Les départements résistent à la compétence GEMAPI

19.10.2017

Environnement

Une proposition de loi prévoit que les départements déjà impliqués dans la GEMAPI puissent poursuivre leurs missions au-delà du 1er janvier 2020. Le transfert partiel de chacune des quatre missions de la compétence GEMAPI serait également possible.

Ni le Président de la République, ni le Gouvernement n'avaient caché ces derniers mois leur intention d'assouplir la mise en oeuvre de la compétence de gestion de l'eau, des milieux aquatique et de la prévention des inondations - GEMAPI (v. notre actualité "Biodiversité et milieux aquatiques : les pistes de réflexion de Nicolas Hulot" du 10 octobre 2017). Cette volonté a trouvé une traduction possible dans une proposition de loi déposée à l'Assemblée nationale le 17 octobre 2017 dont les dispositions sont présentées ci-dessous.

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Remarque : les quatre domaines relevant de la GEMAPI sont (C. envir., art. L. 211-7, I, 1°, 2°, 5° et 8°) :

- l'aménagement d'un bassin ou d'une fraction de bassin hydrographique ;

- l'entretien et l'aménagement d'un cours d'eau, canal, lac ou plan d'eau, y compris les accès à ce cours d'eau, à ce canal, à ce lac ou à ce plan d'eau ;

- la défense contre les inondations et contre la mer ;

- la protection et la restauration des sites, des écosystèmes aquatiques et des zones humides ainsi que des formations boisées riveraines.

Maintien des compétences GEMAPI des départements au-delà de 2020

On rappellera qu'à partir du 1er janvier 2018, les communes et leurs EPCI (communautés de communes, communautés d’agglomération, communautés urbaines et métropoles) disposeront d'une compétence exclusive dans quatre domaines relevant de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations. Toutefois, les collectivités exerçant l'une des missions de GEMAPI à la date du 28 janvier 2014 pouvaient l'exercer jusqu'au transfert de compétence aux communes ou EPCI, et ce, au plus tard, jusqu'au 1er janvier 2020.

 
En revanche, au-delà  du 1er janvier 2020, la loi ne donne pas la possibilité aux collectivités qui le souhaiteraient de continuer à mener des actions en ce domaine, réservé aux seuls EPCI ou communes. Les rapporteurs estiment que cette possibilité est une demande forte exprimée par plusieurs collectivités territoriales, en particulier les départements historiquement impliqués dans des actions de prévention des inondations et des risques de submersion marine.
 
Aussi, le projet de loi autorise tout d'abord les départements assurant une ou plusieurs des missions attachées à la compétence GEMAPI de poursuivre leurs engagements en la matière, pour ceux qui le souhaitent, au-delà du 1er janvier 2020 . Le texte permet également aux départements qui auraient commencé à conduire des actions dans le domaine de la GEMAPI après la date de publication de la loi MAPTAM et avant le 1er janvier 2018 de bénéficier, eux aussi, de cette faculté (L. n° 2014-58, 27 janv. 2014, dite MAPTAM, art. 59, I ; Prop. L., art. 1er, I).
 
Enfin, la proposition de loi a pour objet de permettre l’engagement de la responsabilité de l’EPCI compétent, mais uniquement en ce qui concerne l’organisation de la compétence GEMAPI, et seulement entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019 (L. n° 2014-58, 27 janv. 2014, dite MAPTAM, art. 59, II ; Prop. L., art. 1er, II).
 
Selon les rapporteurs, ces dispositions permettront à chaque territoire de préparer au mieux le transfert de GEMAPI compte tenu de la complexité des organisations à imaginer. Mais nul doute qu'elles ne vont peut-être pas réjouir les EPCI qui s'apprêtaient à exercer cette compétence. Et quid des EPCI qui se sont déjà appropriés la compétence par anticipation, comme la loi MAPTAM le permet ? Les débats parlementaires promettent en tout cas d'être houleux...
Rapport sur la mise en oeuvre de la GEMAPI pour les fleuves

 Il est également proposé que le Gouvernement remette un rapport d’évaluation au Parlement concernant les conséquences du transfert de la compétence GEMAPI pour la gestion des fleuves. Ce rapport devra notamment étudier les évolutions institutionnelles et financières possibles de cette gestion (Prop. L., art. 2).

 

Selon les rapporteurs de la proposition, il apparaît en effet que, tant dans son financement que dans son aspect matériel, il n’est pas envisageable que seuls les EPCI et leurs communes soient en charge de la gestion des fleuves. Il s’agit d’un enjeu de nature nationale dont la loi devrait tenir compte.

Transfert partiel d'une mission de la compétence GEMAPI

Actuellement, la loi autorise le transfert ou la délégation de tout ou partie des missions de la compétence d'un EPCI compétent en matière de GEMAPI à un établissement public d'aménagement et de gestion de l'eau (EPAGE) ou à un établissement public territorial de bassin (EPTB) ne peut être que totale.

 

Les rapporteurs estiment que ce texte, s'il permet à l'EPCI de transférer ou de déléguer la totalité de ces missions ou de certaines d'entre elles, ne permettrait pas explicitement de transférer ou de déléguer une partie seulement de l'une des quatre missions. Aussi la proposition de loi introduit la possibilité d'un transfert ou d'une délégation, totale ou partielle, de l'une de ces missions (C. envir., art. L. 213-12, V ; Prop. L., art. 4). Reste à savoir comment va s'opérer ce partage qui pourra être délicat en pratique.

Transfert aux syndicats de communes et aux syndicats mixtes

Actuellement, les textes ne prévoient qu'une délégation ou un transfert de compétence au profit des EPTB et des EPAGE.

La proposition de loi élargit la liste des bénéficiaires de ces transferts et délégations totaux/partiels, aux syndicats de communes et aux syndicats mixtes (CGCT, art. L. 5211-61 ; Prop. L., art. 3) :

- soit que le syndicat est situé sur tout ou partie de l'EPCI ;

- soit que plusieurs syndicats sont situés chacun sur des parties distinctes du territoire de l'EPCI.
Autres dispositions de la proposition de loi

Le texte étend à la prévention des inondations :

- d'une part, les missions d’animation et de concertation qui étaient limitées jusqu'ici à "la gestion et à la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques dans un sous-bassin ou un groupement de sous-bassins, ou dans un système aquifère, correspondant à une unité hydrographique" (C. envir., art. L. 211-7, I, 12° ; Prop. L., art. 5) ;

- d'autre part, l’assistance technique mise à disposition par les départements aux EPCI ne disposant pas des moyens techniques suffisants pour exercer leurs compétences (CGCT, art. L. 3232-1-1 ; Prop. L., art. 6).

 

Selon les rapporteurs, cette extension de l’intervention des départements à l’ensemble des domaines constitutifs de la compétence GEMAPI, notamment la défense contre les inondations et contre la mer, permettrait à ces derniers de continuer à venir en aide aux EPCI, mais également de rester membres de syndicats mixtes ouverts compétents en matière de GEMAPI.

 

Enfin, le texte permet d’associer par voie de consultation les parcs naturels régionaux à l’élaboration ou la révision de documents de planification et d’aménagement en ce qui concerne la gestion des milieux aquatiques et zones humides de leur territoire (C. envir., art. L. 333-1 ; Prop. L., art. 7).

Olivier CIZEL, Code permanent Environnement et nuisances
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