Le référent handicap : un rôle stratégique auprès des RH

Le référent handicap : un rôle stratégique auprès des RH

08.04.2019

Gestion du personnel

Rendu obligatoire depuis septembre 2018 au delà de 250 salariés, le référent handicap est un acteur-clé de la politique de l'entreprise. Son positionnement doit lui permettre de participer aux évolutions opérationnelles et des les influencer. Explications avec Karine Gros et Gérard Lefranc, membres de l'équipe de formation du DIU "référent handicap" de l'université de Créteil.

Un nouvel article s'est glissé depuis septembre dernier dans le code du travail, sous l'impulsion de la loi Avenir professionnel. Il rend obligatoire, dans les entreprises de plus de 250 salariés, la désignation d'un référent handicap "chargé d'orienter, d'informer et d'accompagner les personnes en situation de handicap". L'utilité de cet article L. 5213-6-1 peut paraître discutable, les grandes entreprises françaises s'étant souvent déjà emparées du sujet il y a plusieurs années. Gérard Lefranc est directeur de la mission insertion chez Thales. Pour lui, l'adoption de l'amendement du député Adrien Taquet sur le référent handicap n'est pas révolutionnaire. "Cela n'a fait que conforter la vision que nous avions il y a quinze ans. Toutefois, cela montre aux entreprises que le référent handicap est un vrai métier, une fonction sur laquelle on peut compter."

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
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L'entrée dans la loi du référent handicap répond donc finalement à un enjeu plus subtil, celui de sa professionnalisation. La personne chargée d'incarner la question du handicap dans l'entreprise doit être suffisamment outillée pour que l'entreprise puisse se reposer sur elle. "Ce qu'il manquait aux référents handicap, c'était un profil métier", explique Karine Gros, maître de conférences en sciences humaines à l'université Paris-Est-Créteil. Cette spécialiste du handicap et de l'emploi a publié, le 6 mars 2019, un ouvrage pédogogique intitulé "Professionnaliser le référent handicap" (*). Elle est également co-responsable du diplôme interuniversitaire (DIU) "référent handicap, secteur privé, secteur public", dans lequel intervient Gérard Lefranc. Ce cursus de douze jours est sollicité depuis 2015 par des entreprises et des organismes publics afin de former leur personnel au rôle de référent handicap.

Le référent handicap, un rôle sur mesure

"Grâce à l'amendement Taquet, nous remarquons que certains de nos étudiants obtiennent davantage de moyens de la part de leur entreprise pour exercer leur mission, poursuit Karine Gros. Nous constatons une plus forte expression de besoins de formation, et nous reçevons de plus en plus de sollicitations pour monter des diplômes "à la carte", spécifiques à la situation de l'entreprise. Nous sommes par exemple en train de monter une formation spéciale pour le ministère de la justice."

Le référent handicap doit construire son équipe : managers, recruteurs, CSE, organismes publics... 

Les entreprises sollicitent également, dans le cadre du DIU, des formations courtes de un à deux jours, à destination du personnel qui cotoie quotidiennement les référents handicap (ressources humaines, direction...). L'objectif est de mieux comprendre l'action du référent handicap, dont les missions ne sont pas précisément définies par la loi. "Le référent handicap favorise l'insertion et le maintien dans l'emploi des personnes handicapées, résume Karine Gros. Il doit pour cela identifier les besoins spécifiques dans l'entreprise, définir les réponses à apporter et assurer le suivi de la politique globale handicap. Pour autant, il ne peut pas agir seul. Il doit construire une équipe pluriprofessionnelle composée d'acteurs internes (managers, recruteurs, médecine du travail, comité économique et social) et externes (Agefiph, maison départementale des personnes handicapées, etc.)."

Les tâches peuvent être très différentes entre deux référents handicap, notamment en fonction du temps dont ils disposent. En effet, si certains référents handicap sont embauchés à temps complet, d'autres ne sont employés qu'à temps partiel. Certains sont même mutualisés entre plusieurs entreprises. Les grandes structures ont quant à elles tendance à disposer de plusieurs référents handicap, comme chez Thales où un référent a été placé sur chacun des 50 sites du groupe. Le rôle du référent handicap peut également varier selon qu'il soit rattaché, par exemple, au service de santé au travail ou à la direction des ressources humaines.

L'entreprise doit continuer à tourner

Gérard Lefranc, lui, est rattaché au directeur des ressources humaines au sein du groupe Thales. "Je trouve que cela permet d'avoir un vrai rôle stratégique, d'avoir la latitude et l'agilité nécessaire pour participer aux évolutions opérationnelles de l'entreprise. Par exemple, j'ai échangé hier avec le directeur des achats du groupe pour accorder la stratégie handicap avec la nouvelle stratégie des achats."

La première chose que je demande aux référents handicap que je forme est : où êtes-vous positionnés ? 

Le référent handicap peut également être placé auprès des structures opérationnelles. "Dans des ateliers de production par exemple, l'organisation du travail ou l'aménagement des locaux a des répercussions directes sur les salariés en situation de handicap, poursuit Gérard Lefranc. L'important est que l'entreprise fasse un choix conscient ; le référent handicap doit être positionné de façon à avoir un pouvoir d’influence. La première chose que je demande aux référents handicap que je forme est : où êtes-vous positionnés ? Au fond d'un petit bureau à côté de la photocopieuse ? Participez-vous au comité de direction ? Ils doivent avant tout observer leurs marges de manoeuvre et leviers d'action".

L'entreprise a tout intérêt à dôter son ou ses référents handicap de leviers suffisants. Car les situations de handicap en entreprise sont bien plus fréquentes qu'on ne le croit. "En France, une personne sur dix est en situation de handicap, et une sur six est en situation invalidante, détaille Karine Gros. Et 80 % des handicaps ou maladies s’acquièrent au fil de la vie, et donc durant la vie professionnelle. Lorsqu'un salarié est confronté à cette situation, son environnement de travail doit lui permettre de continuer à travailler et permettre à l'entreprise de continuer à tourner.

"Investir dans la formation des référents handicap est devenu incontournable, insiste la maître de conférences. Et aujourd'hui, on ne peut plus dire qu’on ne sait pas le faire."

 

(*) "Professionnaliser le référent handicap - Connaissances, compétences, savoir-être et savoir-faire", Karine GROS, ESF éditeur, Editions Législatives (auquel appartient actuEL-RH).


Laurie Mahé Desportes
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