Loi Biodiversité : publication du décret anticollision des navires avec des cétacés

10.03.2017

Environnement

Le texte précise les conditions d'application du dispositif de partage des positions.

Comme le rappelle la notice du décret, les collisions avec les navires sont l'une des principales causes de mortalité non naturelle pour les grands cétacés (rorquals communs et cachalots sont les plus touchés). Plus généralement, dans le monde, ces collisions fragilisent plusieurs populations de baleines et nuisent à la sécurité des navires.

Environnement

La mise en place d’une stratégie environnementale cohérente s’impose de plus en plus aux entreprises du fait de la complexité de la législation pour la protection de l’environnement et de la multiplicité des réformes. En effet, de nombreuses lois et réglementations ont récemment impacté les activités économiques (autorisation environnementale, concernant notamment les ICPE, loi de transition énergétique, loi biodiversité)

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Aussi, lors de l'examen de la loi Biodiversité, le ministère de l’environnement a présenté au Sénat, en première lecture, un amendement proposant la mise en oeuvre à titre expérimental d’un dispositif  anticollision, suivi d’un rapport en vue de son extension éventuelle, que l’Assemblée reprendra à son compte en le rendant obligatoire.

Remarque : le dispositif de repérage est désormais au point. Lors des débats parlementaires, la ministre de l’environnement avait souligné que « Les dispositifs de repérage en temps réel des mammifères marins ont été développés par les ingénieurs français en lien avec les organisations de protection de la nature et avec les principales sociétés de transport maritime » et la secrétaire d’État d’ajouter que douze navires en sont d’ores et déjà équipés.

L'article 106 de la loi Biodiversité a donc acté le principe d'une obligation d'équipement des navires d'un dispositif de partage des positions avec les cétacés dans deux aires protégées et pour certaines catégories de navires (v. notre actualité "Loi Biodiversité : focus sur les principales dispositions (3/3)" du 2 septembre 2016). Le décret en précise les modalités d'application.

Champ d'application

Loi et décret précisent les espaces et les navires concernés par cette nouvelle obligation.

Espaces marins concernés

S’agissant de son champ territorial, le dispositif de partage des positions visant à éviter les collisions avec les cétacés n’a pas vocation à s’appliquer à toutes les étendues marines sous juridiction nationale. Il concerne seulement la navigation dans deux aires marines protégées : Pelagos et Agoa (C. envir., art. L. 334-2-2, in fine).

Remarque : le sanctuaire marin international pour la protection des cétacés en Méditerranée (Pelagos) a été créé en 1999, par la France et la principauté de Monaco. Cette zone est délimitée par la presqu’île de Giens, le nord de la Sardaigne et le sud de la Toscane. Elle s’étend sur 87 919 km² et recouvre la zone de plus forte densité de mammifères marins en Méditerranée occidentale. Le sanctuaire est géré par le parc national de Port-Cros. Il fait partie des aires spécialement protégées d’importance méditerranéenne (convention de Barcelone).
Quant au sanctuaire des mammifères marins (Agoa) créé en 2012, il couvre la totalité des eaux des Antilles françaises sur 140 000 km². Un conseil de gestion est installé depuis 2014. Ce site fait partie des zones spécialement protégées (convention de Carthagène).
Navires concernés

Le dispositif ne s’applique qu’aux navires de plus de 24 mètres battant pavillon français et, parmi eux (C. envir., art. L. 334-2-2) :

— les navires de l’État ne participant pas à des activités de sécurité ou de défense nationale ;

— les navires de charge (navires de commerce, navires marchands ou cargos), à l’exception des navires proposant des sorties commerciales d’observation des cétacés ;

— les navires de passagers, à l’exception des navires proposant des sorties commerciales d’observation des cétacés.

 

Ces trois catégories de navires peuvent toutefois être exonérées en cas de navigation ponctuelle (v. ci-dessous).

Navires exclus
Le décret d'application précise les navires qui sont exonérés : il s'agit des navires ayant effectué moins de 10 navigations au cours de l'année civile précédente dans le périmètre de l'aire marine protégée Pelagos ou de l'aire marine protégée Agoa (C. envir., art. R. 334-39).
Remarque : le terme "navigation" doit être interprété comme "tout mouvement de navire à l'intérieur du périmètre de l'aire marine protégée, y compris au départ ou à destination d'un port, d'une installation ou d'une structure au large, d'une station de pilotage ou de tout autre point situé dans ce périmètre" (C. envir., art. R. 334-39).
Caractéristiques et prescriptions techniques
Selon le décret d'application, le dispositif  anticollision doit respecter certaines caractéristiques et exigences techniques en matière (C. envir., art. R. 334-40) :

— de compatibilité avec tout navire soumis à l'obligation d'équipement ;

—  d'accessibilité et d'interopérabilité des données de position des cétacés recueillies, en temps réel, quel que soit le dispositif utilisé ;

—  d'identification des navires équipés.
 
Ces caractéristiques et exigences techniques sont précisées par arrêté conjoint des ministres respectivement chargés de l'environnement et de la mer.
 
Un second arrêté, pris dans les mêmes formes, établit la liste des dispositifs disponibles pour l'équipement des navires y répondant.
Sanctions
La loi établit un régime de contrôles et de sanctions.
 
Les officiers et agents de police judiciaire, les inspecteurs de l’environnement (C. envir., art. L. 172-1), ainsi que certains fonctionnaires dont la liste figure au code rural (C. rur., art. L. 942-1) sont habilités à constater et à rechercher les infractions à cette réglementation (C. envir., art. L. 334-2-5).
 
La loi punit d’une amende de 30 000 €, le fait pour un armateur d’exploiter un navire – autre qu’appartenant à l’État qui n’est pas pénalement responsable (C. pén., art. 121-2) – sans l’avoir équipé du dispositif anticollision. La même peine d’amende sanctionne l’équipement avec un tel dispositif de navires utilisés pour proposer des sorties commerciales comprenant une activité d’observation des mammifères marins (C. envir., art. L. 334-2-3 et L. 334-2-4).
Entrée en vigueur
La loi Biodiversité avait prévu une entrée en vigueur du dispositif décalée de six mois par rapport à la publication du texte (soit le 10 février 2017).
 
Toutefois, et comme on l'a vu précédemment, l'entrée en vigueur du décret est conditionnée à la publication de deux arrêtés (caractéristiques et  exigences techniques d'une part, liste des dispositifs disponibles d'autre part). Le décret prévoit donc que les nouvelles dispositions entrent en vigueur dans un délai de 2 mois à compter de la publication de ces arrêtés, et au plus tard le 1er juillet 2017 (D., art. 2).
 
 
Olivier Cizel, Code permanent Environnement et nuisances

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