Face à la montée en puissance du droit pénal de l’environnement, les entreprises sont moins préoccupées par les nouveaux délits et les sanctions plus lourdes instaurés par la loi Climat que par l’instabilité législative et les incessantes évolutions réglementaires qui en découlent. Quant à la véritable révolution verte, elle devrait plutôt venir des tribunaux spécialisés et de la CJIP.
Adoptée en juillet et promulguée en août 2021, la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et le renforcement de la résilience face à ses effets vient renforcer le droit pénal de l’environnement en introduisant de nouveaux délits environnementaux et un alourdissement des peines encourues par les entreprises et leurs dirigeants. Elle crée le délit de mise en danger de l'environnement en cas de non-respect des prescriptions relatives aux installations classées, à la gestion des déchets et au transport de matières dangereuses, et punit le fait de rejeter dans l’air ou dans les eaux une ou des substances qui entraînent des effets nuisibles graves et durables sur la santé, la flore, la faune, ainsi que le fait d’abandonner, de déposer ou de gérer de façon irrégulière des déchets entraînant une dégradation de la faune et de la flore.
Toutes ces nouvelles dispositions n’ont toutefois pas entraîné « de fébrilité majeure de la part des entreprises », observe Alexandre Moustardier, associé d’Atmos Avocats et spécialisé en droit de l’environnement. « Nous sommes sollicités pour des consultations ponctuelles sur des points précis de la loi qui concernent nos clients », mais les quelques 300 articles du texte n’ont pas provoqué de séisme car « cette loi c’est essentiellement une compilation d’obligations qui existaient déjà et qui ont été reformulées ou accentuées ». Ainsi,
« l’écocide correspond à un délit de pollution qui existait déjà ».
De même, le volet pollution de la loi Climat « est déjà rentré dans le logiciel des industriels : les pollutions industrielles ont des sources très identifiées et leur surveillance est constante », pointe l’avocat spécialiste du droit de l’environnement David Desforges. « Les seuls secteurs qui se sont un peu alarmés sont ceux corrélés à l’officialisation de la réforme du droit minier : ce n’est pas nouveau, mais maintenant c’est inscrit dans la loi », relève Yvon Martinet, associé de DS Avocats. Au final, c’est
« un jalon supplémentaire dans la prise de conscience des risques environnementaux par les entreprises, mais ce n’est pas disruptif, on est dans un continuum », résume-t-il.
Et, pour l’instant, « on est surtout dans l’expectative » de la centaine de décrets à paraître, et « les clients s’interrogent sur ce qu’il y aura dans tel ou tel décret », reprend David Desforges. « Je participe parfois aux consultations publiques sur des décrets, à la demande des clients », ajoute-t-il, « c’est un outil précieux » pour faire remonter certaines informations et préoccupations des clients.
Surtout, ce qui préoccupe le plus les acteurs économiques c’est « l’instabilité législative, les changements réglementaires et tout le volet administratif lié à ces modifications », explique David Desforges : « le fait que la loi change perpétuellement, parfois avant même que les décrets ne paraissent, est un vrai sujet de préoccupation pour les entreprises, qui doivent gérer de nombreuses questions technico-juridiques - liées à la fabrication, à l’emballage, etc ». Ainsi, la loi Climat de 2021 est venue modifier des dispositions de la loi économie circulaire de 2020.
« Cela change tout le temps et cette absence de visibilité à long terme est très préoccupante pour les entreprises », explique Alexandre Moustardier. Et bien que le droit de l'environnement soit essentiellement un droit européen, « ce n’est pas toujours facile d’anticiper parce que l’État français va souvent au-delà des directives » lors des transpositions. « Comparée à d’autres secteurs, la surtransposition est assez modérée en France car les textes européens sont assez contraignants en matière d’environnement », estime Yvon Martinet. « Cela assure une certaine prévisibilité sur les grandes orientations mais pas dans les détails.
Nous aimerions bien qu’il y ait la possibilité d’un rescrit environnemental auprès de la DGPR [Direction générale de la prévention des risques] ou du ministère pour apporter de la sécurité juridique au cas par cas, car nous avons du mal à obtenir des positions de l’administration. Mais ce n’est pas dans les tuyaux pour l’instant ».
Plus que l’alourdissement des peines prévu par la loi Climat, c’est la réforme de la procédure pénale en matière environnementale instaurée par la loi du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen qui devrait avoir un réel impact en matière de contentieux, avec la création des juridictions spécialisées et de la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) environnementale.
« L’alourdissement des peines ne fait pas partie des préoccupations majeures des entreprises car les amendes maximales sont rarement prononcées », rappelle David Desforges.
« La composition pénale est un bon moyen de gérer les litiges et de désencombrer les tribunaux. Beaucoup de clients sont preneurs de solutions négociées parce qu’il y a moins d’incertitude, et parce qu’ils ne sont pas familiers de la justice – or, pour des infractions environnementales, on se retrouve entre des violences conjugales et des délits routiers ».
Dans les pôles spécialisés, « les dossiers seront confiés à des magistrats formés et qui ont les moyens de travailler » et on peut s’attendre à « une harmonisation de la jurisprudence », pointe Alexandre Moustardier. La spécialisation des juridictions devrait aussi « permettre un meilleur dialogue, une discussion moins affective, plus expertale et plus apaisée », relève Yvon Martinet, sauf si les magistrats cèdent « à la tentation du militantisme et de la recherche d’exemplarité – c’est un risque, dans les deux ou trois premières années ». D’autant plus que « ce droit très complexe est devenu un droit sociétal » et que « le risque médiatique a augmenté », souligne David Desforges.
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