Les textes publiés durant notre coupure estivale (1)

Les textes publiés durant notre coupure estivale (1)

31.08.2021

Gestion d'entreprise

Plusieurs textes législatifs et réglementaires ont été publiés au Journal officiel pendant le mois d’août. Nous faisons le point. Notre premier volet revient sur les lois promulguées.

Commercial : la mise en place du passe sanitaire

Loi du 5 août 2021 sur la gestion de la crise sanitaire

Annoncée mi-juillet, la loi de gestion de la crise sanitaire a été publiée au journal officiel du 8 août 2021. Elle étend largement l’obligation de présenter un passe sanitaire (le résultat négatif d’un test de dépistage virologique, un statut vaccinal complet ou un certificat de rétablissement) pour les clients, visiteurs, spectateurs ou encore passagers de nombreux établissement, lieux, services et évènements listés à l’article 47-1, I du décret 2021-699 du 1er juin 2021 (décret modifié par le décret 2021-1059 du 7 août 2021). Ce passe élargi est en place depuis début août pour les personnes majeures et le sera jusqu’au 15 novembre à ce jour (article 1er). Il s’impose notamment pour aller au restaurant, au cinéma, au musée, à la bibliothèque, pratiquer une activité sportive ou encore accéder aux transports ferroviaires (à réservation obligatoire) et aérien, à des foires et salons ou aux fêtes foraines comptant plus de 30 stands ou attractions. Un exploitant qui ne contrôle pas la présentation du passe sanitaire peut faire l’objet d’une fermeture administrative puis d’une contravention. Si le manquement est constaté plus de trois fois sur une période de 45 jours, alors l’exploitant encourt un an d’emprisonnement et 9 000 euros d’amende.

Il est également mis en place pour accéder à certains grands magasins et centres commerciaux de plus de 20 000 m2. Dans ce cas, c’est sur décision motivée du représentant de l’Etat dans le département « lorsque les caractéristiques et la gravité des risques de contamination le justifient (…) et dans des conditions garantissant l’accès des personnes et des services de première nécessité ainsi, le cas échéant, qu’aux moyens de transport ».

Plusieurs recours ont été portés devant les juges des référés à l’encontre d’arrêtés préfectoraux visant des centres commerciaux. Dont celui du préfet des Hauts-de-Seine du 14 août concernant le centre commercial So Ouest. Par une ordonnance du 30 août, le tribunal administratif de Cergy Pontoise a suspendu l’arrêté litigieux. Pour le juge administratif, « les requérantes [la société Levallois distribution et une personne physique] sont fondées à soutenir que, en l’état de l’instruction, l’arrêté du préfet des Hauts-de-Seine porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’entreprendre des établissements offrant des produits de première nécessité situés au sein des magasins et centres commerciaux qu’il vise et à la liberté d’aller et venir ». Etait notamment remis en cause le fait que les mesures de restriction imposées « s’appliqu[ai]ent à l’ensemble des commerces situés dans les centres commerciaux et grands magasins listés sans prévoir aucun aménagement permettant de réserver l’accès des personnes ne disposant pas d’un "passe sanitaire" aux commerces proposant des biens et services de première nécessité au sein de ces magasins et centres commerciaux, notamment, aux commerces alimentaires ou aux pharmacies ». Ce qui a constitué  « une méconnaissance des dispositions législatives (…), le Conseil constitutionnel ayant d’ailleurs, au demeurant, relevé dans sa décision n° 2021-824 DC du 5 août 2021 que pour l’application de ces mesures aux grands magasins et centre commerciaux, le législateur (...) a prévu qu’elles devaient garantir l’accès des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi qu’aux moyens de transport accessibles dans l’enceinte de ces magasins et centres ». Pourtant « le préfet des Hauts-de-Seine se prév[oyai]t de l’existence d’une offre alternative de proximité en produits et services de première nécessité de nature à garantir l’accès des personnes à ces biens et services, il résulte toutefois de ce qui a été dit précédemment que le législateur n’a pas prévu l’existence d’une telle faculté de substitution », poursuit le juge administratif.

Depuis le 30 août, les personnes intervenant dans les lieux dont l’accès nécessite la présentation du passe sanitaire sont également soumis à la réglementation. Et elle le sera pour les mineurs de plus de 12 ans à compter du 30 septembre.

Concernant la conservation des données du passe sanitaire, seul l’employeur est autorisé à conserver la donnée, jusqu’au 15 novembre prochain, donnée selon laquelle l’employé, détenteur d’un statut vaccinal complet, a un statut conforme et vérifié. Une conservation des données non conforme peut être punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

Gestion d'entreprise

La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...

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Consommation et droit des sociétés : attention au climat

Loi du 22 août portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

La loi dite climat et résilience avec ses 300 articles, contient de nombreuses dispositions ayant un impact sur la vie des affaires.

Elle instaure tout d’abord l’affichage environnementale des produits et services (article 2). Un décret viendra préciser les biens et services concernés. Le but est d’informer le consommateur des « impacts environnementaux ou [des] impacts environnementaux et [du] respect de critères sociaux d'un bien, d'un service ou d'une catégorie de biens ou de services mis sur le marché national ». Une première expérimentation sur 5 ans, au maximum, sera menée dans certains secteurs (textile, produit alimentaire, ameublement, hôtellerie, produits électroniques). La publicité réalisée sur les biens et services concernés devra reprendre cet affichage environnemental (article 7). Le ministère de la transition écologique table sur 2023 pour l’instauration de l’affichage environnemental des produits alimentaires et textiles.

