Les points de vigilance de la rentrée [2]

Les points de vigilance de la rentrée [2]

11.09.2022

Gestion du personnel

Quels sont les sujets législatifs, jurisprudentiels, contentieux de ces derniers mois que les DRH devront avoir en tête au moment de la rentrée ? C'est ce que nous avons demandé à plusieurs avocats. Deuxième volet avec Yoann Gontier, avocat au sein du cabinet Epona Conseil. Au menu, le pouvoir d'achat des salariés, la mise à jour des actes de protection sociale complémentaire et le renouvellement des CSE.

Point de vigilance n° 1 : le pouvoir d'achat des salariés

"Le contexte crée par l'inflation constitue un point chaud de la rentrée avec des revendications portées par les organisations syndicales et les salariés. Les entreprises peuvent jouer leur partition dans la réponse à cette crise en déclinant le package pouvoir d'achat. Il y a trois mesures phares.

Premièrement, la prime de partage de la valeur qui remplace la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat (Pepa) avec certains aménagements notamment du régime social et fiscal de la prime qui perdure mais sous un format moins attractif. Elle reste un bon outil à la main des entreprises car elle permet de redonner immédiatement du pouvoir d'achat aux salariés sans alourdir durablement la masse salariale (à l’inverse d’une augmentation des salaires). Toutefois, si on regarde dans le rétroviseur, il y a un risque d'effet d'annonce quant aux montants annoncés. En effet, il n'y a pas beaucoup d'entreprises qui auront la capacité de verser 6 000 euros. Par ailleurs, pour les salariés qui gagnent plus de trois Smic annuels, le régime fiscal et social (assujettissement à la CSG-CRDS et au forfait social) de la prime est moins avantageux. Cela pourrait poser, dans certains cas, un problème de cohérence car c’est probablement aux salariés du « top management » qui perçoivent plus de trois fois le Smic que s’adresse ce montant élevé jusqu’à 6 000 euros.

Deuxième outil intéressant pour répondre à la problématique du pouvoir d'achat : les dispositifs d'épargne salariale. Si l'intéressement et la participation permettent de redonner du pouvoir d'achat à moyen ou long terme (l’exonération fiscale ne trouvant à s’appliquer que si les sommes versées à ce titre sont bloquées pendant cinq ans), la possibilité d'un déblocage exceptionnel en 2022 est, à mon sens, une bonne nouvelle qui va permettre de répondre à la problématique du pouvoir d'achat des salariés sans que l'entreprise (elle-même souvent confrontée à une augmentation de ses coûts) n’ait à supporter une nouvelle charge à cette occasion. Une instruction est attendue en septembre pour en savoir plus sur les modalités de déblocage anticipé. D'ailleurs, un certain nombre d’assureurs attendent des précisions pour autoriser ce déblocage. Sans attendre ces précisions, les entreprises ont jusqu'au 16 octobre 2022 pour en informer les salariés, cette obligation d’information s’expliquant vraisemblablement par le caractère très limitée (jusqu’au 31 décembre prochain) de cette possibilité de déblocage exceptionnel.

Enfin, les nouvelles conditions de prise en charge des frais de trajet domicile-lieu des salariés, à savoir les frais de transport collectif, la prime transport et les mobilités douces avec le forfait mobilité durable, constituent une réponse qui apparaît appropriée à la flambée des prix à la pompe. Il est toutefois regrettable, à mon sens, que la possibilité pour l’entreprise de prendre en charge jusqu'à 75 % du coût d’un abonnement à un transport public de voyageurs soit limitée aux seules années 2022-2023. Cela apparaît, en outre, peu cohérent avec l'urgence climatique et la nécessité d'une transition énergétique.

La question du pouvoir d'achat est, enfin, à mettre en perspective avec les nouvelles attentes des salariés. Les salariés souhaitent retrouver du pouvoir d'achat et, en parallèle, disposer de plus de temps et d'une meilleure qualité de vie au travail. Les entreprises vont devoir trouver le bon point d'équilibre. 

 

Point de vigilance n° 2 : la mise à jour des actes juridiques liés à la protection sociale complémentaire

"Les entreprises qui ont adopté leur régime frais de santé/prévoyance par décision unilatérale (DUE) ont l'obligation de mettre à jour l'acte juridique afin de tenir compte des nouvelles obligations relatives au maintien des garanties en cas de suspension du contrat de travail. Elles avaient en principe jusqu'au 30 juin pour le faire. Mais par une mise à jour du Boss, la date a été repoussée au 31 décembre 2022. Les entreprises ne doivent toutefois pas tarder à se saisir du sujet. En effet, le régime de la DUE est très formel et suit la dénonciation d'un usage. Cela suppose de la part de l'employeur l'information-consultation des représentants du personnel, l’information individualisée des salariés et le respect d'un délai de prévenance. Elles doivent donc dès le mois de septembre commencer ce travail de mise en conformité par rapport à cette obligation. A défaut, elles s'exposent à un redressement de l'Urssaf avec la réintégration de la part patronale financement ces régimes de protection sociale complémentaire, dans l'assiette des cotisations. 

Je suggère aux entreprises de réfléchir à cette occasion au financement des régimes de protection sociale complémentaire justement car la part patronale est exonérée de cotisations. Certaines entreprises ont ainsi pris la décision d'augmenter la part de prise en charge de la mutuelle/complémentaire santé par l'entreprise afin de redonner du pouvoir d'achat aux salariés.

Cette contrainte formelle peut donc constituer une occasion de traiter également la problématique de l’inflation et du pouvoir d’achat des salariés tout en bénéficiant d’un régime social et fiscal de faveur. 

 

Point de vigilance n° 3 : le renouvellement des CSE

"J'alertais déjà à la rentrée dernière sur la question du renouvellement des CSE. L'un des enjeux importants est de tirer un bilan du premier mandat du CSE en vue de le reconfigurer, si nécessaire, lors du renouvellement. Chaque organisation de travail doit réaliser son propre bilan de ce premier mandat de quatre ans. 

Il convient notamment d'évaluer les effets de la disparition du CHSCT et la manière dont ont été traitées les questions de santé et de sécurité au travail, notamment s'interroger sur le fait de savoir si la CCST a joué son rôle en période de Covid. Le CHSCT présentait l'avantage d'être composé de personnes qui avaient une appétence pour ces questions. Au-delà de la question des moyens de la CSSCT, il conviendra de se demander s'il faut redéfinir le périmètre des attributions qui lui ont été déléguées, notamment pour désengorger les réunions du CSE en effectuant un travail qualitatif préparatoire. La question du niveau de formation à donner aux élus pour qu'ils puissent se saisir de ces sujets se pose également. Comment outiller les représentants du personnel et les représentants des directions pour aboutir à un dialogue de qualité en la matière ? La problématique est également d’actualité en ce qui concerne les nouvelles attributions du CSE en matière environnementale. 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

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Florence Mehrez
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