Face à l’aggravation de l’épidémie, les entreprises doivent faire face à l’inquiétude des salariés contraints d’aller travailler. Le bâtiment va rédiger un protocole définissant les conditions sanitaires requises selon les types de chantiers, tandis que plusieurs commerces alimentaires s’engagent à verser une prime exceptionnelle à leurs salariés. La propreté demande, de son côté, à être reconnue comme un secteur prioritaire pour disposer d’équipements de protection individuels.
Aller travailler ou rester confiné ? C’est le dilemme auquel sont confrontés de nombreux salariés des commerces alimentaires, de la propreté, des livraisons à domicile mais aussi de l’automobile, du bâtiment, des transports, des banques…
Beaucoup d’entreprises ne sont pas à l’arrêt. Mais au fur et à mesure que la situation sanitaire s’aggrave, l’inquiétude monte. "Nos gars ont peur", répondait il y a quelques jours Patrick Liébus, président de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) à Muriel Pénicaud qui exhortait le secteur à maintenir son activité jugée "essentielle".
Même tonalité dans la propreté. "Nos salariés viennent travailler la boule au ventre, renchérit Sébastien Boileau, directeur général de la société Utile & Agréable, spécialisée dans les prestations de nettoyage d’immeubles. Les équipes veulent rester chez elles. Nous avons expliqué les gestes barrières, nous disposons de gants et de gels hydroalcooliques, mais nous n’avons pas de masques. Or, deux personnes peuvent circuler dans le même véhicule à moins d’un mètre l’une de l’autre".
La Fédération des entreprises de la propreté (FEP) vient d’ailleurs de publier une lettre ouverte pour être reconnue comme un secteur prioritaire, c’est-à-dire pour demander l’intégration des entreprises du secteur "dans les métiers dits essentiels au maintien de la salubrité civique" pour disposer d’équipements de protection individuels. "Il est impératif que ces professionnels de l’hygiène et de la désinfection puissent poursuivre leurs activités indispensables à court et moyen termes dans les conditions optimales de protection des agents de service de propreté", écrit ainsi Philippe Jouanny, le président de la FEP.
"L’heure est grave", alertait Amar Lagha, secrétaire général de la fédération CGT du commerce et des services qui déplorait, dimanche, dans un communiqué le premier décès dû au Covid-19 dans ce secteur. "Nos vies sont en danger".
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
Très tôt, les syndicats se sont fait les relais de la préoccupation des salariés. L’Unsa-RATP a alerté sur les situations à risque pour des agents de la régie, comme la montée maintenue à l'avant dans des bus ou la poursuite d'activité pour des salariés à des postes "pas absolument nécessaires". Vendredi, c’était au tour des salariés du centre technique du groupe Renault à Lardy (Essonne) de dénoncer dans une lettre ouverte l'obligation qui leur est faite de travailler sur place, au lieu d'observer le confinement de lutte contre le coronavirus.
Fait inédit : les cinq confédérations syndicales (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC et CFTC) ainsi que les trois organisations patronales (Medef, CPME et U2P) ont parlé d’une seule voix en appelant jeudi conjointement "les pouvoirs publics et les entreprises à mettre en œuvre tous les moyens indispensables à la protection de la santé et de la sécurité des salariés", selon le texte. "Evidemment, qu’on a besoin de de continuité économique sur un certain nombre de secteurs stratégiques (…) mais ça ne peut se faire sur le dos des salariés", a déclaré dans la foulée le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger.
A charge pour les DRH d’organiser les mesures suffisantes pour assurer la santé et la sécurité des salariés. "Il serait dangereux d’imaginer que les entreprises puissent s’affranchir de leurs obligations de santé et sécurité sur la durée", prévient Alexis Ducos, président de @Izibizness, un cabinet conseil spécialisé en RH. D’autant que masques et gels hydroalcooliques font défaut. Avec le risque de voir les salariés exercer leur droit de retrait dès lors qu’ils craignent pour leur santé.
Les employeurs peuvent, en effet, être tenus responsables si leurs salariés attrapent le virus faute de protection suffisante. Ce que confirme Alexis Ducos : "si un salarié contracte le virus car il est venu à son poste de travail sur ordre de son employeur qui n’avait mis en place que les mesures barrières, on peut penser que le salarié serait en droit d’invoquer la faute inexcusable de l’employeur puisqu’il ne pouvait ignorer le danger et d’engager donc la responsabilité pénale de celui-ci".
Faute de définition très claire sur "les secteurs essentiels", chacun y va de sa stratégie.
De nombreuses entreprises ont annoncé la fermeture de leur site de production. La Redoute a dû se contraindre, sous la pression des syndicats, à fermer le site logistique à Wattrelos (Nord) après deux cas de suspension de Covid-19. Mardi, une vingtaine de salariés avaient ainsi refusé de reprendre leur poste. De même, l’usine Punch Powerglide de Strasbourg a arrêté son activité à la demande du CSE après l’irruption de plusieurs cas avérés de coronavirus. La décision a été prise mercredi 18 mars au matin. PSA a également fermé ses usines.
Le bâtiment devrait également bénéficier de la mise en place des mesures d’activité partielle décidées par le gouvernement. Le différend qui opposait les trois fédérations professionnelles (bâtiment, travaux publics et la Capeb) et le gouvernement sur la continuité de l’activité du secteur a trouvé une issue favorable samedi. La profession et l’Organisme professionnel de prévention du BTP (OPPBTP) vont rédiger un protocole commun définissant les conditions sanitaires requises selon les types de chantiers, qui sera diffusé la semaine prochaine via un guide de bonnes pratiques. Validé par les organisations patronales et syndicales, ainsi que par les ministères du travail et de la santé, il donnera, pour toutes les entreprises de toutes tailles, "une série de recommandations pour assurer des conditions sanitaires satisfaisantes sur les chantiers et poursuivre les activités". "A partir de ce document, les dirigeants pourront décider de travailler ou non", indique un porte-parole de la Capeb qui précise que 80 % de son activité se fait chez les particuliers.
La CGT construction-bois-ameublement a toutefois appelé les salariés du secteur à "rester confinés chez (eux)". La confédération prône une activité réduite au "service minimum d’intérêt général" pour "répondre aux besoins d’urgence chez les particuliers et dans les bâtiments de service public".
Autre stratégie : en sus des mesures de protection - plexiglas autour des caisses, masques et gants, aménagement des horaires de magasins - , plusieurs enseignes alimentaires ont annoncé le versement d’une prime aux salariés mobilisés sur leur lieu de travail pendant la crise sanitaire pour récompenser "l’engagement exceptionnel". C’est le cas, par exemple, de Auchan, d’Intermarché et de Carrefour.
Auchan Retail octroiera ainsi une prime de 1 000 euros à l’ensemble des collaborateurs, des magasins, entrepôts, drives, services de livraison à domicile et site de e-commerce (65 000 collaborateurs). Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire avait, en effet, appelé les secteurs essentiels à verser la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (prime Macron), instaurée en 2019 pour répondre à la crise des Gilets jaunes et reconduite en 2020.
Le groupement Les Mousquetaires (Intermarché) pose également le principe "d’une rétribution annuelle exceptionnelle" tandis Alexandre Bompard, le PDG de Carrefour a affirmé, dimanche, sur France 2, qu'il était favorable au versement de cette prime mais sans en préciser les modalités.
Des gestes salués par plusieurs organisations syndicales même si plusieurs s’interrogent sur le bien-fondé d’une telle décision : peut-on monnayer la santé des salariés ?
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