Concernant la publicité, la loi interdira notamment, d’ici un an, celle sur la commercialisation ou la promotion des énergies fossiles (un décret viendra préciser ce point) (article 7). Le texte prévoit aussi que la pratique d’éco-blanchiment constitue une pratique commerciale trompeuse avec des sanctions renforcées (article 10 et 11). Le faux « made in France » est désormais aussi considéré comme une pratique commerciale trompeuse (article 4).

Dans les grands commerces (de 400 m2 au moins), la vente en vrac ou présentée sans emballage primaire sera rendue obligatoire en 2030 (article 23). Les consignes en verre devront aussi être privilégiées.

En matière de contentieux, la loi crée de nouvelles infractions environnementales, pouvant engager la responsabilité de l’entreprise et de ses dirigeants dont la mise en danger de l’environnement (article 279) avec une peine pouvant aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement et 250 000 euros d’amende (ce montant pouvant être porté jusqu'au triple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction). La pollution de l’air et des eaux est désormais réprimée à hauteur de 5 ans d’emprisonnement et 1 million d’euros d’amende (ce montant pouvant être porté jusqu'au quintuple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction) (article 280). Une mauvaise gestion des déchets peut, de son coté, entrainer 3 ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. Le délit d’écocide est aussi inscrit dans la loi comme circonstance aggravante des deux délits précédents. Dans ce cas, la peine peut aller jusqu’à 4 ans d’emprisonnement et 4,5 millions d’euros (ce montant pouvant être porté jusqu'au décuple de l'avantage tiré de la commission de l'infraction).

Enfin, la déclaration de performance extra-financière (DPEF) est complétée pour les grandes SA. Elle devra contenir « les postes d'émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre liées aux activités de transport amont et aval de l'activité et [seront] accompagnées d'un plan d'action visant à réduire ces émissions, notamment par le recours aux modes ferroviaire et fluvial ainsi qu'aux biocarburants dont le bilan énergétique et carbone est vertueux et à l'électromobilité » (article 138). Cette nouveauté s’applique aux DPEF réalisées à partir des exercices comptables ouverts au 1er janvier 2022.

Numérique : lutte contre la haine en ligne

Loi du 24 août confortant le respect des principes de la République

Publiée le 25 août, la loi dite séparatisme impose de nouvelles obligations de modération des contenus haineux à certaines plateformes en ligne qui dépassent un seuil de nombre de connexions (article 42).  Ce seuil sera fixé par un décret qui n’a pas encore été publié. Ce nouvel arsenal est applicable jusqu’au 31 décembre 2023, date à laquelle le règlement européen dénommé digital services act, actuellement en cours d’adoption, devrait prendre le relais.

La loi séparatisme fait évoluer une autre la loi : celle pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 (article 6-4). Le texte prévoit notamment l’obligation pour les plateformes en ligne de mettre « en œuvre des procédures et des moyens humains et technologiques pour » mieux coopérer avec la justice administrative et judiciaire face à des contenus illicites en :

  • les informant des actions mises en place à la suite d’injonctions,
  • en accusant bonne réception de leur demandes,
  • ou encore en conservant temporairement des contenus signalés pour les mettre à la disposition de la justice.

Ces plateformes doivent également désigner un « point de contact unique », interlocuteur privilégié des autorités publiques.

Vis-à-vis du public, les opérateurs ont aussi l’obligation de décrire « en termes clairs et précis leur dispositif de modération visant à détecter, le cas échéant, à identifier et à traiter ces contenus, en détaillant les procédures et les moyens humains ou automatisés employés à cet effet ainsi que les mesures qu'ils mettent en œuvre affectant la disponibilité, la visibilité et l'accessibilité de ces contenus ». Ils doivent encore détailler, via des indicateurs chiffrés, le traitement des injonctions ou demandes d’information reçues des autorités judiciaires et administratives ainsi que les notifications de leurs utilisateurs, etc. La périodicité et les modalités de ces indicateurs seront précisées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Les plateformes doivent encore « mett[re] en place un dispositif, aisément accessible et facile d'utilisation, permettant à toute personne de porter à leur connaissance, par voie électronique » un contenu haineux.

Les plus grandes plateformes - définies à l’aide d’un seuil en nombre de connexions supérieur au précédent - devront en plus procéder à une « évaluation des risques systémiques liés au fonctionnement et à l'utilisation de leurs services en matière de diffusion des contenus haineux et d'atteinte aux droits fondamentaux, notamment à la liberté d'expression (nouvel article 6-4, II de la loi pour la confiance dans l’économie numérique) ». Elles auront aussi à instaurer des mesures d’atténuation de ces risques et à en rendre compte au public.

Le CSA est chargé de vérifier la conformité des plateformes à ces nouvelles obligations. Des lignes directrices seront publiées par le Conseil. Il pourra mettre en demeure les opérateurs voire les sanctionner en cas de manquements. Pour les plus graves, l’amende pourra aller jusqu’à 20 millions d’euros ou 6 % du chiffre d’affaires annuel mondial total de l’exercice précédent. 

Nous reviendrons plus en détail sur certains de ces textes dans nos prochaines éditions.

 

 

 

 

Sophie Bridier
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