Les points de vigilance de la rentrée [4]

Les points de vigilance de la rentrée [4]

12.09.2019

Gestion du personnel

Quels sont les sujets législatifs et jurisprudentiels de ces derniers mois que les DRH devront avoir en tête au moment de la rentrée ? C'est ce que nous avons demandé à plusieurs avocats. Quatrième et dernier volet avec trois avocates du cabinet Fromont Briens. Au programme : AT-MP, entretiens professionnels renforcés et 100 % Santé.

 

Point de vigilance numéro 1 : la nouvelle procédure AT-MP 

Julie Béot-Rabiot (Fromont Briens)

En matière de reconnaissance des accidents du travail et maladies professionnelles, les règles changeront à compter du 1er décembre 2019. Une nouvelle procédure a été instaurée par un décret du 23 avril 2019 et précisée par une circulaire de la Caisse nationale d’assurance maladie du 9 août 2019. Les nouvelles dispositions, qui concernent les délais et les interfaces, vont nécessairement modifier les pratiques des directions des ressources humaines dans le traitement quotidien des AT-MP.

 

L'employeur n'aura plus à se déplacer pour consulter le dossier

Plusieurs nouveautés sont à noter en matière d’accident du travail. 

  • Tout d'abord, l’employeur pourra adresser sa déclaration d’accident du travail (DAT) par tout moyen, y compris dématérialisée, conférant date certaine à sa réception et non plus nécessairement par LRAR ;
  • La procédure sera rythmée par de nouveaux délais, notamment un délai de 10 jours francs est désormais applicable pour formuler des réserves, courant à compter de la date de rédaction de la déclaration d'accident du travail ;
  • Désormais, le dossier pourra être consulté et commenté en ligne, ce qui évite à l’employeur de se déplacer dans les locaux de la caisse.

D'autres nouveautés sont à relever, cette fois en matière de maladies professionnelles :

  • Un délai de 120 jours francs à compter de la réception de la déclaration de maladie professionnelle (DMP) et du certificat médical initial est laissé à la caisse pour soit instruire le dossier soit saisir le CRRMP ;
  • En cas de saisine du CRRMP, un nouveau délai de 120 jours francs court à compter de cette saisine, pour que la caisse statue.
 Si les bons réflexes ne sont pas instaurés au stade de la déclaration, la procédure est difficilement rattrapable

Attention, l’ensemble des délais étant en jours francs, il importe de noter que pour décompter ces jours, on exclut le jour de l’évènement qui initie le point de départ du délai, puis on décompte chaque jour de 0h à 24h. Si le dernier jour survient un samedi, un dimanche ou un jour férié, il est repoussé au premier jour ouvrable suivant.

Au regard de ces nouveautés procédurales et des enjeux en matière d’AT-MP, il ne peut qu’être recommandé aux directions des ressources humaines d’être proactives et d’instaurer des procédures claires et efficaces permettant d’éviter tout "oubli" malencontreux de délais. Si les bons réflexes ne sont pas instaurés au stade de la déclaration d’AT-MP, la procédure est ensuite difficilement rattrapable.

 

 

Point de vigilance numéro 2 : les entretiens professionnels renforcés

Sabrina Dougados (Fromont Briens)

D’ici le 7 mars 2020, les premiers entretiens professionnels renforcés également surnommés "entretiens de bilan" devront être organisés par l’employeur auprès des salariés présents dans les effectifs depuis le 7 mars 2014. Or, la loi Avenir professionnel a modifié sensiblement les conditions de réalisation de ces entretiens. En cas de non-respect de ces règles, l'entreprise encourt une sanction de 3 000 euros par salarié. Toutefois, l'ordonnance du 21 août 2019  permet aux entreprises d’éviter la pénalité durant une période transitoire, pour les entretiens de bilan qui auront été réalisés jusqu’au 31 décembre 2020.

Afin de se mettre en conformité dès à présent, voici les principales obligations de l’employeur et modalités de mise en œuvre de ces entretiens professionnels :

  • Planifier les entretiens de bilan à réaliser tous les six ans au regard de l’ancienneté des collaborateurs, les premières vagues d’entretien devant avoir lieu avant le 7 mars 2020 pour les salariés présents dans les effectifs à la date d’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2014 ;
  • Établir un compte rendu de l’entretien faisant état du parcours du salarié au cours des six dernières années, lequel s’apprécie au regard des mesures dont a pu bénéficier le salarié (réalisation d’au moins une action de formation, obtention d’une certification totale ou partielle, obtention d’une mesure de progression salariale ou professionnelle). 
  • Vérifier que les deux conditions permettant d’écarter la sanction financière au titre de l’abondement correctif du CPF sont réunies. Celles-ci s’apprécient également sur la période des six dernières années, en vérifiant que le collaborateur a bénéficié de tous entretiens professionnels auxquels il avait droit, et qu'il a suivi au moins une formation non obligatoire.
Ne pas payer le correctif de 3 000 euros expose l'employeur à deux risques de sanction financière

