économique et mondiale très incertaine qui pèse lourdement sur beaucoup d’entreprises.

Florence Mehrez
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