Les négociations sur les retraites se soldent par un échec

Les négociations sur les retraites se soldent par un échec

23.06.2025

Gestion du personnel

Près de quatre mois après le début des discussions, les partenaires sociaux ont dû se rendre à l'évidence et acter l'échec des négociations sur les retraites. Jusqu'au bout, ils auront tenté de trouver une voie de passage. En vain.

"Tout le monde s'attendait à ce qu'on échoue et on a échoué", a résumé le chef de file de la CPME, Eric Chevée, à l'issue de ce long marathon de négociation sur les retraites entamé le 27 février dernier. Cette ultime séance qui ne devait durer que quelques heures, le temps d'accepter ou de rejeter le texte de compromis proposé par l'animateur des discussions, Jean-Jacques Marette, aura finalement duré près de 7h30, entrecoupée d'interruptions de séance. Les partenaires sociaux ont finalement fini par admettre, à 22h30, qu'aucun consensus ne pouvait être dégagé.

Une démonstration de force des numéros un du patronat

Il faut dire que cette dernière séance de négociation avait commencé sous de mauvais auspices. Les numéros du Medef et de la CPME, Patrick Martin et Amir Reza-Tofighi, avaient en effet décidé d'organiser au débotté, une demi-heure avant la séance, une conférence de presse devant le ministère des affaires sociales, là où se déroulaient les discussions. Une initiative qui a provoqué la colère des organisations syndicales. "Provocation", "torpillage, les syndicats n’ont pas eu de mots assez durs pour décrire la méthode. "La partie patronale n’a pas joué le jeu. Il y a des règles de loyauté dans la négociation. Ce mode de pression n'est pas normal", s'est emportée la cheffe de file de la CFE-CGC, Christelle Thieffinne.  

Le ton était posé et les discussions furent à l'avenant, tendues tout au long de l'après-midi.

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Des désaccords sur le texte en discussion

Le mécontentement des organisations syndicales a continué une fois entrées dans la salle de négociation, le patronat tentant de reprendre la plume. S'il semblait acquis, à l’issue de la séance du 17 juin, que le texte sur lequel les partenaires sociaux allaient plancher lors de cette dernière séance était le document de compromis établi par Jean-Jacques Marette, rien ne s'est passé comme prévu. Dès le début de la séance, le patronat a fait savoir qu'il ne considérait pas ce document comme "paritaire". "Ce texte reprenait des sujets sur lesquels nous n'avions pas manifesté d'accord", a expliqué par la suite la cheffe de file du Medef, Diane Milleron-Deperrois. Le patronat avait alors demandé une première interruption de séance afin de pouvoir réinjecter ses propositions dans le document de Jean-Jacques Marette. Mais ce bricolage n'aura pas tenu.

Patronat et syndicats s'accusent mutuellement de l'échec

A 22h30, la CFDT a annoncé l'échec des discussions. Devant la presse, les organisations syndicales et patronales se sont employées à renvoyer la balle de l'échec à l'autre partie. "Les organisations syndicales se sont battues jusqu'au bout. Pour aboutir, il fallait être deux", a déclaré Yvan Ricordeau de la CFDT. Il a estimé que le patronat en mettant sur la table des propositions de dernière minute "a déséquilibré, détricoté" le texte de la délégation paritaire permanente.

"On n'était pas si loin que ça de la fumée blanche, a regretté pour sa part Pascale Coton de la CFTC, mais le Medef ne voulait pas de nos propositions et nous répondait : chiffrage, chiffrage, chiffrage !"

La CFE-CGC a réitéré ses critiques en début de soirée : "la confiance est gravement atteinte, le chemin n'était pas si loin, on pouvait atterrir", a estimé Christelle Thieffinne qui a déploré que le patronat "n'ait pas joué le jeu et sur le fond et sur la forme".

Diane Milleron-Deperrois, cheffe de file du Medef, a présenté un tout autre son de cloche : "j'ai présenté d'ultimes propositions patronales pour aller chercher un accord". Elle estime avoir concédé "des ajustements à la réforme Borne sans toutefois dégrader son rendement", déplorant que ces propositions n'aient pas suscité "de discussions de la part des organisations syndicales". "Nous regrettons cet échec, cela est dommage pour la démocratie sociale, chacun assumera ses responsabilités". Eric Chevée de la CPME s'est montré plus nuancé. "Je ne veux pas affecter des responsabilités aux uns et aux autres sur l'échec. La question est beaucoup plus compliquée et on n'a pas réussi à trouver la voie de passage. Il faudra se remettre autour de la table".

Les départs anticipés, noeud gordien de la négociation

Il y avait pourtant des sujets de consensus - mais ils n'auront pas suffi - notamment sur la retraite des femmes avec le maintien de la surcote, la modification du calcul du salaire annuel moyen (sur les 23 ou 24 dernières années et non plus les 25 dernières années) et la valorisation de deux trimestres pour les carrières longues.

Les points d'achoppement ont pris le pas, notamment s'agissant des départs anticipés dans le cadre de la réparation de la pénibilité et des carrières longues. Un point non négociable pour la CFDT et une ligne rouge pour le patronat. "On ne peut pas demander d'augmenter le taux d'emploi des seniors et continuer à ouvrir les vannes des départs anticiper sans les cibler", a rétorqué Diane Milleron-Deperrois. "Notre objectif est de laisser les gens dans le travail, a renchéri Eric Chevée. On ne voulait pas remettre plus de départs anticipé".

Des discussions loin d'être terminées

Et maintenant ? Les différentes organisations vont réunir leurs instances. Pour la CFDT, il y sera question de loyauté au sein du dialogue social. Mais tout n'est pas à jeter dans cette négociation. "Il y a beaucoup d'enseignements à retenir", a souligné le chef de file de la CFDT, notamment "une nouvelle méthode de négociation qui donne plus de poids aux organisations syndicales". Il se félicite également d'avoir désormais "une expertise sur les retraites qu'on n'a jamais eue sur plusieurs décennies". La CFTC pour sa part s'interroge sur l'opportunité de présenter un front commun face au gouvernement. Christelle Thieffinne a ainsi avancé l'idée de "faire un texte [des] propositions pour montrer que c'était un texte construit et le présenter au gouvernement". 

Une chose est sûre, le débat est loin d'être clos. "Le chapitre ne se refermera pas ce soir", a insisté Yvan Ricordeau. Eric Chevée de la CPME est du même avis. "Ce n'est que partie remise car il faudra bien que nous résolvions collectivement le problème de la pérennité de notre système de retraite par répartition".

En attendant, la balle est renvoyée au Premier ministre qui s'exprimera ce matin, à 7h. 

Florence Mehrez
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