Le nouveau CSE dans la fonction publique hospitalière : révolution ou statu quo ?

Le nouveau CSE dans la fonction publique hospitalière : révolution ou statu quo ?

10.09.2023

Gestion du personnel

Dans cette chronique, Sophie Rousseau, responsable de mission Secafi et Associée du Groupe Alpha livre l'un des premiers bilans sur la création des comités sociaux d’établissement (CSE) des hôpitaux et des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) publics, prévue par la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Pour l'heure, les tâtonnements sont nombreux.

Créés par la loi du 6 août 2019 dans son chapitre : "Promouvoir un dialogue social plus stratégique et efficace dans le respect des garanties des agents publics", les comités sociaux d’établissement (CSE) des hôpitaux et des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS) publics, issus de la fusion du CTE et du CHSCT, sont entrés en fonction le 1er janvier 2023.

Quels premiers constats après plus de six mois de mise en place ? Tout d’abord, nous constatons que la mise en œuvre opérationnelle du nouveau CSE a souvent mené les représentants du personnel et la direction à se concerter sur des sujets comme la révision du règlement intérieur, la mise en place d’un agenda social au travers de la programmation annuelle des réunions et, idéalement, du cadencement des thématiques à traiter. Une façon de nouer ou de renouer le dialogue face à la nouveauté des textes pour chaque acteur, avec parfois un échange sur les sujets de fond : les moyens, les missions, les conditions de travail.

Création de la Formation spécialisée en santé sécurité conditions de travail

Alors, quel premier bilan ? Selon le statut de votre interlocuteur (praticien du droit, direction opérationnelle, représentant du personnel), selon la qualité des relations sociales et les sujets en cours, la réponse à cette question va forcément varier…

Par exemple, Isabelle, membre titulaire du CSE et de la F3SCT de son centre hospitalier de 2 000 agents, nous indique ressentir une forme de désillusion… Pensant commencer ce nouveau mandat sur de "nouvelles bases", elle constate peu de changement dans les relations sociales. De plus, elle nous fait part de la difficulté de se positionner en Formation spécialisée : sur la forme, tout d’abord, en raison de la concentration des temps de réunion, "un temps de réunion CSE, puis un temps de réunion F3SCT sur une seule journée, au cours de laquelle les sujets à traiter doivent s’enchaîner rapidement", et sur le fond, avec un flou ressenti concernant la répartition et l’articulation des sujets entre CSE et F3SCT. La fluidification du dialogue social initialement recherchée ne va pas de soi.

De fait, la clé réside dans la disparition du CHSCT, instance qui disposait de sa propre personnalité morale, et son remplacement par la Formation spécialisée en santé sécurité conditions de travail (appelée par tous "F3SCT") du CSE. Certes, les grandes missions du CHSCT en santé et sécurité ont été conservées et la F3SCT dispose encore de la faculté de rendre des avis. Mais des contraintes plus fortes dans l’exercice des missions des représentants du personnel, voire des reculs, sont inscrites dans les textes réglementaires.

Alors qu’un CHSCT était mis en place dès 50 agents, le seuil de création de la F3SCT est relevé à 200 agents, sauf risques spécifiques identifiés. Les "petits" établissements, dont des Ehpad (établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) publics autonomes, ne disposent plus d’instance spécifique spécialisée en santé, sécurité et conditions de travail. Dans ce cas, ces missions reviennent alors aux membres du CSE, gonflant d’autant leur charge et risquant, à terme, de porter atteinte à leurs missions.

Il est aussi à souligner que les représentants du personnel de la F3SCT ne sont plus les seuls à décider du recours à un expert certifié en cas de risque grave ou de projet important : le président de la formation peut s’y opposer, mais il doit motiver "substantiellement" son refus. Une nouvelle règle de consultation sur les projets est également à noter : les projets s’intégrant dans une réorganisation de service doivent être examinés directement par l’assemblée plénière du CSE, à l’instar des deux autres versants de la fonction publique, mais sans logique ni définition propre à l’hôpital.

Ces évolutions interrogent à l’heure où les conditions de travail et la sécurité à l’hôpital et dans les ESMS (établissements et services sociaux et médico-sociaux) sont plus que jamais d’actualité. Dans la pratique, un dialogue social de qualité veillera à ne pas laisser ces contraintes rigidifier le travail de fond de la F3SCT.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Des nouveaux outils de travail à parfaire...

Du côté du CSE, nous en sommes encore à la promesse… Nous avons trouvé particulièrement intéressants les nouveaux outils de travail du CSE en matière de politique sociale, avec la mise en place, à partir de 2023, d’une base de données sociales et d’un rapport social unique nettement enrichi par rapport au bilan social. Mais ces outils ne sont généralement pas encore finalisés et ils demanderont certainement beaucoup d’efforts de la part des services des ressources humaines…

Par ailleurs, les sujets de consultation du CSE se sont renouvelés et s’intègrent désormais dans une vision plus large de la stratégie sociale, regroupant les enjeux de GPEC, d’égalité professionnelle et de lutte contre les discriminations, de télétravail, de déconnexion, de promotion, de formation, de maintien dans l’emploi. En revanche, il n’y a pas d’innovation dans les champs stratégiques et économiques, marquant toujours un grand écart par rapport au privé. Et de manière plus générale, les avis du CSE sont réduits à être "favorables ou défavorables", les textes ne prévoyant pas que le CSE motive son avis ou émette des « vœux » à l’instar du privé. Pour autant, rien n’empêche les élus d’expliquer les raisons de leur vote.

... Mais pas de moyens financiers supplémentaires

Il est regrettable que la mise en œuvre de ce nouveau cadre, nécessitant une analyse pointue de la part des représentants du personnel, ne se soit pas accompagnée de nouveaux moyens pour le CSE : aucun budget de fonctionnement n’est prévu, contrairement au privé, alors que ce budget aurait pu permettre aux membres du CSE de se faire accompagner par des spécialistes. Cette question des moyens nous paraît essentielle, en y intégrant également les enjeux de formation des nouveaux élus.

Au-delà des nouveaux textes, ce sera bien dans la pratique que se joueront la qualité et l’efficacité du dialogue social dans les nouvelles instances de la fonction publique hospitalière. Les termes de "partenaires sociaux" devront faire sens à l’heure de mobiliser l’ensemble des acteurs pour l’amélioration de l’attractivité et des conditions d’exercice des métiers du soin et du social ausein des structures publiques.

Sophie Rousseau
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