Avec 4 générations de produits, une offre foisonnante et des enjeux cruciaux… le secteur du logiciel de comptabilité pour les TPE actuellement en mutation interroge. Voici le 1er volet de notre enquête : positionnements & guerre des nerfs.
L’offre — pléthorique — des logiciels de comptabilité dédiés aux TPE* cache plusieurs générations de solutions, différentes à bien des égards. Si la première, développée sous MS-Dos pendant les années 80, a disparu du paysage, la seconde sous Windows existe encore (par exemple avec Ciel). Elle est concurrencée par une troisième génération, celle du Saas, basée sur des programmes développés pour le Web, des logiciels en ligne qui reprennent les fondamentaux des fonctionnalités comptables (SageOne, Zefyr, Idylis, etc.). Apparaît aujourd’hui une quatrième génération qui bouscule les us et coutumes et automatise la quasi totalité de la tenue de comptabilité en se basant sur les flux bancaires et en proposant une comptabilité dite de trésorerie (Fizen, Factomos, Evoliz, etc.). "Ces plateformes aspirent les lignes bancaires de la TPE, les analysent, les classent en partie et réalisent jusqu’à 80 % de la comptabilité grâce à cette matière", commente Xavier de Labarrière, co-fondateur d’ECL Direct. De quoi révolutionner le secteur et faire bouger les lignes.
D’ailleurs, la concurrence fait rage. Nous avons identifié via Internet une bonne quarantaine de prestataires. Car les éditeurs historiques (Cegid, EBP, Sage) voient leurs parts de marché disputées par une concurrence accrue, issue soit du monde de l’édition française (Clic&Tag) ou étrangère (Intuit avec Quickbooks vient des Etats-Unis, Economics du Danemark, Exactonline des Pays-Bas, Xero — non disponible en France — de Nouvelle Zélande), soit des cabinets d’expertise comptable (compta.com).
Tous font évoluer leur offre. Chez Cegid, Antoine Wattinne, directeur marché profession comptable & TPE rappelle : "Nous investissons massivement dans des solutions collaboratives afin de permettre aux experts-comptables de mettre à la disposition de leurs clients TPE une plateforme digitale de Web services, qui propose des services de comptabilité partagés mais aussi de nouvelles fonctionnalités en mode Saas issues de développement Web". De son côté, "EBP travaille au développement d’un produit de 4° génération, qui devrait sortir en fin d’année", annonce Guillaume Jacques, directeur marketing et communication d’EBP.
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
Selon les cas, les éditeurs approchent le marché des TPE de façon différente. Certains ciblent les experts-comptables à qui ils vendent leur solution. Ils suivent en ce sens l’exemple de Cegid, puisque le leader du marché ne s’adresse aux TPE de 0 à 50 salariés qu’au travers des experts-comptables. "Nous ne menons aucune offensive en direct. Cela évoluera peut-être, mais pour l’instant ce n’est pas le cas", confirme Antoine Wattinne. Avec MEG, RCA fait de même. "Nous faisons partie de ces éditeurs qui s’engagent à ne pas vendre l’outil en direct aux TPE", déclare Jérôme Clarysse, président fondateur de RCA. Un engagement qui n’est néanmoins pas contractuel. Fizen confie aussi la distribution de sa solution aux experts comptables. D’ailleurs, "lorsqu’une TPE quitte son expert-comptable, elle perd ses droits de connexion à la solution, qui devient un outil de fidélisation pour les cabinets", affirme Xavier de Labarrière. D’autres évoluent. Zefyr cherche à constituer un réseau d’experts-comptables partenaires. "Nous créons un club d'experts comptables connaissant Zefyr afin de leur permettre de partager leurs expériences utilisateurs. Nous nous engageons à fournir aux partenaires au minimum une demande (un contact de TPE NDLR) par trimestre et nous leur demandons la réciprocité. Notre cible privilégiée sont les jeunes experts qui montent leur cabinet et nous espérons couvrir l’ensemble du territoire français assez rapidement", explique Bertrand Delattre, directeur du développement. De son côté, le logiciel Tiime, qui a été développé il y a une dizaine d’années pour un groupe de cabinets d’expertise comptable, modifie son positionnement afin d’élargir sa cible et de commercialiser sa solution à d’autres experts-comptables. Maxime Digue, président de Budget On Time, éditeur de Tiime, indique "réaliser actuellement un travail complet de réécriture des codes afin de sortir une première version courant 2016".
D’autres prestataires adressent la double cible : chefs de TPE et cabinets. C’est le cas de Factomos : "Soit la TPE s’abonne en direct et donne un accès gratuit à son expert-comptable, soit l’expert-comptable s’abonne et fournit la solution à ses clients en englobant le coût supporté dans ses honoraires", précise Grégoire Fournel, co-fondateur et CTO de Factomos. Enfin une partie des éditeurs préfèrent cibler exclusivement les chefs d’entreprise.
"Si un outil comme macompta.fr permet au chef d’entreprise d’aller jusqu'à l’édition du bilan, il ne remplace pas le contrôle de l’expert. C’est pourquoi nous recommandons aux TPE de faire appel à un expert-comptable", commente Sylvain Heurtier, président de macompta.fr. Chez Sage, Lucie Laurendon chef de produit SageOne, prévient : "SageOne est une solution de gestion en ligne vendue en direct aux auto-entrepreneurs et aux TPE mais ne concurrence pas la ligne de comptabilité traditionnelle Ciel. La solution permet de réaliser un début de comptabilité. En revanche, nous donnons un accès aux experts-comptables qui peuvent inviter leurs clients à y créer leurs journaux et y récupérer les données pour les entrer dans leur logiciel de production".
Avec Quickbooks, Intuit inverserait le rapport en vendant aux entreprises et en leur suggérant des cabinets. Sollicité, l’éditeur n’a pas répondu à notre demande d’interview. Ce qui soulève bien des interrogations. "L'expert-comptable a intérêt de s'assurer que l'éditeur de la plateforme s'engage à ne pas faire d'offres de services additifs (juridique, conseil social, patrimoine, recouvrement...) directement auprès de ses clients. Car on sait très bien qu'une partie des marges du cabinet se fera demain sur ces missions complémentaires (full services défini par l'OEC)", prévient Jérôme Clarysse.
A l’heure du choix, l’expert-comptable doit tenir compte de plusieurs paramètres : le positionnement de l’éditeur, sa capacité à innover sans le doubler sur les services à valeur ajoutée, mais aussi la diversité de son portefeuille clients. Tous les chefs de TPE ne sont pas prêts à abandonner la boite à chaussures, fusse-t-elle dématérialisée, lorsque d’autres, à la sensibilité plus digitale, souhaitent agir en ligne. La sagesse incite donc à éplucher les critères techniques et fonctionnels notamment et peut être à choisir plusieurs solutions afin de répondre à tous les besoins… et surmonter la guerre des nerfs.
* En l’absence d’études de marché faisant autorité, nous avons avancé pas à pas au fil des interviews et nous livrons ici une enquête, non exhaustive, mais qui se propose d’apporter un éclairage sur un secteur en mutation. Les solutions retenues sont celles des 3ème et 4ème générations de notre typologie décrite plus haut.
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