Loi Climat et résilience : ce qui change pour les ventes immobilières

20.09.2021

Immobilier

Avec l’objectif de limiter, voire d’enrayer, le dérèglement climatique en France, la loi Climat contient de nombreuses mesures relatives à l’immobilier. Les professionnels vont devoir très vite s’approprier ces multiples changements, dont certains auront des répercussions majeures sur le secteur du logement.

La loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets comprend plus de 300 articles et a été publiée au Journal officiel du 24 août, après sa validation par le Conseil constitutionnel.

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La gestion immobilière regroupe un ensemble de concepts juridiques et financiers appliqués aux immeubles (au sens juridique du terme). La gestion immobilière se rapproche de la gestion d’entreprise dans la mesure où les investissements réalisés vont générer des revenus, différents lois et règlements issus de domaines variés du droit venant s’appliquer selon les opérations envisagées.

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Votée en procédure accélérée, la loi Climat et résilience fait suite au Grand débat national de 2019 et à la Convention citoyenne pour le climat qui s’en est suivie, et à l’issue de laquelle, le 21 juin 2020, ont été remises au gouvernement 149 propositions visant à réduire les émissions nationales de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030, objectif imposé par la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat. Cette nouvelle loi s'inscrit dans la droite ligne de ce texte et des autres lois et plans déjà adoptés en ce sens, en particulier, la loi d'orientation des mobilités du 24 décembre 2019, le plan France Relance présenté le 3 septembre 2020 ou encore la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire du 10 février 2020.

En France, le tertiaire, c’est-à-dire les bureaux et les habitations, représentent 25 % des émissions de gaz à effet de serre et 45 % de la consommation d’énergie. La loi Climat se devait donc inévitablement d’inclure la question du logement pour lutter contre le dérèglement climatique. Petit tour d’horizon des changements induits pour les transactions immobilières…

Remise du carnet d’information du logement à l’acquéreur

Ce carnet numérique qui avait vu le jour avec la loi de transition énergétique de 2015 revient en force dans la loi Climat. Établi lors de la construction d’un logement ou lors de la réalisation de travaux de rénovation impactant significativement sa performance énergétique, le carnet d’information du logement (CIL) devra être transmis à l’acquéreur en cas de mutation, au plus tard à la date de la signature de l’acte authentique. L’acheteur attestera de sa remise dans l’acte de vente (loi Climat, art. 167). Un décret en Conseil d’État et un arrêté préciseront notamment l’incidence significative des travaux (v. notre article, « Le retour en force du carnet d'information du logement, à compter de 2023 »).

Audit énergétique en plus du DPE

Audit obligatoire en cas de vente de logements individuels F et G

La loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat avait prévu qu’à compter du 1er juillet 2021, le diagnostic de performance énergétique (DPE) réalisé lors de la vente  ou de la location d’un logement ayant une consommation énergétique primaire supérieure ou égale à 331 kWhep/m2.an devait comprendre un audit énergétique. La loi Climat recentre l’obligation sur les seuls logements individuels classés F et G proposés à la vente dès le 1er janvier 2022 (en métropole). Les biens classés E seront soumis à la même obligation à compter de 2025 et ceux classés D en 2034 (v. notre article, « Mise en consultation publique du projet d'arrêté fixant le contenu de l'audit énergétique »).

L’audit énergétique devra être remis par le vendeur ou son mandataire (agent immobilier, notaire, etc.) aux candidats acquéreurs dès la première visite du bien. Cette remise pourra s’effectuer par tous moyens, y compris par voie dématérialisée.

L’audit énergétique sera intégré au dossier de diagnostic technique (DDT), fourni par le vendeur, et annexé à la promesse ou, à défaut, à l’acte authentique portant sur la vente de tout ou partie d’un immeuble bâti.

Le contenu de l’audit sera précisé par arrêté tandis que le niveau de compétence de l’auditeur et l’étendue de sa mission et de sa responsabilité seront fixés par décret (loi Climat, art. 158).

