Le projet de loi Travail ne prévoira qu'un barème indicatif en cas de licenciement injustifié

Le projet de loi Travail ne prévoira qu'un barème indicatif en cas de licenciement injustifié

15.03.2016

Gestion du personnel

C'est finalement le référentiel indicatif d'indemnités de licenciement prévu dans la loi Macron qui sera recyclé dans le projet de loi Travail. Exit le barème obligatoire. Afin de donner plus de cohérence au dispositif, le barème applicable devant le bureau de conciliation depuis 2013 sera révisé. Explications et décryptage.

Le Premier ministre a présenté hier les modifications que le gouvernement compte apporter à l'avant-projet de loi Travail. Le texte modifié a été transmis hier au Conseil d'Etat. La date de présentation en Conseil des ministres n'est pas modifiée, ce sera toujours le 24 mars. Nous reviendrons en détail sur ces modifications lorsque l'avant-projet de loi sera diffusé. Une chose est sûre, ce n'est pas dans le cadre du projet de loi Travail que le barème d'indemnités obligatoire verra le jour ! Après avoir été censuré une première fois cet été par le Conseil constitutionnel, non pas dans son principe, mais en raison du critère de la taille de l'entreprise, le gouvernement y renonce une nouvelle fois. Volontairement cette fois. C'est ce qu'a annoncé le Premier ministre hier, après la réunion de restitution aux partenaires sociaux, sur les modifications apportées à l'avant-projet de loi. Le gouvernement avait pourtant tiré les leçons de la décision des Sages et élaboré un nouveau barème d'indemnités en ne tenant compte que du critère de l'ancienneté. Mais c'était sans compter la fronde des organisations syndicales - dont la CFDT - qui ont toutes demandé son retrait au grand dam du patronat. Finalement, c'est le référentiel indicatif de la loi Macron, laissé en jachère, qui va retrouver une nouvelle jeunesse !

Le référentiel indicatif déjà prévu par la loi Macron

Le projet de loi Macron prévoyait en effet deux dispositifs bien distincts : un barème d'indemnités obligatoire en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, introduit tardivement au cours de l'examen du texte, et un référentiel d'indemnités censé le compléter. Ce référentiel peut être utilisé devant le bureau de jugement si les parties en font conjointement la demande. Toutefois, il n'est toujours pas en vigueur car il suppose la publication d'un décret pris après avis du Conseil supérieur de la prud'homie. La publication du décret avait été retardée car le projet de loi porté par Myriam El Khomri avait prévu de le modifier afin de le mettre en cohérence avec le barème obligatoire. Au lieu de prendre en compte trois critères : l'ancienneté, l'âge et la situation du demandeur par rapport à l'emploi, comme le prévoit la loi Macron, seul le critère de l'ancienneté est maintenu dans l'avant-projet de loi Travail.

Gestion du personnel

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- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
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Un barème applicable devant le bureau de conciliation et le bureau de jugement

C'est donc ce référentiel indicatif qui va remplacer le barème obligatoire. Mais les arbitrages n'ont pas encore été rendus, ni sur les critères finalement retenus ni sur les montants, explique-t-on dans l'entourage du Premier ministre. Surtout, le gouvernement souhaite l'harmoniser avec le barème d'indemnités applicable devant le bureau de conciliation, créé par la loi de sécurisation de l'emploi du 14 juin 2013, et en vigueur depuis le 8 août 2013. Ce barème dont l'objectif était de favoriser le succès de la conciliation devant les conseils de prud'hommes prévoit le versement d'une indemnité forfaitaire dont le montant dépend de l'ancienneté du salarié. Son application vaut alors renonciation des parties à toute réclamation et indemnités relatives à la rupture du contrat de travail.

Les montants prévus sont les suivants :

  • Ancienneté inférieure à 2 ans : 2 mois de salaire ;
  • Ancienneté entre 2 ans et moins de 8 ans : 4 mois de salaire ;
  • Ancienneté entre 8 ans et moins de 15 ans : 8 mois de salaire ;
  • Ancienneté entre 15 ans et 25 ans : 10 mois de salaire ;
  • Ancienneté supérieure à 25 ans :  14 mois de salaire.

Seul hic : ce barème n'est quasiment pas appliqué ! Le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, l'a reconnu hier lors de la conférence de presse : "Le barème n'a pas fonctionné car il est trop bas ; il n'y a donc pas de compromis". L'idée est donc de le rendre "plus attractif" et, au passage, d'assurer l'effectivité du référentiel indicatif applicable devant le bureau de jugement. "Nous allons refondre les deux barèmes pour qu'ils soient plus attractifs et qu'ils fonctionnent".

Uniformiser les décisions de justice

Ce sont donc bien deux référentiels indicatifs qui vont cohabiter : le premier devant le bureau de conciliation, le second devant le bureau de jugement. Ils seront tous les deux revalorisés tous les deux ans par le Conseil supérieur de prud'homie. C'est en tous les cas ce que souhaite Emmanuel Macron. Manuel Valls espère, même si le barème ne sera pas obligatoire pour les juges, qu'il permette "d'uniformiser le montants des dommages-intérets d'une région à l'autre", et d'avoir "des décisions de justice plus homogènes". Ce barème devra être "un guide pour accompagner les juges et non un carcan impératif", a-t-il insisté. Il devra donner "plus de visibilité pour les entreprises et permettre aux salariés une parfaite préservation de leur situation individuelle".

Toutefois, Emmanuel Macron n'a pas dit son dernier mot sur un barème obligatoire. Le ministre de l'économie compte sur le succès des barèmes indicatifs pour attester du bien-fondé de la mesure et glisser vers un dispositif plus contraignant. "Si cela donne une plus grande visibilité, nous convaincrons que le plafonnement est une bonne chose".

Florence Mehrez
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