Yoann Gontier, avocat associé au sein du cabinet Epona Conseil, a identifié trois points de vigilance pour la rentrée des professionnels RH : la mise en oeuvre de la réforme sur les congés payés, l'expérimentation de dispositifs de partage de la valeur dans les petites entreprises et la révision des accords collectifs portant sur la protection sociale complémentaire.
"L'incertitude politique rend difficile l'identification des chantiers sociaux de la rentrée, observe Yoann Gontier, avocat associé au sein du cabinet Epona Conseil. Sur le plan économique, les choses se tendent et je constate un nombre de licenciements économiques plus important que ces dernières années. Les projets sont mis de côté ; les entreprises attendent de savoir quel programme politique va être déroulé. Par ailleurs la question du pouvoir d'achat reste centrale". Deux des points de vigilance détaillés ci-dessous par l'avocat sont d'ailleurs en partie liés avec les attentes salariales qui restent fortes.
Point de vigilance n° 1 : la mise en oeuvre opérationnelle de la loi du 22 avril 2024 sur les congés payés |
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"Les services RH vont devoir s'approprier la loi DDADUE du 22 avril 2024 et la mettre en oeuvre. Le premier sujet concerne les règles de calcul d'acquisition des congés payés. Il est nécessaire de faire application de ces nouvelles dispositions légales en n'oubliant pas de tenir compte des règles d'équivalence prévues par le code du travail qui peuvent conduire à recalculer les droits à congés payés au terme de chaque période d'acquisition des congés payés. Les entreprises vont devoir faire preuve de pédagogie à l'égard des salariés et des représentants du personnel sur la manière dont s'opère ce calcul. Il va également falloir être très attentif sur le paramétrage des logiciels de paie. L'autre enjeu de cette réforme est la gestion des règles de report, le casse-tête chinois de la rentrée ! Elle pose de telles difficultés opérationnelles que certaines entreprises sont prêtes à lâcher du lest. Lorsque les arrêts sont de courte durée et n'ont pas d'impact sur le délai pendant lequel le salarié peut prendre ses congés payés, certaines entreprises font le choix de ne pas informer le salarié [comme le prévoit la loi] du nombre de jours de congés payés disponibles et de la date jusqu'à laquelle ceux-ci peuvent être pris. Cette obligation d'information ne présente en effet alors aucune utilité. Certaines entreprises passeront outre cette obligation - qui n'est pas assortie de sanctions - même pour des arrêts de longue durée. Elles renonceront ainsi à se prévaloir de l'extinction du droit à congés payés. Lorsque l'entreprise a un effectif significatif, réaliser cette information et son suivi -assurer le décompte de ce délai de report afin de connaître la date butoir - suppose d'avoir les bons outils de suivi RH. Enfin, les entreprises doivent profiter de cette réforme pour se réapproprier les règles préexistantes du code du travail en la matière. Je constate que dans de nombreuses entreprises les règles de prise des congés payés sont mal maîtrisées, voire pas appliquées, notamment celles qui permettent de fixer par accord collectif la période de prise des congés payés (qui datent de la loi El Khomri de 2016) ou d'organiser l'information-consultation des représentants du personnel sur cette définition. Avec la loi DDADUE, ces règles prennent une nouvelle actualité. Si les entreprises ne sont pas "au carré" sur cette définition de la période de prise des congés payés, elles ne pourront pas mettre en oeuvre les règles de report de la loi de 2024. Les services RH ont donc intérêt en cette rentrée à s'interroger sur l'ouverture de négociations sur ce sujet en vue de la conclusion d'un accord d'entreprise. Il est d'ailleurs dommage que la négociation d'entreprise soit le parent pauvre de la loi de 2024 (qui n'est prévue que pour augmenter le délai de report au-delà de 15 mois), car l'accord collectif permet de traiter certains sujets périphériques, et notamment l'ordre des départ lorsque l'entreprise aura à gérer à la fois la mise en oeuvre de congés reportés et la mise en oeuvre des congés de l'année N. |
Point de vigilance n° 2 : la mise en oeuvre expérimentale de dispositifs de partage de la valeur dans les petites entreprises |
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S'agissant des entreprises concernées par cette nouvelle obligation, l'une des premières questions qui se posait était celle du décompte des effectifs de 11 salariés. La loi est muette sur les modalités de ce décompte. Le questions-réponses publié cet été confirme à sa question n° 3 que le décompte s'opère selon les modalités de l'article L130-1 I du code de la sécurité sociale ce qui est cohérent dans la mesure où seules les entreprises non assujetties au dispositif de participation sont concernées par cette nouvelle obligation (or, dans le cadre de la participation, l’effectif de l’entreprise est lui-même décompté selon les règles du code de la sécurité sociale). Par ailleurs, il me semble important de souligner que cette nouvelle obligation ne concernera pas que les entreprises de 11 à 49 salariés. En effet si on prend l'exemple d'une entreprises qui compte 60 salariés, celle-ci pourra être concernée dès lors qu'elle n'est pas encore assujettie à la participation obligatoire parce que ses effectifs ont été "gelés" pendant une période de cinq ans en application de la loi Pacte (article L.130-1, II du code de la sécurité sociale,) et sous réserve qu'elle remplisse les autres conditions bien sûr. L'autre question qui se pose aux entreprises est le choix du dispositif de partage de la valeur. La loi ne pose aucune obligation en termes de "résultat attendu" et laisse le choix entre le dispositif d'intéressement, de participation volontaire, la PPV ou l'abondement à un PEE, un PEI, un Perco ou un PERECO. Une entreprise peut ainsi se contenter de mettre en place une PPV d'un faible montant. A cet égard, les stratégies diffèreront bien évidemment selon le climat social, les attentes des salariés et la situation économique et financière de l’entreprise. Par ailleurs, les entreprises doivent à mon sens avoir à l'esprit que selon le dispositif choisi, la perception par le salarié du partage de la valeur peut être différée dans le temps. Si l'entreprise fait le choix de la PPV, elle sera versée dans le courant de l'année 2025. En revanche, si l'entreprise choisit de mettre en place un accord d'intéressement avant le 30 juin 2025 (si l'exercice comptable est à l'année civile), il ne produira d'effets qu'en 2026 avec le versement de l'enveloppe d'intéressement dégagée si les critères fixés par l'accord sont remplis. |
Point de vigilance n° 3 : la révision de l'accord collectif sur la protection sociale complémentaire |
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Le premier enjeu est la mise en conformité afin d'éviter un redressement Urssaf à compter du 1er janvier 2025. Le second enjeu a trait au pouvoir d'achat. Cette contrainte de mise en conformité constitue en effet, selon moi, une opportunité de faire du régime de protection sociale complémentaire en vigueur au sein de l’entreprise, un outil de la politique globale de rémunération. A cet égard, il convient de rappeler que les contributions patronales y afférentes ne sont pas assujetties à cotisations sociales. L'entreprise peut donc augmenter sa participation sans trop alourdir le coût de sa masse salariale, tout en baissant la part supportée par les salariés, augmentant ainsi leur salaire net perçu. Il s'agit d'un sujet qui peut être abordé dans le cadre des NAO qui vont s'ouvrir à la rentrée. Par ailleurs, j'invite les services RH à veiller à communiquer auprès des salariés afin de mettre en valeur l'ensemble des composantes de la politique de rémunération en vigueur au sein de l'entreprise. Rappelons que l'ANI sur le partage de la valeur incite les entreprises à mettre en place le bulletin social individuel (BSI) afin de montrer aux salariés qu'au-delà du salaire net perçu, l'entreprise finance d'autres dispositifs qui participent également à leur pouvoir d'achat. |
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