Remarque : alors que le DPE fait l’état des lieux d’un logement, l’audit s’apparente davantage à un bilan global de ses performances énergétiques avec, non pas de simples recommandations, mais des propositions concrètes de plans d’actions sur la structure du bâtiment, l’état de l’isolation thermique, les équipements de chauffage, de production d’eau chaude sanitaire, de ventilation, d’éclairage, etc. en vue de réduire les consommations d’énergie du logement. Autrement dit, si le diagnostic de performance énergétique soulève les problèmes des logements classés F ou G, l’audit devra apporter des solutions (v. notre article, « Nouvelle répartition des rôles entre DPE collectif et audit énergétique »).

Accompagnement personnalisé lors des travaux après vente

La loi Climat prévoit la création d'un nouveau statut d'opérateurs agréés, qui pourront accompagner les ménages durant tout leur parcours de rénovation, afin de rendre les rénovations plus simples et d'en améliorer la qualité et l'ambition. Ce système « d'accompagnateur rénov' » s'inscrit dans la continuité du service public de la performance énergétique de l'habitat qui assure déjà gratuitement une mission d'information et de conseil partout en France grâce à un réseau de guichets locaux. Cet accompagnement sera progressivement rendu obligatoire pour les rénovations les plus ambitieuses, afin d'accéder aux aides publiques. Ainsi, le particulier souhaitant effectuer des travaux de rénovation dans son logement pourra compter sur un interlocuteur unique tout au long du processus, de la définition des opérations au suivi des travaux, en passant par l'élaboration du plan de financement et l'obtention des aides disponibles.

En cas de vente d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment soumis à l’obligation d’audit énergétique, avec l’accord de l’acquéreur, le notaire rédacteur adresse au guichet compétent, au plus tard un mois après la signature de l’acte authentique de vente, et par tous moyens y compris par voie dématérialisée, l’audit, les informations nécessaires à l’identification du bâtiment vendu et les coordonnées de l’acheteur. Le guichet pourra alors utiliser ces informations à des fins d’information et de conseil de l’acquéreur concernant la performance énergétique du bien soumis à l’audit.

Un décret en Conseil d’État précisera le contenu et les modalités de transmission de ces données (Loi Climat, art. 164).

Remise de l’état des risques dès la première visite

L’état des risques naturels et technologiques (ERNT) devra désormais être transmis  à l’acquéreur (ou au locataire) lorsque le bien est soumis à un plan de prévention des risques miniers ou situé dans une zone susceptible d’être atteinte par le recul du trait de côte. De plus, l’état des risques devra être complété par les informations relatives à d’éventuels sinistres dont l’immeuble aura fait l’objet et ayant donné lieu au versement d'une indemnité pendant la période où le vendeur a été propriétaire de l'immeuble ou dont il a été lui-même informé. Auparavant, cette information figurait dans un écrit à part.

L’état des risques ainsi complété devra être remis au candidat à l’achat (ou à la location) dès la première visite du bien, puis annexé à l’acte de vente (ou au bail).

Remarque : en ayant connaissance des données sur le recul côtier en amont de la vente (ou de la location), notamment lors de la visite des lieux, les personnes concernées pourront tenir compte du phénomène d’érosion du littoral dans les prix du marché immobilier.

Si l’état des risques n’est pas communiqué à l’acquéreur au plus tard à la date de la signature de la promesse de vente ou du contrat préliminaire, le délai de rétractation de l’article L. 271-1 du CCH ne court qu’à compter du lendemain de la remise de ce document à l’acheteur. De même, à défaut de promesse ou de contrat préliminaire, si l’état des risques n’est pas annexé à l’acte authentique de vente, le délai légal de réflexion ne court qu’à compter du lendemain de sa transmission à l’acquéreur.

Ces mesures entreront en vigueur lors de la parution du décret en Conseil d’État pris pour leur application, et au plus tard, le 1er janvier 2023 (Loi Climat, art. 236).

Information renforcée dans les annonces immobilières

Toute annonce de mise en vente (ou en location) d’un bien immobilier doit mentionner, non seulement le classement du bien au regard de sa performance énergétique, mais aussi son classement au regard de sa performance en matière d’émissions de gaz à effet de serre (GES) dans la nouvelle échelle de classement des logements issue de la réforme du DPE (Loi Climat, art. 153 ; v. aussi notre article, « Le DPE, accélérateur des chantiers de rénovation énergétique »).

