Le groupe d'experts sur le Smic recommande moins de revalorisations automatiques

Le groupe d'experts sur le Smic recommande moins de revalorisations automatiques

05.12.2018

Gestion du personnel

Le groupe d'experts sur le Smic a finalisé son rapport annuel sur l'évolution du salaire minimum. S'il ne délivre pas de recommandations cette année sur un éventuel "coup de pouce" au Smic, il estime toutefois nécessaire de mettre un terme aux revalorisations automatiques en laissant ainsi plus de marges de manoeuvre aux pouvoirs publics et aux partenaires sociaux de branche.

Le groupe d'experts sur le Smic a transmis hier son rapport à la Commission nationale de la négociation collective. Dans ce document que nous nous sommes procuré, le groupe d'experts renouvelle sa proposition formulée l'an dernier de modifier les règles de réévaluation du Smic. D'autres recommandations vont dans le même sens : à savoir donner plus de latitude au gouvernement dans la fixation du salaire minimum et - partant - aux partenaires sociaux.

Pas de recommandations à la suite de l'annonce du Premier ministre

Une fois n'est pas coutume, cette année le groupe d'experts ne formulera pas de recommandations à destination du gouvernement. Et pour cause, le Premier ministre a d'ores et déjà annoncé le 28 novembre dernier, qu'il n'y aurait pas de coup de pouce supplémentaire au Smic en dehors de la revalorisation légale. Une annonce confirmée - en creux - hier lors de son discours sur les mesures décidées à la suite du mouvement des "gilets jaunes" (encadré ci-dessous). Une absence de coup de pouce que le groupe d'expert juge toutefois pertinente : "du fait de la surprise inflationniste liée en grande partie à l'augmentation des prix de l'énergie, la revalorisation automatique amènera le Smic à bénéficier cette année d'une augmentation supérieure à la progression de l'indice salarial retenu comme référence (...) Il faut remonter à 2008 pour retrouver une situation d'ailleurs à une échelle moindre".

Circonscrire au maximum les revalorisations automatiques

Les principales propositions du groupe d'experts visent toutefois à donner plus de latitude au gouvernement et aux négociateurs de branche.

Le groupe d'experts renouvelle sa recommandation de l'an dernier de réviser la formule de revalorisation du Smic, soit en supprimant les deux termes de la revalorisation automatique (l'inflation et la moitié du SHBOE *), soit en supprimant le seul second terme et en conservant une indexation sur l'inflation. "Les modalités de revalorisation automatique nourrissent une certaine circularité entre les hausses du Smic et celles des salaires : les hausses du Smic ont des effets en chaîne sur les minima salariaux de branches et en conséquence sur les salaires de base et les salaires effectifs, et les hausses des salaires effectifs se reportent elles-mêmes, via précisément les modalités de revalorisation automatique, sur le Smic. Cette circularité peut être modérée en période d’inflation basse, mais elle pourrait être forte en cas de reprise inflationniste", explique le rapport. "Les deux options de réforme donneraient une responsabilité accrue aux pouvoirs publics concernant la revalorisation du Smic. Cette dernière pourrait aussi mieux s’articuler avec l’évolution d’autres dispositifs comme la prime d’activité pour lutter contre la pauvreté laborieuse".

Le groupe d'experts estime qu'une telle réforme permettrait également de renforcer le rôle de la négociation collective dans la définition des normes salariales, en particulier dans les branches, surtout dans le contexte actuel de leur restructuration.

Le rapport va toutefois plus loin et suggère également de supprimer la hausse automatique du Smic lorsque l'inflation dépasse 2 % et ce, à tout moment de l'année. Le risque, selon les experts, est que cette hausse "percute les minimas de branche dont les négociations sont annuelles". A la place, ils proposent que, dans le cas où une inflation imprévue et durable, en cours d'année, est susceptible de conduire à une détérioration jugée trop forte du pouvoir d'achat du Smic, il serait possible de procéder à une révision discrétionnaire sur laquelle le groupe d'experts serait consulté.

