Les pistes de Terra Nova pour enrichir l’Index égalité professionnelle

Les pistes de Terra Nova pour enrichir l’Index égalité professionnelle

20.01.2021

Gestion du personnel

Calculer le pourcentage des femmes dans les bas salaires, tenir compte des temps partiels, renforcer le niveau d’information vis-à-vis des CSE …. Dans une note publiée aujourd’hui, le think tank Terra Nova formule une série de propositions pour étoffer l’Index destiné à mesurer les écarts salariaux entre les hommes et les femmes.

Utile mais perfectible. Si l’Index égalité femmes/hommes a été salué par les acteurs RH, notamment en raison de son obligation de résultats, il comporte des lacunes : c’est en substance le message délivré par Terra Nova. Dans une note publiée aujourd’hui, le think tank livre plusieurs préconisations pour étoffer cet outil destiné à traquer les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.

Manque de transparence

Ce qui pêche ? Le manque de transparence de certains indicateurs, qui n’évite pas les biais et les effets de bord permettant à une entreprise d’être totalement dans les clous de l’égalité professionnelle. D’où la nécessité de nuancer les notes obtenues (sur 100 points).

Parmi les griefs, l’auteure Kenza Tahri, membre du Pôle égalité hommes/femmes de Terra Nova, pointe, toute d’abord, l’absence de prise en compte des temps partiels dans les calculs du premier indicateur portant sur l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes (40 points). Or, ces postes sont "dans 85 % des cas occupés par des femmes et pas toujours réellement choisis". Elle déplore également le manque de précision sur le montant des augmentations obtenues pour évaluer le pourcentage d’hommes et de femmes ayant perçu une augmentation dans l’année (second indicateur). Dans ces conditions, rien n’empêche une entreprise de consentir à un effort financier plus important en faveur des hommes pour obtenir l’ensemble des points dévolus à ce critère (20 au total). Voire d’augmenter les femmes d’un seul euro pour remporter l’ensemble des points.

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Marge de tolérance

Autre raté : la marge de tolérance (de 2 %) consentie pour calculer le pourcentage d’hommes et de femmes promus au sein de chaque catégorie socio-professionnelle. Là encore, "il ne faudrait pas que ce mécanisme de pondérations serve à camoufler le maintien - ou pire, l’augmentation - d’écarts importants minimisés dans la note finale", relève l’experte.

L’auteure se fait encore plus critique sur le quatrième indicateur qui concerne les augmentations de salaire suite à un retour de congé. Le hic ? Il s’agit d’une obligation légale prévue par la loi du 23 mars 2006 visant à protéger les femmes en congé maternité. "On peut donc s’étonner ici d’un indicateur qui ne fait que vérifier la mise en oeuvre d’une obligation légale et que le montant des augmentations ne soit, là encore, pas précisé".

"Les femmes se concentrent dans des métiers peu rémunérés"

Enfin, le dernier critère (la parité parmi les 10 plus hautes rémunérations) comporte lui aussi des loupés. L’auteure souligne qu’il aurait été plus pertinent de tenir compte non seulement de la part des femmes dans les plus hautes rémunérations mais aussi d’analyser la prépondérance des femmes dans les bas salaires.

Car ce mode de calcul tend à occulter des éléments plus structurels : "les hommes et les femmes pour des raisons multifactorielles (héritage, culture, persistance de stéréotypes de genre) n'occupent pas les mêmes emplois". Dit autrement, les femmes se concentrent dans des métiers peu rémunérés avec peu de perspectives d'augmentation et de promotion dans la carrière (assistantes de direction, auxiliaires de vie, aide-ménagères. "Il faut donc aller chercher la source des écarts de rémunérations dans cette ségrégation des métiers".

Pour preuve, "55 % des bas salaires les concernent", rappelle Kenza Tahri en se référant à un rapport d’Oxfam "Travailler et être pauvre, les femmes en première ligne" (2018).

Calculer le pourcentage de femmes dans les bas salaires

Pour inverser la tendance, l’experte préconise de substituer l’indicateur portant sur l’augmentation des salariées de retour de maternité par un autre indicateur qui permettrait de calculer le pourcentage de femmes dans les bas salaires (donc dans les deux premiers déciles de la distribution salariale). Avec à la clef, une approche sectorielle afin de tenir compte des spécificités de l’entreprise (secteur féminisé ou non). Par exemple, dans un secteur très féminisé avec un ratio femmes/hommes qui serait de 80/20, une entreprise comprenant 100 salariés dont 85 femmes et 15 hommes n’obtiendra aucun point si le pourcentage de femmes dans D1(décile) et D2 est supérieur ou égal à 80 %. S’il y a moins de 80% de femmes dans les deux premiers déciles de la distribution salariale, alors l’entreprise remporte les 15 points.

Refonte des classifications professionnelles

Par ailleurs, elle recommande de mieux tenir "compte des temps de travail différenciés entre hommes et femmes en ajoutant un bonus (noté sur 10 points) pour les entreprises dans lesquelles la moyenne du nombre de femmes à temps partiels serait significativement inférieure à la moyenne du secteur". En outre, elle préconise de renforcer le niveau d’information vis-à-vis des CSE, en leur donnant toutes les informations ayant conduit au calcul des résultats ; l’obligation du calcul de l’Index ne devant pas "court-circuiter" le dialogue social, y compris dans les entreprises ayant obtenu une note au-dessus de 75 points ;

Enfin, elle se dit favorable à une refonte des classifications professionnelles, en particulier dans les métiers à prédominance féminine, via la création d’une Commission paritaire d’évaluation des emplois au niveau des branches professionnelles.

Reste à savoir quel sort sera réserver à cette note. Elisabeth Borne avait fait part, en octobre, dans une interview au Parisien, de son souhait d’élargir l’Index. Elle voulait y ajouter nouveau critère, basé sur "la part des femmes dans les cadres dirigeants" pour rendre encore plus efficace l’Index Pénicaud. Depuis, la loi de finances pour 2021 a introduit de nouvelles contraintes. Les entreprises de 250 salariés et plus, qui bénéficient directement des crédits ouverts du Plan de relance, sont tenues de publier le résultat obtenu pour chaque indicateur de l'Index de l'égalité.

Anne Bariet
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