Elaboration d'une charte sur l'IA, évolution des métiers, formation des collaborateurs, maîtrise des données traitées... Eléonore Jrizi Bourey, la nouvelle directrice Digital, IA et Souveraineté numérique de Cerfrance, détaille les réflexions et les chantiers en cours au sein du réseau.
Quel est l’usage de l’intelligence artificielle (IA) au sein du réseau Cerfrance ?
Gestion d'entreprise
La gestion d’entreprise constitue l’essentiel de l’activité d’un dirigeant d’entreprise. Elle fait appel à un grand nombre de notions empruntées de la comptabilité, de la finance (gestion des risques au moyen de la gestion des actifs et des assurances professionnelles), du droit des affaires (statut juridique, contrats commerciaux, fiscalité, cadre réglementaire et légal de l’activité), de la gestion de ressources humaines...
L'IA fonctionnelle est d'ores et déjà intégrée dans des outils et peut être utilisée de manière très générale pour automatiser des tâches ou fait partie de certaines solutions comme des chatbots pour répondre à des questions ou autres. En revanche, l’IA générative est en expérimentation dans le réseau et n'est pas encore très utilisée à ce jour. Mais nous y travaillons.
L'idée, c'est aussi de cadrer l'usage de l'IA parce que la profession d'expert-comptable et le métier du conseil nous obligent à coller aux réglementations et à respecter tout ce qui est RGDP (règlement général de protection des données) et "IA act" . Ce sont les débuts et nous travaillons sur une charte commune pour pouvoir intégrer l'IA dans nos modes de fonctionnement et dans l'usage au quotidien.
Donc vous allez élaborer une charte éthique, une charte des principaux usages de l’IA ?
Exactement, parce que la transparence dans les décisions est très importante : la transparence vis-à-vis des clients adhérents, le respect des réglementations, ne pas laisser les technologies prendre le dessus sur l'expertise humaine, mais mettre l'IA au service de cette expertise, peut aider à fluidifier les rapports que l'on a avec nos clients adhérents et optimiser le conseil et l’expérience.
Que voyez-vous comme cas d'usage le plus fréquent de l’IA dans le métier d’expertise comptable ?
L'automatisation des tâches, par exemple. Le traitement de dossiers, en tout cas la préparation et les traitements de données pour faciliter et aider la prise de décision, c’est un axe intéressant sur lequel nous travaillons. L'amélioration de la qualité des analyses et la génération des rapports peut aussi être un usage de l'IA dans nos métiers. L’intelligence artificielle doit nous permettre de nous concentrer sur des sujets un peu plus consistants et qui nécessitent une expertise humaine plus pointue.

Quelle est la part d'experts-comptables chez Cerfrance ?
Le réseau compte 60 % de comptables et gestionnaires de paie, 15 % d’experts-comptables et management, 14 % de conseillers économiques et patrimoniaux et juristes conseil. Nos principaux métiers sont l'expertise comptable, la comptabilité et le conseil en gestion.
Sur l'automatisation, jusqu'où allez-vous pousser le curseur ? L’IA va-t-elle remplacer certaines fonctions, faire disparaître certains postes ?
Comme je le dis toujours, l'IA n'est pas là pour remplacer des postes mais pour maximiser ce que nous faisons. Donc nous soulager des tâches rébarbatives qui sont récurrentes et presque banales. L’objectif est de nous dégager du temps et nous concentrer pour de l'analyse plus pointue.
L'IA est là pour accompagner et aider des conseillers "augmentés" à optimiser le conseil qu’ils vont donner à leurs clients adhérents et à introduire les clients adhérents aussi dans ce milieu technologique qui, aujourd'hui, peut faire peur.
Je ne crois pas du tout au remplacement parce que l'intelligence humaine est importante. L'IA est un outil qui doit servir l'expertise humaine et non pas la remplacer.
Les collaborateurs qui font des tâches facilement automatisables vont devoir être formés si vous voulez les amener vers le conseil. Des plans de formation sont-ils prévus ?
L'idée, c'est de travailler sur ce changement là, l'accompagnement de nos collaborateurs par la formation. La formation vise à expliquer l'intérêt de l'IA, ce qu'est l'IA, appréhender l'IA, démystifier aussi l'IA et les emmener vers une transformation de leur métier et non pas une disparition de leur métier.
Par exemple, des assistantes qui font des comptes rendus de réunions pourront se faire aider de l’IA. Ce qui va leur permettre de dégager du temps pour se concentrer sur d'autres sujets un peu plus intéressants. Et elles sont en demande.
Il n’y a pas de réticences ?
Pas à ma connaissance. Bien au contraire, aujourd'hui, il y a beaucoup d'intérêt sur les sujets de l'IA quel que soit le métier. Lors de mon parcours d'intégration, j’entends que les collaborateurs ont envie de savoir ce que c'est, tester, voir ce que ça donne, comment ça peut les aider, comment on peut mettre en place tout cela en respectant leurs métiers et les clients adhérents.
Quel autre métier est amené à se transformer ?
Les conseillers en gestion vont se servir de l'IA pour apporter à nos clients adhérents un conseil up-to-date, qui respecte les nouvelles réglementations parce qu'il y a une veille qui se fait de manière récurrente, etc. Et ce conseil va être au plus près de la demande de nos adhérents.
Ces conseillers pourront aussi anticiper parfois la demande qui peut émaner de nos clients tout en respectant les réglementations en vigueur (RGDP, IA Act…). C'est un métier qui va vraiment se reposer sur l'IA.

Sur l'outil lui-même, réfléchissez-vous à un circuit fermé pour des questions de confidentialité ? Comment gérez-vous vos données ?
Nous travaillons déjà sur des solutions en circuit fermé, bien sûr, des outils que nous éduquons en interne, car nous avons beaucoup de données (financières) confidentielles. Et même avec nos éditeurs de logiciels, nous sommes toujours soit sur des solutions on-premise [sur site], soit - pour l'IA - sur des circuits fermés que nous maîtrisons complètement pour rester souverains sur les solutions et les données que nous allons traiter.
Quels autres aspects de la souveraineté numérique traitez-vous ?
Nous discutons beaucoup avec les éditeurs de logiciels de paie et de facturation car les évolutions sont très rapides dans notre secteur. Il y a des solutions qui se transforment en mode SaaS et nous essayons de voir comment aborder ces sujets pour rester souverains sur cette partie-là, protéger nos données et les données de nos clients. Nos clients nous font confiance là-dessus, et nous n'avons pas envie de voir des données se balader à droite, à gauche.
La création de la PDP (plateforme de dématérialisation partenaire) pour la facture électronique nous permet également d’assurer notre souveraineté numérique.
Justement sur ce point, avez-vous entamé le processus de dématérialisation ? Tous vos clients vont passer par votre PDP ?
Non, parce qu'il n'y a pas d'obligation à être sur notre PDP. C'est ouvert, nous proposons l’outil aux clients mais ils ont complètement le droit et le choix de souscrire à d'autres PDP. Sur cette PDP, nous garantissons un niveau de sécurité qui répond à toutes les normes en vigueur. Notre PDP est immatriculée et est en phase de test, de rodage.
Avez-vous d'autres priorités dans les semaines à venir ?
Les sujets de la cybersécurité et de la gouvernance de la donnée qui sont étroitement liés à l'IA.
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