Il apparaît indispensable que les entreprises s’approprient rapidement ces nouvelles règles et mettent en place des mesures préventives et/ou correctives (adaptation du SIRH, recensement des salariés concernés, audit des types de formation d’ores et déjà réalisées - obligatoires/non obligatoires - afin de retenir les critères les plus adaptés au titre des bilans à réaliser en 2020, etc.) afin de se mettre en conformité, l’objectif étant d’éviter dans la mesure du possible la sanction de 3 000 euros au titre de l’abondement correctif du compte personnel de formation.

Par ailleurs, si l'entreprise ne paie pas ce correctif, l'administration pourra la mettre en demeure de verser un montant équivalent à l’insuffisance constatée majoré de 100 %, soit 6 000 euros par collaborateur concerné. Ensuite, il existe un risque de contrôle "social" de la part des IRP et/ou des salariés pouvant aboutir au versement de l’abondement correctif majoré de l’insuffisance constatée soit 6 000 euros par collaborateur concerné auprès du Trésor Public, au versement de 3 000 euros sur le CPF du salarié et au versement de dommages et intérêts distincts en cas d’action judiciaire.

 

Point de vigilance numéro 3 : le 100 % santé

Charlotte Bertrand (Fromont Briens)

En matière de protection sociale complémentaire également, la rentrée des entreprises est chargée ! En effet, la réforme dite du "100% santé" a vocation à entrer en vigueur au 1er janvier prochain et les entreprises disposent donc des quatre prochains mois pour mettre leurs dispositifs complémentaires de frais de santé en conformité avec les nouvelles exigences légales, sous peine de perdre le bénéfice du traitement social et fiscal de faveur.

Cette réforme consiste à voir naître une gamme de produits et de prestations de santé au titre de laquelle les assurés devront ne supporter aucun reste à charge après l’intervention cumulée de l’assurance maladie obligatoire et des organismes complémentaires de frais de santé. Cela concerne exclusivement l’optique, le dentaire et l’audiologie. Ainsi, sur ces trois postes, tout assuré aura la possibilité de choisir entre deux gammes de produits l’une "100% santé", l’autre "à tarifs libres".

Les entreprises devront être vigilantes sur les modalités de remise des documents à leurs salariés 

Afin de permettre cette absence de reste à charge lors de l’achat d’un produit de la gamme "100% santé", les dispositifs complémentaires existant au sein des entreprises doivent être adaptés. Avant tout, c’est à l’organisme assureur de modifier son contrat d’assurance et son tableau de garanties afin d’améliorer les niveaux de garanties pris en charge. Une nouvelle notice d’information devra donc être émise par ce dernier, puis remise par l’employeur à tous les salariés concernés. Les entreprises n’ont pas toutes pour autant nécessairement besoin de modifier leur acte de droit du travail (c’est-à-dire, l’accord collectif, l’accord référendaire ou la décision unilatérale de l’employeur constatant le régime en leur sein). En effet, si les garanties ne sont pas formalisées au sein de cet acte, mais uniquement mentionnées en annexe à titre informatif par exemple, elles ne constituent pas un engagement de l’employeur, lequel n’est donc pas censé modifier l'acte lorsque les garanties assurantielles sont modifiées.

En revanche, une information et une consultation du comité d’entreprise/comité social et économique devront en tout état de cause être mises en œuvre, d’ici la fin de l’année, sous peine de délit d’entrave. Dès lors, si la tâche est principalement dans le camp des professionnels de l’assurance, les entreprises doivent néanmoins se ménager du temps dans leur calendrier social de la rentrée pour échanger sur cette question et devront être vigilantes sur les modalités de remise des documents à leurs salariés.

 

Gestion du personnel

La gestion des ressources humaines (ou gestion du personnel) recouvre plusieurs domaines intéressant les RH :

- Le recrutement et la gestion de carrière (dont la formation professionnelle est un pan important) ;
- La gestion administrative du personnel ;
- La paie et la politique de rémunération et des avantages sociaux ;
- Les relations sociales.

Découvrir tous les contenus liés
Laurie Mahé Desportes
Vous aimerez aussi