Les opérations de visites et de saisies réalisées en 2017, pour suspicions de pratiques anticoncurrentielles réalisées par le Conseil supérieur du notariat (CSN), pourraient être annulées via une question prioritaire de constitutionnalité. Mais un grain de sable enraye la machine.
« Nous sommes là et peut-être n’avons-nous aucune raison de l’être puisque cette instance n’existe pas ». Devant la cour d’appel de Paris, mercredi 12 avril, Fayrouze Masmi-Dazi, avocate associée de Frieh Associés, « défend l’intervention volontaire de son client, la société Notariat Services, et notamment la nullité » du recours constitutionnel entamé par le Conseil supérieur du notariat (CSN), l’Association pour le développement du service notarial (ADSN) et ses « filiales commerciales ». Ces trois entités tentent, en effet, d’obtenir la nullité des opérations de visites et saisies réalisées à la demande de l’Autorité de la concurrence au mois d’octobre 2017 - et acceptées par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris - afin de rechercher les preuves de pratiques anticoncurrentielles entre ces opérateurs. L’affaire, dont le seul volet procédural est pour l’instant débattu entre les conseils, pose déjà d’intéressantes questions de droit.
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Depuis 2017, l’Autorité de la concurrence mène une enquête sur de potentielles pratiques anticoncurrentielles, enquête qui n’est pour le moment pas close. « Ventes liées, pratiques d’évictions, boycott » et « confusion entre les instances notariales et l’ADSN » seraient suspectées par l’Autorité, précise Me Masmi-Dazi. D’où les perquisitions réalisées le 17 octobre 2017. Sa cliente, la société Notariat Services, est un « concurrent direct » de l’ADSN et de ses filiales. Le « groupe conçoit et réalise divers outils de communication pour les notaires : sites internet, logiciels, objets publicitaires et prestations graphiques », peut-on lire sur son site. Même chose du côté de l’ADSN et de ses filiales, comme Min.not, spécialisée dans la multidiffusion d’annonces immobilières, Real.not qui réalise des services technologiques pour les notaires, Publi.not, une agence de communication, ou encore Media.not qui les accompagne dans leur mission de service public. Serait donc potentiellement reproché au CSN, à l’ADSN et à ses filiales, le fait d’être « en cheville » sur l’offre de services aux notaires et de porter atteinte à la concurrence sur ce marché.
La rue de l’Échelle n’a pas encore rendu sa décision mais Notariat Services, en tant que potentielle victime des pratiques anticoncurrentielles, n’entend pas l’attendre pour défendre ses intérêts. D’où « la situation un peu inédite », décrite par le juge de la cour d’appel de Paris ce mercredi-là. Le CSN, l’ADSN et ses filiales ne contestent, pour l’instant, que la légalité des opérations de visites et saisies réalisées en 2017. Et pour obtenir leur nullité, un des moyens développés par Bredin Prat, qui les représente, consiste à porter l’affaire devant le Conseil constitutionnel. Pourquoi ? Afin de « contester la conformité à la Constitution de la disposition qui constitue le fondement des opérations de visites et saisies », explique à la barre Yoann Boubacir, collaborateur du cabinet. Car l’article L 450-4 du code de commerce ne respecterait pas le secret professionnel dont devraient jouir les notaires, selon les conseils du CSN et du groupe ADSN. Pas moins d‘une mais deux questions pourraient donc faire jurisprudence dans ce dossier : celle de l’intervention volontaire d’une potentielle victime de PAC à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) et le sujet de la QPC en lui-même.
Pour l’avocat général, l’action de Notariat Services doit être déclarée irrecevable, car la société n’est pas partie à l’affaire. « La Constitution prévoit la recevabilité d’une QPC s’il y a un intérêt dans le cadre du recours au fond ». Notariat Services n’ayant pas été perquisitionnée, le groupe ne peut donner son point de vue sur la QPC déposée le 19 janvier dernier par le CSN, l’ADSN et ses filiales. Même argument exposé par Yoann Boubacir. « A aucun moment la situation de Notariat Services ne sera affectée ni de près ni de loin » par la décision du juge de renvoyer l’affaire devant les sages ou non. Et il ajoute que le réel objectif poursuivi par Notariat Services, serait d’accéder au dossier de l’affaire couvert par « le secret de l’instruction ».
Mais Me Masmi-Dazi ne se démonte pas. Intervenir volontairement à la QPC lui permettrait d’obtenir sa nullité dont elle est convaincue. Tout d’abord du fait d’une irrégularité de fond. La question aurait été déposée par un notaire n’étant plus, « le jour J », président en exercice du CSN et n’ayant ainsi plus de qualité à agir. Second élément défendu par l’associée, un seul mémoire en QPC aurait été déposé pour le CSN, l’ADSN et ses filiales. « Une confusion des genres » à nouveau... Or, le groupe ADSN n’aurait « aucune qualité à agir, au nom des notaires de France, pour défendre des garanties procédurales à leur accorder ou non ». Car les notaires sont « les clients sur un marché concurrentiel. Sinon ce serait presque remettre en cause le monopole du CSN en qualité de représentant des notaires de France après des juridictions ! ».
Si Notariat Services obtient le droit d’intervenir volontairement à l’instance, son objectif est donc de voir le procès se poursuivre au fond. Résultat de cette première manche le 15 mai prochain.
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