Le Sénat propose de moderniser le dispositif de prévention des feux de forêts
10.08.2022
Environnement

Face aux limites de la stratégie de lutte contre les incendie appliquée aux feux hors norme, un rapport du Sénat propose une réflexion transversale, articulant prévention et lutte.
L’efficacité de la stratégie française de lutte est un modèle en Europe et dans le monde. Pour autant, cet atout ne lui suffira plus à faire face à l’augmentation du risque incendie et notamment à l’émergence de feux « hors normes » : la « guerre contre le feu » ne sera gagnée qu’au prix d’un effort impliquant toutes les politiques publiques et faisant une plus large part à la prévention.
Environnement
La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)
Tel est le message central du rapport de la mission de contrôle relative à la prévention et à la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie adopté, mercredi 3 août 2022, par la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable et la commission des affaires économiques du Sénat.
Depuis les années quatre-vingt, la stratégie française d'attaque massive sur feux naissants a fait ses preuves.
Cette réduction significative des surfaces brûlées est d’autant plus remarquable dans un contexte où l’indice de risque climatique et le combustible en forêt ont augmenté significativement. La France doit toutefois se préparer à une évolution défavorable du risque, structurellement causée par le réchauffement climatique et l’augmentation de la biomasse forestière.
Aggravation du risque incendie Quatre facteurs sont susceptibles d'aggraver le risque incendie :
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Le développement de feux de forêt hors norme met ainsi à mal la stratégie française de lutte contre les incendies. Parmi les plus grands incendies ayant touché la France ces 40 dernières années, trois se sont déclenchés en 2021 et 2022. Il s’agit des premiers incendies de plus de 5 000 ha depuis 2003. En cas de feux simultanés, comme en Gironde à l’été 2022, les coûts environnementaux et socio-économiques des incendies pourraient s’accroître de façon exponentielle.
L’efficacité de la stratégie de lutte qui a fait de la France un modèle partout en Europe et dans le monde ne suffira donc pas face à l’émergence de feux hors norme. C’est pourquoi les rapporteurs ont souhaité engager une réflexion transversale, articulant prévention et lutte, convaincus que la « guerre contre le feu » ne sera gagnée qu’en activant plusieurs leviers.
Compte tenu de l’évolution rapide du risque, l’élaboration d’une telle stratégie semble aujourd’hui inévitable. Son succès repose sur une amélioration des connaissances et des données relatives aux feux de forêt et de végétation. Il est ainsi proposer de mieux évaluer la « valeur du sauvé » pour mieux calibrer les moyens de prévention et de lutte contre l’incendie, qui devraient en tout état de cause être significativement accrus, avec un doublement des moyens alloués à la prévention.
Pour être pleinement acteur majeur de cette stratégie, l’ONF doit retrouver dès à présent des marges de manoeuvre et étendre son périmètre d’intervention. Les rapporteurs proposent de revenir sur les 500 suppressions de postes de l’ONF prévues d’ici à 2025, pour rétablir des postes d’agents de la protection de la forêt méditerranéenne et redéployer plus de personnels sur la défense des forêts contre l’incendie (DFCI) hors de cette zone.
La mise en oeuvre de cette stratégie devra nécessairement être déclinée par territoires, même dans ceux aujourd’hui moins exposés au risque incendie. Il est proposé d'encourager l’élaboration d’un plan de protection des forêts (PPFCI), pierre angulaire de la politique de prévention au niveau local, dans les territoires classés à risque d’incendie.
La moitié des feux ayant une origine humaine, il est proposer de lancer une campagne de communication sur la prévention au niveau des préfets et des élus à l’automne et à l’hiver, notamment en matière de débroussaillement.
Les pics de fréquentation estivaux dans les massifs du Sud de la France apportent leur lot de comportements imprudents, l’ensemble des touristes n’étant pas « acculturés au feu ». La mission propose ainsi de mobiliser le budget des collectivités territoriales pour recruter, former et équiper des jeunes du Service national universel (SNU), afin de prévenir et sensibiliser les usagers en forêt lors des périodes à risque.
