Depuis le début du confinement, les cellules d'écoute psychologique des salariés ont vu leur nombre d'appel bondir de 45%. Une sur-utilisation qui ne devrait pas faiblir du fait du déconfinement. Les tensions accumulées durant une période de télétravail mal préparée ont fragilisé les salariés et les collectifs de travail. Les experts appellent à une grande vigilance.
Il y a ceux qui ont peur de la maladie elle-même. Peur de la porter malgré eux, peur d’avoir été au contact d’une personne contaminée, peur de la transmettre à leurs proches. Il y a ceux qui supportent mal le passage brutal à un télétravail complet. Ils sont parfois surchargés de travail, ont l’impression d’être "fliqués" par leurs managers ou ont du mal à jongler entre leur vie professionnelle et leur vie personnelle. Enfin, il y a ceux qui craignent pour l’avenir de leur emploi, subissent des tensions familiales ou l'agravation de leurs troubles psychologiques.
Toutes ces inquiétudes trouvent une oreille attentive au sein des cellules d’écoute proposées aux salariés par certaines entreprises. Dans le contexte de crise lié au Covid-19, le recours à ces services d’assistance psychologique a explosé. Les cabinets adhérents de la Fédération des Intervenants en Risques Psychosociaux (Firps) constatent une hausse moyenne de 45 % du nombre d’appels passés par les salariés. "La dernière fois que nous avons eu affaire à un pic d’appels, c’était en région parisienne au moment des attentats du Bataclan, se remémore François Cochet, président de la Firps. Ces derniers mois, on assiste à une augmentation massive qui touche toute la France. Malgré tout, nos services n’ont pas été mis en difficulté, car ils sont conçus justement pour faire face à des crises, et donc à des hausses brutales de la demande". Stimulus, l’un des cabinets adhérents de la Firps, a annoncé le recrutement de 20 psychologues supplémentaires pour faire face au boom des appels.
En parallèle, les cabinets sont également submergés de demandes visant à installer des hotlines en urgence. "L’essentiel de ces demandes émane d’entreprises de taille intermédiaire, car les grandes entreprises étaient pour la plupart déjà équipées, explique Emmanuel Charlot, directeur général du cabinet Stimulus. Le problème, c’est que le dispositif est alors estampillé par les salariés comme étant lié à une crise en particulier, alors qu’il a au contraire vocation à s’inscrire sur la durée, pour tous types de problématiques." Autre inconvénient, les dispositifs mis en place dans l’urgence ne bénéficient pas de toute la communication nécessaire auprès des salariés. Résultat, ces derniers sont moins nombreux à connaître le dispositif qui est donc moins utilisé. "Si je devais n’avoir qu’un seul message pour les entreprises, c’est de ne pas attendre que la crise arrive pour mettre en place des outils de soutien aux salariés, insiste Christian Mainguy, directeur général du cabinet Rehalto. Les entreprises ont vécu ou vivront des crises, donc ces dispositifs doivent être systématiques, au moins dans les PME et grandes entreprises." Plus qu’un dispositif d’urgence, les lignes d’écoute peuvent être pérennisées, et faire pleinement partie de la politique de l’entreprise en matière de prévention des risques psychosociaux.
Gestion du personnel
La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :
- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.
Pour les intervenants, le déconfinement n’est pas synonyme de relâchement. La période actuelle pourrait même constituer une nouvelle phase critique en matière de gestion des risques psychosociaux. "La mise en place brutale d’un télétravail à plein temps a généré des relations plus compliquées entre les salariés, souligne Emmanuel Charlot. Beaucoup de salariés font remonter un manque de soutien de leurs managers, qui ne prennent pas le temps de prendre de leurs nouvelles par exemple. Les situations de tensions, de non-dits, doivent être purgées lors du retour sur le lieu de travail." "Les sujets enfouis sont la pire des choses pour le collectif, ajoute François Cochet. Il faut les mettre sur la table ! Il peut y avoir par exemple un sentiment d’inéquité entre collègues, lorsque l’un a continué à travailler à distance, avec une charge de travail alourdie, alors que l’autre était en arrêt pour garde d’enfants. Il faut considérer le déconfinement comme un escalier : à chaque étape il faut analyser ensemble ce qui a marché ou non, pour envisager l’étape suivante collectivement."
La psychologue Karen Pariente est responsable de Stimulus Care Services, qui regroupe les activités d'assistance et d'accompagnement des salariés. Elle épaule les équipes de travail dans la gestion de ce type de crise interne. "Plus on se sent mal, plus on est centré sur ses propres besoins, c’est normal. Nous accompagnons à la prise de distance : si je vis mal la situation, peut-être que mon manager lui-même subit un certain nombre de contraintes qui peuvent expliquer ses maladresses ou son comportement insatisfaisant du point de vue du salarié."
Pas question donc, de reprendre le travail avec pour seul objectif la relance économique. "Nous vivons une transformation accélérée sans précédent, rappelle Christian Mainguy. Elle touche également les méthodes de travail, et doit donc être digérée et analysée dans chaque structure, afin que chacun tire des enseignement de cette mutation de la société."
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