En cas de manquement au respect de cette obligation d’information, seuls les professionnels pouvaient jusqu’à présent faire l’objet de sanctions. Les annonces de particuliers étant majoritaires, la loi Climat prévoit que les non- professionnels pourront dorénavant faire l’objet d’une amende après l’envoi d’une mise en demeure par l’autorité administrative (Loi Climat, art. 154).

Remarque : le but de cette mesure est non seulement d’uniformiser les pratiques entre professionnels et particuliers mais surtout de systématiser l’affichage du DPE dans les annonces immobilières.

Par ailleurs, toute annonce, quel que soit son support de diffusion, relative à la vente (ou à la location) d’un bien immobilier devant faire l’objet d’un état des risques ou situé dans une zone susceptible d’être atteinte par le recul du trait de côte, devra préciser comment accéder aux informations correspondantes concernant le bien (Loi Climat, art. 236).

Remaniement de certains droits de préemption et de préférence en cas de vente

La loi Climat prévoit un droit de préemption spécifique et prioritaire permettant aux communes d’acquérir les biens situés sur les terrains amenés à disparaître avec le recul côtier. Un décret précisera les conditions d’exercice de ce nouveau droit de préemption (Loi Climat, art. 244).

Le droit de préemption du département ou du Conservatoire du littoral sur les espaces naturels sensibles est rétabli. Par suite, les préemptions décidées dans ces périmètres depuis 2016 sont officiellement validées afin d’assurer la sécurité juridique de ces acquisitions. Les modalités de ce droit de préemption seront définies par un décret en Conseil d’État (Loi Climat, art. 233).

Le droit de préférence des propriétaires de terrains boisés contigus à une propriété classée en nature de bois et forêts d’une superficie inférieure ou égale à 4 hectares mise en vente est restreint. En effet, il est ajouté un cas supplémentaire à la liste des exclusions à ce droit de préférence. Il s’agit des ventes réalisées au profit d’un conservatoire régional d’espaces naturels ou au profit du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (Loi Climat, art. 230).

Remise du PPT à l’acquéreur de lot de copropriété

La réalisation d’un projet de plan pluriannuel de travaux (PPT) devient obligatoire dans les copropriétés de plus de 15 ans, comprenant des immeubles à destination partielle ou totale d’habitation. Dans ce cas, lors de l’acquisition d’un lot de copropriété, le PPT, ou le projet s’il n’a pas encore été adopté en assemblée, s’ajoute à la liste des documents à remettre à l’acquéreur et nécessaires pour faire courir le délai de rétractation de l’article L. 721-2, II, 6° du CCH. L’application de cette mesure dans les copropriétés à usage de logements, de bureaux ou de commerces s’effectuera progressivement à compter du :

- 1er janvier 2024 pour les copropriétés de plus de 200 lots ;

- 1er janvier 2025 pour les copropriétés entre 51 et 200 lots ;

- 1er janvier 2026 pour les copropriétés d’au plus 50 lots.

De plus, le syndicat des copropriétaires devant constituer un fonds de travaux, notamment pour les dépenses prévues dans le PPT adopté en assemblée générale, la loi Climat précise que les sommes versées au titre de ce fonds de travaux sont attachées aux lots (et non aux copropriétaires). Elles entrent définitivement, dès leur versement, dans le patrimoine du syndicat des copropriétaires et ne sont donc pas remboursées lors de la cession d’un lot (Loi Climat, art. 171).

Selon le Ministère de la transition écologique, la loi Climat nécessitera plus d’une centaine de textes d’application pour permettre la mise en œuvre de l’ensemble de ses mesures. Mais, à l’exception de ces dispositions qui nécessitent un texte réglementaire et de celles qui entrent en vigueur de manière différée, la loi est applicable depuis le 25 août dernier.

Laurence DARTIGEAS-REYNARD, Dictionnaire Permanent Transactions immobilières
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