Les activités pastorales et agricoles, créant des discontinuités de végétation, jouent le rôle de pare-feu protégeant la forêt. Cette « ligne Maginot » de la gestion doit pouvoir bénéficier des fonds européens et être exemptée d’indemnité de défrichement. Il faut veiller en parallèle sur l’interface forêt-terres agricoles, ces dernières étant aussi exposées au risque. Il est proposé que le préfet puisse prescrire la réalisation de travaux agricoles (moissons…) la nuit en cas de risque incendie « très sévère » et compenser le cas échéant les agriculteurs pour les coûts induits (hausse des charges, récolte détériorée).
Les obligations légales de débroussaillement (OLD) constituent une mesure essentielle de prévention contre les incendies, permettant d’en diminuer l’intensité et d’en limiter la propagation. Les OLD renforcent également la défendabilité des habitations. Elles sont malheureusement trop peu appliquées (taux de réalisation souvent inférieur à 30 %). Aussi est-il proposer d'adapter les modalités de mise en oeuvre du débroussaillement selon la nature du risque et la réalité des territoires.
Convaincus qu’une solution unique ne suffira pas à résorber le déficit de réalisation des OLD, les rapporteurs estiment qu’une palette large de leviers allant de la sensibilisation à la sanction, en passant par l’incitation, devra être mobilisée, notamment rendre la franchise obligatoire dans les contrats d’assurance habitation en cas de non-respect des obligations légales de débroussaillement et accroître son montant au-delà de la limite maximale actuellement prévue.
La biomasse forestière augmente régulièrement depuis les années 1980, moins de la moitié de la croissance annuelle étant prélevée. Représentant trois quarts de la forêt française, la forêt privée, insuffisamment gérée, ne peut être livrée à elle-même face au risque d’incendie. Il est notamment proposer d'abaisser le seuil d’obligation des documents de gestion durable pour la forêt privée à 20 hectares (contre 25 à ce jour), adapter les effectifs du Centre national de la propriété forestière (CNPF) en conséquence, créer des postes supplémentaires pour plus d’animation sur le terrain et une dynamisation de la gestion.
La valorisation économique des produits de la forêt permet de réinvestir les massifs peu gérés et d’optimiser les synergies entre desserte forestière et pistes de défense contre les incendies (DFCI). Les rapporteurs proposent d'intégrer aux objectifs des chartes forestières de territoire ou des plans de massifs, la prévention du risque incendie, afin de faire de la structuration de filières en circuits courts un atout dans la connaissance et la gestion des massifs.
Par ailleurs, les maires voudraient gérer davantage la forêt pour prévenir les feux, ce que la propriété morcelée et de multiples statuts (forêt usagère, biens de section) rendent plus difficile. Il est proposé d'instaurer un droit de préemption des parcelles de forêt sans document de gestion durable et présentant un enjeu au regard de la défense des forêts contre l’incendie, au profit des communes s’engageant à intégrer la parcelle au régime forestier.
La flotte française semble aujourd’hui insuffisante pour faire face à l’évolution de l’aléa. Il est donc proposer d'augmenter le budget de la protection civile pour permettre l’acquisition de moyens aériens (avions et hélicoptères) à la hauteur du risque et s’appuyer, en tant que de besoin, sur la location d’appareils.
Au-delà des moyens nationaux, un soutien de l’État s’avère indispensable par un renforcement des moyens capacitaires des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS). La mission propose d’augmenter significativement, dans un cadre pluriannuel, la dotation de soutien de l’État à l’investissement des SDIS, pour permettre notamment l’acquisition de véhicules et leur renouvellement.
Lorsque ni la prévention, ni la lutte n’ont permis d’éviter un sinistre, vient l’étape de la reconstitution, nécessitant une aide financière de l’État et une réflexion sur les essences à planter, qui doivent concilier adaptation à la station forestière et résistance aux incendies.
Il est ainsi proposé de conditionner l’aide de l’État à des choix d'essences et de gestion adaptés au risque incendie (par exemple en maintenant des pare-feux, en expérimentant des corridors de feuillus ou une moindre densité de peuplement).
Les recommandations législatives du rapport seront traduites dans une proposition de loi, à venir, à la rentrée parlementaire. Elle sera enrichie par les retours d’expérience des incendies de l’été 2022 ; à cette fin, les rapporteurs se rendront en Gironde à l’automne, pour prolonger les premières consultations déjà engagées sur les feux hors normes ayant ravagé la forêt girondine en juillet dernier.
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