L’arrêt des tribunaux ne marque pas pour autant la fin de l’activité des cabinets d’avocats, bien au contraire. Les activités se déploient sur trois fronts : faire face aux demandes urgentes des entreprises ; interpréter et expliquer les nouveaux textes publiés et assurer, dans la mesure du possible, le traitement des dossiers en cours.
« Les activités judiciaires ont beau s’être arrêtées, nous avons beaucoup plus d’activité qu’en temps normal, annonce Xenia Legendre, managing partner du cabinet Hogan Lovells. Nous avons des demandes en matière de restructuring car, quoi qu’on dise, de nombreuses entreprises vont être en difficulté. Certaines sociétés nous chargent de réaliser des demandes formelles de report d’échéances bancaires, d’autres ont des questions en matière de droit social, tandis qu’un client s’interroge sur la possibilité de verser des dividendes alors qu’il a mis en place du chômage partiel ».
Les demandes en lien avec la crise créent, de l’aveu de nombreux cabinets d’avocats, un surcroît d’activité. D’autant que ces derniers n’attendent pas d’être saisis par leurs clients sur des dossiers pour leur apporter des solutions.
« Nous menons un important travail d’analyse car le gouvernement ne cesse de publier des textes et ordonnances, dont nous étudions l’impact sur les différents secteurs d’activité des entreprises », confie Bertrand Andriani, national managing partner de Linklaters. Des interprétations et explications que les grands cabinets mettent à disposition de leurs clients, au travers d’envois de mails personnalisés, de pages web dédiées ou de webinars auxquels les clients sont conviés par petits groupes. L’une des premières conséquences de la crise est donc un accompagnement renforcé des entreprises, au travers de canaux de communication réinventés.
Derrière la gestion de crise se cache cependant une réalité contrastée. Si certaines pratiques sont en première ligne face à l’urgence, d’autres ne sont pas épargnées par le coup de frein que la crise impose à la vie économique.
« Les activités de private equity (capital investissement) et les marchés de capitaux sont évidemment très touchés. Bon nombre de dossiers qui y ont trait sont en suspens, analyse Bertrand Andriani. Les activités de M&A (fusions-acquisitions) se poursuivent sur les dossiers déjà bien avancés, afin d’atteindre le closing, mais seront indéniablement impactées ensuite. En revanche, les projets dans les infrastructures et les énergies renouvelables sont moins perturbés car sur des échéances de long terme, sauf pour les projets en phase de construction, pour lesquels les travaux ont dû être mis à l’arrêt. Le droit du travail et le restructuring devraient constituer une importante source d’activité ces prochains temps. »
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Chez Linklaters comme chez Hogan Lovells, le télétravail ne pose pas de difficultés techniques, car il a été largement anticipé. Les grèves du mois de décembre ont constitué une répétition générale. « Nous parvenons également à trouver des moyens pour closer les deals, par exemple au travers de solutions comme DocuSign. Elles existaient avant, mais n’étaient guère utilisées. Il est probable que cela entraînera une modification durable des comportements », constate Bertrand Andriani. Même constat pour Xenia Legendre, pour qui le challenge n’est pas tant technique qu’humain. « Les systèmes tiennent bien, mais rien ne remplacera le fait de pouvoir entrer dans le bureau d’un confrère et partager un café. »
Face à la distance, tous les cabinets semblent avoir opté pour la même stratégie : un renforcement des échanges, à tous les échelons : du siège vers les bureaux nationaux, entre bureaux européens, entre managing partners… Chez Hogan Lovells comme chez Linklaters, la gestion des événements par les autres bureaux dans le monde, notamment en Italie et en Asie, a servi d’exemple.
« Nous essayons aussi de faire attention au moral de tous. Nous avons créé une gazette humoristique interne, chacun peut envoyer ses photos. Nous proposons des conseils éducatifs, sportifs, culinaires. Chacun découvre une nouvelle façon de travailler, voire même de vivre : moins de papier, plus d’attention aux autres », analyse Xenia Legendre.
Le renforcement des liens est loin de se cantonner à l’interne et aux clients des cabinets. « Nous communiquons entre confrères, au travers d’un forum qui réunit les avocats des cabinets de Paris ayant une dimension internationale, explique Bertrand Andriani. Nous essayons aussi de défendre notre profession : un grand nombre d’avocats subit la crise de plein fouet, sans pour autant bénéficier d’aides de l’Etat. Nous avons interpellé le gouvernement, au travers de l’Ordre et du CNB. »
« La crise aura des conséquences lourdes et à long terme, insiste Xenia Legendre. Nous réfléchissons déjà à l’après, à la façon dont nous pourrons assister nos clients. »
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