Privilégier la prime d'activité plutôt que le Smic pour lutter contre la pauvreté

Le groupe d'experts estime que le Smic s'avère peu adapté pour lutter efficacement contre la pauvreté et mise plutôt sur la prime d'activité. D'une part, "parce que dans les ménages dont au moins un membre travaille, les situations de pauvreté sont la conséquence de la faible durée travaillée (temps partiel ou interruptions de travail dans l'année) plutôt que de la faiblesse du salaire horaire". D'autre part, "du fait de l'interaction avec le système socio-fiscal, une hausse du Smic ne se transmet que partiellement au revenu disponible des ménages rémunérés au Smic : elle est partiellement ou totalement compensée par la hausse des prélèvements et la baisse des prestations sociales (prime d'activité, aides au logement, RSA)".

Le rapport en conclut que la revalorisation du montant de la prime d'activité bénéficie davantage aux ménages modestes qu'une hausse du Smic.

Revoir la fonctionnement du groupe d'experts

Plus de marge de manoeuvre pour les pouvoirs publics, pour les partenaires sociaux, mais aussi pour les experts eux-mêmes ! C'est en substance ce que recommande le rapport qui formule des idées pour faire évoluer le groupe d'experts sur le Smic. "Parallèlement, ces options de réforme du Smic donneraient plus de responsabilité au groupe d’experts dans ses préconisations qui, s’appuyant sur les évaluations disponibles, pourraient porter sur l’évolution souhaitable du salaire minimum".

Il est notamment envisagé d'accorder plus d'espace pour les partenaires sociaux : "en France, dans l’hypothèse d’une réforme de la revalorisation automatique du Smic, il conviendrait d’associer davantage des représentants des partenaires sociaux aux travaux et réflexions. L’existence d’une commission est très importante pour contribuer à « dépolitiser » les décisions concernant les revalorisations du salaire minimum. Dans l’hypothèse d’un élargissement de la commission, cet objectif appellerait la recherche de compromis. Par ailleurs, il serait souhaitable que le groupe soit doté de moyens lui permettant de financer des recherches, à l’instar des commissions existant dans des pays comme l’Allemagne, le Royaume-Uni ou l’Irlande".

 

Pas de "coup de pouce" au Smic dans les mesures annoncées hier par le Premier ministre

A l'issue de près de trois semaines de conflit, le Premier ministre a annoncé hier, afin de satisfaire certaines des revendication des "gilets jaunes", un moratoire de six mois sur ces trois mesures qui devaient initialement entrer en vigueur au 1er janvier 2019 :

  • la hausse de la taxe carbone, sur l'essence, le fioul et le diesel ;
  • la convergence de la fiscalité du diesel avec celle de l'essence ;
  • et pour les professionnels, l'alignement sur la fiscalité des particuliers de la fiscalité du gazole des entrepreneurs non routiers (GNR).

Par ailleurs, Edouard Philippe a demandé aux ministres concernés de réunir les partenaires sociaux et les élus locaux afin qu'ils étudient ensemble "les meilleurs manière d'aider les personnes qui travaillent loin de leur domicile, notamment une meilleure prise en charge des transports, notamment hors des villes, sous la forme d'une prime mobilité".

En revanche, pas de "coup de pouce" sur le Smic, en plus de la revalorisation légale, malgré la formulation ambigüe du Premier ministre qui  a déclaré hier : "Avec la prime d'activité et l'augmentation du Smic au 1er janvier, nous aurons une hausse de plus de 3 % du Smic net, c'est-à-dire une des plus importantes de ces 25 dernières années". Il faut bien distinguer en effet dans ce chiffre ce qui relève de la hausse de la prime d'activité, de la baisse des cotisations sociales sur les salaires et de la revalorisation légale du Smic.

 

(*) Le pouvoir d'achat du salaire horaire de base des ouvriers et des employés.

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La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Florence Mehrez
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